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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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gobelets et pichets sur un plateau, et sans autre manière éleva un broc au-dessus de sa bouche pour régaler de vin sa gorge desséchée. Puis il tendit l’anse de terre cuite à Béryl qui l’avait suivi et regardait, envieux, le breuvage rougeoyant tomber dans un bruit de glotte. Il apaisa sa soif de même, tandis que Huc envoyait le restant du service auprès des bûcherons qui n’avaient pris aucun repos.
    –  Il me faut faire mon rapport, soupira Huc lorsque son comparse renversa son poignet, la cruche vidée.
    –  Je vous accompagne. Nous ne serons pas trop de deux, remarqua Béryl avec un sourire contraint.
    Huc lui rendit grâce de sa sollicitude d’un œil amusé. Ils se connaissaient depuis si longtemps, ces deux-là, qu’ils savaient tous deux le mauvais caractère de leur maître. Mauvais caractère qui ce matin tournait à l’exécrable, au point qu’il avait refusé de se montrer.
    –  Allons, compère, lança Huc en allongeant son pas vers la partie saine de la bâtisse.
     
    François de Chazeron tournait et retournait dans l’unique pièce aux fenêtres intactes, mains croisées et serrées dans le dos.
    –  Cessez de geindre, voulez-vous, vous m’exaspérez ! ragea-t-il en se tournant une fois de plus vers sa jeune épouse Antoinette, terrorisée.
    Elle avait cru leur dernière heure arrivée cette nuit et s’était réfugiée avec ses chambrières sous l’immense table qui trônait dans le donjon, hurlant de frayeur, écorchant les oreilles des pages terrés dans la cave et de son époux qui avait bravé les éléments depuis la fenêtre de sa tour, au point d’avoir reçu au visage les éclats de verre des vitres lorsque le chêne avait frôlé son repaire.
    Antoinette leva les yeux vers son mari dont la figure s’ornait de stries de sang coagulé, et au lieu de s’apaiser éclata en sanglots convulsifs. François sentit la fureur rougir son visage. Il n’en pouvait plus de ces emportements de femelle. Il se força pourtant à se contrôler.
    –  Nous sommes saufs, Antoinette, alors par Dieu reprenez-vous ! siffla-t-il entre ses dents. Vous avez un rang à tenir, une maisonnée à discipliner ! Il n’est plus l’heure des lamentations, je vous l’assure !
    –  Je ne me lamente pas, messire, hoqueta Antoinette, je m’efforce de prier, oh oui, je m’efforce… insista la malheureuse dans un nouveau sanglot.
    François fondit sur le fauteuil dans lequel elle se tenait. Il s’agrippa à l’accoudoir et planta son visage au-dessus du sien.
    –  Alors efforcez-vous en silence ! Vous m’empêchez de réfléchir.
    Antoinette cacha son nez dans son mouchoir et hocha la tête, les yeux baignés de larmes. Son époux avait raison, pour sûr, mais c’était plus fort qu’elle.
    C’est à cet instant que Huc de la Faye et Béryl pénétrèrent dans la pièce. François se tourna d’un bloc et leur fit face. Ils s’attendaient à sa colère, mais étrangement la vision de ces deux hommes l’apaisa. Il se dirigea vers eux d’un pas ferme.
    –  Vous tombez à point nommé, se contenta-t-il de dire. Suivez-moi !
    Et sans un regard pour sa jolie épouse que cette diversion lui permettait d’abandonner, il sortit de la pièce et dirigea son pas vers son cabinet, son prévôt et Béryl sur ses talons.
    –  Il faudra plusieurs semaines pour remettre la charpente en état, ensuite nous nous occuperons des murs abîmés et des réparations intérieures, conclut Béryl qui venait d’exposer dans le détail les dégâts du château.
    –  N’oublions pas que de nombreuses routes sont coupées et qu’il va falloir porter secours à tous. Même en activant les meilleurs maîtres d’œuvre, charpentiers, maçons, couvreurs, menuisiers, j’ai peur que cela ne suffise pas pour respecter les délais que l’hiver nous impose.
    Le seigneur de Vollore hocha la tête. Tout cela l’ennuyait, mais il n’avait d’autre solution que de se ranger aux côtés des deux hommes dont, depuis quinze années, il ne pouvait que se louer des services.
    Puisque seuls Montguerlhe et l’abbaye du Moutier avaient été épargnés par la tempête, il fallait regrouper les malheureux dans ces endroits. Mais il répugnait à partager son habitat avec la populace. Il se tourna vers Huc :
    –  Qu’en est-il de Thiers ? demanda-t-il.
    –  La basilique semble en assez bon état, de même que l’église Saint-Jehan-du-Passet et Saint-Genès, au dire de nos messagers.
    –  Bien,

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