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La chambre du diable

La chambre du diable

Titel: La chambre du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Harding
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Gand, avez laissé
entendre, à demi-mot, que cette aubaine était en fait due à la trahison d’un
des Français.
    Gervase lança un coup d’œil au régent ; celui-ci
prit le trognon de la pomme et se mit à le grignoter.
    – Continuez, mon frère, murmura-t-il.
    – Vous ne pouviez, monseigneur, en croire votre
chance. Deux des plus dangereux bateaux de la flotte française avaient été
détruits ou capturés. Leurs capitaines et leurs officiers, eux, étaient soit trépassés
soit prisonniers. Vous aviez à la fois les cargaisons et l’argent des rançons
des otages mais vous avez décidé que vous pouviez gagner davantage encore.
    Gand, à présent, souriait dans sa barbe.
    – Quelle merveilleuse façon de piéger Mercure, l’espion,
le tueur professionnel à la Cour française ! Il suffisait qu’on apprenne –
et je suis sûr que vous pouviez le faire savoir par le biais de nos envoyés aux
négociations de trêve – que l’un des captifs d’Hawkmere était l’un de vos
agents.
    – Bien raisonné, commenta Gervase. Frère
Athelstan, vous devriez vraiment travailler pour la Maison des Secrets !
    – Vous jouiez avec la vie de ces hommes ! reprit
Athelstan. La Cour française était fort courroucée que l’affidé, responsable de
la destruction de deux de ses plus beaux navires, puisse à présent aspirer à
une retraite honorable comme pensionnaire au palais de Savoy. Des ordres furent
délivrés et Mercure commença son œuvre sanglante.
    – Mon frère, mon frère, l’interrompit Gand en
hochant la tête avec admiration comme pour saluer un beau coup aux échecs ou à
un jeu de hasard, vous oubliez qu’il s’agissait de prisonniers français, détenus
pour obtenir une rançon. S’ils mouraient, je perdais l’argent.
    – Petit prix à payer, monseigneur. Vous
investissiez une livre et récupériez un trésor. Les Français ne se serviraient
pas de ces morts pour rompre la trêve. Pourquoi s’en soucieraient-ils si l’espion
était occis ?
    Sir Maurice semblait abasourdi. Il se gratta le crâne
et tambourina sur la table.
    – Mais qui est Mercure ? Où est-il ? Comment
pouvait-il user des poisons avec tant d’adresse ? Pourquoi tuer cette
malheureuse jouvencelle ? Et le meurtre de Maneil avec une arbalète ?
    Le dominicain ne tint pas compte de ses questions.
    – Monseigneur, n’est-ce pas la vérité ?
    – Si fait. « N’accorde pas confiance aux
princes », dit le psalmiste. Croyez-moi, Athelstan, jamais paroles ne
furent plus justes. Hors de Londres, la Grande Communauté du Royaume conspire
et ourdit des complots. En Manche et en mer d’Irlande, les Français attendent, prêts
à exploiter la moindre faiblesse. Le St Sulpice et le St Denis ont
été pris par chance et par la volonté de Dieu. Mais, comme ne l’ignore pas la
Maison des Secrets, Mercure a causé de graves dommages à notre cause, à la fois
ici et à l’étranger. Espion et assassin, je me suis demandé si on pouvait l’attirer
par ruse au grand jour. Quand les captifs ont commencé à périr, j’ai compris
que j’avais raison. Les Français les tueraient tous, ou certains d’entre eux, jusqu’à
ce qu’ils pensent avoir vengé l’insulte. Mais les trépas eux-mêmes ?
    Gand hocha la tête.
    – Ils restent un mystère pour moi.
    – Aspinall, le mire, est-il arrivé ? s’enquit
le dominicain.
    – Oui, répondit le coroner. J’ai ordonné qu’il
soit enfermé dans une chambre de l’étage. Il a protesté mais il n’en mène pas
large.
    – Faites-le descendre, ordonna Athelstan en
tapotant la table qui se trouvait à côté de lui. Et qu’il s’asseye ici.
    Sir John sortit et, quelques minutes plus tard, revint
en compagnie du médecin. Ce dernier était de toute évidence agité et cela ne
fit qu’empirer quand il réalisa en présence de qui il se trouvait. Il fit une
courbette mais Jean de Gand n’y prêta pas attention.
    – Quelque chose ne va pas, frère Athelstan ?
bafouilla-t-il. Je veux dire…
    – Quand on empoisonne quelqu’un, questionna le
dominicain, comment agit le toxique ?
    Aspinall déglutit avec peine.
    – Eh bien, il descend dans les entrailles et
dérange fort les humeurs du cœur et du cerveau.
    – Et existe-t-il un poison qu’on puisse avaler
sans danger si ce n’est qu’en le mâchant il pourrait tuer ?
    Le médecin essuya une goutte de sueur sur sa lèvre
supérieure.
    – Si c’est le cas, jamais je n’en ai ouï

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