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La chance du diable

La chance du diable

Titel: La chance du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ian Kershaw
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dans les rangs de la garde. Pour rendre la scène encore plus macabre, les chauffeurs des véhicules stationnés dans la cour avaient reçu l’ordre de braquer leurs phares sur le petit tas de sable près de l’encadrement de porte par lequel sortirent Stauffenberg et ses complices. Sans Cérémonie, Olbricht fut placé sur le tas de sable et aussitôt abattu. Le suivant était Stauffenberg. À l’instant où le peloton d’exécution ouvrit le feu, Haeften se jeta devant lui et mourut le premier. Son geste ne devait servir à rien. Stauffenberg fut aussitôt placé contre le tas de sable. Alors que les coups de feu claquaient, on l’entendit s’écrier : « Longue vie à la sainte Allemagne ! » Quelques secondes plus tard, ce fut au tour du dernier des quatre, Mertz von Quirnheim. Entre-temps, Fromm avait fait envoyer un télégramme pour annoncer que le coup d’État avait été écrasé dans le sang et que ses chefs de file avaient été passés par les armes. Puis il adressa un discours véhément aux hommes rassemblés dans la cour, attribuant le miraculeux salut de Hitler à l’œuvre de la Providence et conclu par un triple Sieg Heil au Führer.
    Alors qu’un camion emportait les corps des officiers exécutés, et la dépouille de Beck, que l’on avait trainée dans la cour, pour les porter en terre le lendemain, Himmel les fit exhumer pour les incinérer, les derniers conjurés du Bendlerblock (dont von der Schulenburg, Yorck von Wartenburg et le frère ainé de Stauffenberg, Berthold) furent à leur tour arrêtés. Il était autour de minuit un quart. La dernière tentative pour renverser de l’intérieur Hitler et son régime avait pris fin.
     
    Quelques heures plus tôt, en cette journée du 20 juillet 1944 riche en événements, Hitler, qui venait de regagner son bunker à la suite de l’explosion, avait refusé d’annuler la visite du Duce, prévue pour 14 h 30, mais reculée d’une demi-heure en raison du retard pris par le train de Mussolini. Ce devait être la dix-septième et dernière entrevue entre les deux dictateurs. Ce fut certainement la plus étrange. Il était difficile d’imaginer que Hitler, apparemment calme, venait d’échapper à un attentat. Il salua Mussolini de la main gauche, parce qu’il avait du mal à lever son bras droit blessé. Il raconta au Duce consterné ce qui venait de se passer, puis il l’entraîna jusqu’aux ruines. Dans une scène macabre, au milieu des décombres, juste accompagné de son interprète, Paul Schmidt, Hitler expliqua à son collègue dictateur où il se trouvait, accoudé à la table en train d’étudier la carte, quand la bombe était partie. Il lui montra ses cheveux roussis à l’arrière de son crâne. Hitler s’assit sur une caisse renversée. Schmidt trouva parmi les débris un tabouret encore utilisable pour Mussolini. Pendant quelques instants, aucun des deux dictateurs ne dit le moindre mot. Puis Hitler reprit d’une voix posée   : « Quand je repasse tout cela dans ma tête, [...] je conclus de mon salut miraculeux, quand d’autres personnes présentes ont été grièvement blessées, [...] qu’il ne va jamais rien m’arriver.   » Il était plus que jamais convaincu, s’empressa-t-il d’ajouter, qu’il lui était donné de conduire leur cause commune jusqu’à son issue victorieuse.
    On retrouve le même thème de la Providence qui l’avait sauvé dans son discours, retransmis par toutes les radios, peu après minuit. Il s’était enquis, en milieu d’après-midi, des possibilités d’organiser un discours radiodiffusé. La première heure, lui avait-on répondu, était 18 heures. C’était irréaliste. Il lui fallait encore écrire son discours, et l’après- midi était occupé par la visite de Mussolini. Les dispositions durent être prises pour que le discours fût enregistré et retransmis sur toutes les radios. Il fallut faire venir le matériel de retransmission par la route depuis Königsberg, à quelque soixante-quinze kilomètres de là. Mais l’équipe technique n’était pas disponible   ; elle était partie nager dans la Baltique. Il est aussi possible que les diversions de la journée aient fait perdre à Hitler son intérêt pour la chose. Quoi qu’il en soit, il semble avoir une fois de plus réagi aux invites de Gœbbels, qui s’employa à le convaincre de la nécessité d’adresser un bref discours aux Allemands. Il était minuit largement passé lorsque son intervention fut

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