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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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trouvait avant le départ, et ma bande n’était pas encore à la chaîne. La femme n’en fait ni une ni deux, elle arrache un couteau à un des matelots, saute comme un chat sauvage sur une balle de coton, et met tout notre monde en fuite. C’était bon pour la minute, bien entendu. Quand elle voit ça, elle se retourne, et, pan ! elle s’élance, la tête la première, enfant et tout, dans la rivière, où elle est encore.
    – Bah ! dit Tom Loker, qui avait écouté avec un évident mépris ; vous n’êtes tous deux que des poules mouillées ! Mes filles ne se permettent pas de pareils tours avec moi !
    – Vrai ? et comment les en empêchez-vous, je vous prie ? demanda Marks vivement.
    – Moi ? quand j’achète une fille, dès que son petit est mûr pour la vente, je vais droit à elle, je lui mets le poing sous le nez : – Regarde-moi ce poing, lui dis-je. Si tu t’avises de souffler, tu vois ce qui t’aplatira la face. Je ne veux pas entendre un mot, – pas le commencement d’un mot. Ce petit est à moi, non à toi, et tu n’as que faire de t’en inquiéter. Je le vends à la première occasion. Prends garde ! pas de farces ! où je te ferai souhaiter de n’être jamais née. Je vous garantis qu’elles savent qu’il ne s’agit pas de rire quand j’empoigne, et je vous les rends muettes comme des poissons. S’il s’en trouve une qui piaille un brin, alors !… » Le poing de M. Loker, descendant pesamment sur la table, acheva sa phrase.
    « Voilà ce qui s’appelle de l’ éloquence , dit Marks, tapant sur le ventre de Haley en riant. Est-il original, ce Tom ! hi, hi, hi ! Parions qu’il n’y a pas tête crépue qui ne comprenne, quelque dure qu’elle soit ! Vrai, Tom, vous savez faire entrer les choses dans la cervelle, vous ; et si vous n’êtes le diable, par ma foi, vous êtes son cousin germain ! »
    Loker accepta le compliment avec la modestie voulue, et prit l’air aussi affable que le comportait son naturel de boule-dogue. Quant à Haley, qui ne s’était pas ménagé les spiritueux, il commençait à sentir en lui une recrudescence de moralité, phénomène qui n’est pas rare en pareille occurrence chez les hommes graves et méditatifs.
    « Là, Tom ! Eh bien, je vous l’ai toujours dit : vous êtes par trop rude ! Nous en avons souvent causé ensemble à Natchez ; et, comme je vous l’ai prouvé maintes et maintes fois, à ménager quelque peu la marchandise on n’en fait pas moins son chemin dans ce bas-monde, et l’on conserve plus de chance pour l’autre, vienne le pire du pire, voyez-vous !
    – Pouah ! – hé, je vois de reste ! N’allez pas me débiter toutes vos fadaises de rebut, Haley ; je n’ai pas déjà l’estomac trop solide, et ça me tourne sur le cœur. » Cessant de parler, Tom absorba un demi-verre d’alcool pur.
    « Je dis – et se renversant sur sa chaise, Haley gesticula avec véhémence, – et je le maintiens, j’ai toujours poussé mon commerce de façon à faire autant que qui que ce soit, primo et d’abord , de l’argent. Mais le trafic n’est pas tout ; l’argent n’est pas tout ; nous avons des âmes, tous tant que nous sommes, au bout du compte. – Peu m’importe qu’on hausse les épaules, j’ai mon opinion là-dessus, et rien ne m’empêchera de la dire. J’ai une religion , j’y crois, et quelqu’un de ces jours, quand j’aurai arrondi mon petit lopin, je songerai sérieusement à mon âme. – À quoi bon se faire plus méchant que de raison ? – est-ce agir prudemment, je le demande ?
    – Songer à votre âme ! répéta dédaigneusement Tom. Fameux lorgnon que celui qui découvrirait la vôtre ! – Ménagez le fret pour cette denrée-là, Haley, croyez-m’en. Si le diable s’avise jamais de vous passer au crible, je le défie, ma foi, de trouver trace d’âme !
    – Ah çà, Tom, vous êtes par trop bourru, aussi ! Ne sauriez-vous prendre en bonne part ce qu’on ne vous dit que pour votre bien !
    – Laissez donc reposer un peu vos mâchoires, Haley, vociféra Tom. Je puis endurer toutes vos balivernes, hors vos fadaises dévotes. – Vos prêches m’assomment, vous dis-je ! Quelle différence y a-t-il de vous à moi, s’il vous plait ? Est-ce que vous avez un brin plus de pitié, un brin plus de vergogne, ou de quoi que ce soit ? – C’est de la bonne, belle et pure vilenie pour duper le diable et sauver votre peau. Croyez-vous qu’on ne vous devine

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