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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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punch.
    Cassy, se glissant inaperçue hors de la salle, profita de ce moment pour aller porter secours au pauvre Tom.
    Que s’était-il donc passé dans l’esprit de Legris ? Qu’y avait-il dans une simple boucle de cheveux blonds pour exaspérer cet homme brutal, familiarisé depuis longtemps avec tous les raffinements de la cruauté ? Endurci et réprouvé comme le paraissait aujourd’hui cet impie, il avait été autrefois bercé sur le sein d’une mère, – endormi au chant des hymnes et des prières, ce front, maintenant marqué du sceau de l’enfer, avait été arrosé des eaux saintes du baptême. Dans sa première enfance une femme, aux cheveux blonds, l’avait conduit, au son de la cloche du dimanche, prier et adorer. Au fond d’une partie reculée de la Nouvelle-Angleterre, cette femme avait élevé son fils unique avec un patient et fervent amour. Né d’un homme au cœur dur, pour lequel la douce femme avait dépensé un monde de tendresses incomprises, Legris avait suivi les traces de son père. Violent, sans frein, tyrannique, il méprisa les conseils de sa mère, se rit de ses reproches, et, tout jeune encore, se sépara d’elle pour aller tenter la fortune sur l’Océan. Depuis, il n’était revenu qu’une fois au logis. Elle, avec l’élan passionné d’un cœur qui a besoin d’aimer, et qui n’a rien autre à aimer, se cramponna à lui, le supplia avec d’ardentes prières, pour le bien éternel de son âme, de rompre avec sa vie de péché.
    Ce fut le jour de grâce accordé à Legris. Les anges le sollicitèrent ; il fut presque gagné ; la miséricorde divine lui tendait la main. Son cœur s’amollit – il y eut lutte – le péché l’emporta. Il opposa l’énergie de son âpre et mauvaise nature aux convictions de sa conscience. Il but, il jura, il devint plus féroce, plus brutal que jamais. Un soir que sa mère, dans l’agonie du désespoir, s’était jetée à ses genoux, il la repoussa rudement ; elle tomba sans connaissance sur le parquet, et il s’enfuit, avec de sauvages imprécations, rejoindre son vaisseau. Legris n’entendit plus parler de sa mère qu’une fois. C’était la nuit, il s’enivrait avec ses compagnons de débauche ; on lui remit une lettre, il l’ouvrit : une longue mèche de cheveux se déroula, s’enlaça autour de ses doigts. La lettre lui annonçait la mort de sa mère : mourante, elle l’avait béni et lui avait pardonné.
    Il y a dans le mal une puissance magique et impie, qui change en fantômes d’horreur et d’effroi les plus saintes, les plus douces choses. Cette mère aimante, au pâle visage, – ces prières, – ce pardon plein d’amour, envoyé de son lit de mort, – ne furent pour ce cœur endurci par le péché qu’une sentence de damnation, effrayant avant-coureur du jugement de Dieu et de l’irrévocable châtiment. Legris brûla la lettre, brûla les cheveux, et quand il les vit se tordre et siffler dans les flammes, il frissonna en pensant aux feux éternels. Il but, il festoya, il s’efforça de conjurer ce souvenir ; mais souvent, au profond de la nuit, dont le calme solennel cite l’âme devant son propre tribunal, il avait vu cette pâle figure se dresser à ses côtés ; il avait senti, autour de ses doigts, les enlacements de ces cheveux, jusqu’à ce qu’une sueur froide lui inondât la face, et qu’il s’enfuit de son lit en proie à l’épouvante.
    Vous qui vous êtes étonnés de lire dans le même Évangile : « Dieu est amour, et Dieu est un feu dévorant ; » ne comprenez-vous pas que, pour l’âme vouée au mal, l’amour est la plus cruelle torture, l’arrêt et le sceau du plus horrible désespoir !
    « Malédiction ! se disait Legris en buvant son punch ; où diable a-t-il déniché cela ? – C’est que c’était tout juste pareil… Ouf ! – je croyais l’avoir oublié. Mais le diable m’emporte si l’on oublie rien, quoi qu’on fasse ! Peste soit de la mémoire et de ses tours ! Je suis seul comme un hibou ! Je vais appeler Em. Elle me hait, – la macaque ! C’est égal, – il faudra bien qu’elle vienne ! »
    Legris sortit dans un grand vestibule qui communiquait avec l’étage supérieur par un escalier tournant, autrefois splendide. Le palier était sale, délabré, encombré de caisses et de toutes sortes d’ignobles rebuts. Les marches montaient et tournoyaient dans l’obscurité, conduisant on ne savait où. La pâle lueur de la lune

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