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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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attendit une occasion favorable.
    En cajolant Legris, et saisissant une éclaircie dans son humeur noire, elle avait obtenu de l’accompagner à la ville voisine, située sur la rivière Rouge. La mémoire merveilleusement aiguisée par l’espérance, elle observa, pendant l’allée et le retour, chaque tournant de la route, et se forma une idée juste du temps nécessaire pour la parcourir.
    Enfin, le moment décisif approchait. Legris était allé à cheval visiter une ferme des environs. Depuis plusieurs jours, Cassy était d’une grâce et d’une aménité peu ordinaires, et ils étaient ensemble, du moins en apparence, sur les meilleurs termes.
    La nuit tombait. Emmeline et Cassy, enfermées dans la chambre de la première, faisaient en hâte deux petits paquets.
    « Ils suffiront, dit Cassy ; maintenant, mettez votre chapeau et partons : il est temps.
    – Mais on peut encore nous voir.
    – C’est ce que je veux, reprit froidement Cassy. Ne savez-vous pas qu’en tout cas ils nous donneront la chasse ? Voilà mon plan : nous allons nous glisser dehors par la porte de derrière, et passer en courant devant les cases. Sambo ou Quimbo ne peuvent manquer de nous apercevoir. Ils se mettront à notre poursuite, et nous entrerons dans le marécage : impossible à eux de nous y suivre. Il leur faudra retourner en arrière, donner l’alarme, assembler les chiens ; et tandis qu’ils se croiseront, qu’ils se culbuteront, comme ils le font régulièrement à tout événement imprévu, nous suivrons à gué la crique qui s’étend derrière la maison jusqu’à ce que nous nous trouvions en face de la porte. Cette contre-marche mettra les chiens en défaut, car l’eau rompt la piste. Tout le monde désertera la maison pour courir après nous, et nous y rentrerons par la porte de derrière, et gagnerons le grenier, où j’ai fait un bon lit dans une des grandes caisses. Nous habiterons forcément ce grenier quelque temps ; car il soulèvera ciel et terre contre nous. Il enrôlera quelques vieux piqueurs des autres plantations, et se donnera le plaisir d’une grande chasse. Ils fouilleront pouce à pouce tout le sol du marais. C’est un de ses sujets d’orgueil que personne n’ait jamais pu lui échapper ! Qu’il chasse donc tout à loisir !
    – Cassy, comme votre plan est bien conçu ! dit Emmeline. Vous seule pouviez l’imaginer. »
    Les yeux de Cassy n’exprimèrent ni joie ni triomphe, rien que la fermeté du désespoir.
    « Allons, » dit-elle, en tendant la main à Emmeline.
    Les deux fugitives se glissèrent dehors sans bruit, et longèrent à travers les ombres du crépuscule le quartier des esclaves. Le croissant de la lune, se dessinant à l’ouest sur le ciel comme un sceau d’argent, retardait un peu les approches de la nuit. Ainsi que l’avait prévu Cassy, une voix leur cria de s’arrêter, au moment où elles atteignaient le bord du marais qui cernait la plantation. Ce n’était pas Sambo, mais Legris, qui les poursuivait en les accablant d’injures. Emmeline se sentit défaillir, et suspendue au bras de sa compagne, elle dit :
    « Ô Cassy, je me trouve mal !
    – Tenez bon, ou je vous tue ! » Cassy tira de son sein un stylet ; elle en fit briller la lame aux yeux de la jeune fille.
    Ce moyen extrême lui réussit : Emmeline ne s’évanouit pas. Toutes deux se plongèrent, dans le labyrinthe du marais, à un endroit si épais et si noir, qu’il eût été insensé à Legris de tenter de les y suivre sans renfort.
    « Bien ! dit-il avec un féroce ricanement, elles se sont prises d’elles-mêmes au piège, – les coquines ! Elles sont en bon lieu. Elles me le payeront cher ! Holà ! hé ! Sambo ! Quimbo ! tout le monde ! cria Legris, arrivant aux cases comme les esclaves revenaient du travail. Il y a deux fuyantes dans le marais. Cinq dollars pour le nègre qui me les rattrape. Lâchez les chiens ! lâchez Tigre, Furie, toute la meute ! »
    La nouvelle produisit une vive sensation. Plusieurs hommes s’élancèrent en avant pour offrir leurs services, dans l’espoir de la récompense, ou par suite de cette rampante servilité qui est un des plus odieux effets de l’esclavage. Les uns couraient à droite, les autres à gauche ; quelques-uns allumaient des torches de résine, d’autres détachaient les chiens, dont les aboiements rauques et sauvages complétaient le tumulte.
    « Tirerons-nous dessus, mait’, si nous ne pouvons pas les

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