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La chance du diable

La chance du diable

Titel: La chance du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ian Kershaw
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pu croire un moment que d’autres exécutions suivraient celle des chefs de file du coup d’État (ainsi que le suicide assisté de Beck). Mais l’arrivée, peu après minuit, d’une unité de SS commandée par le Sturmbannführer Otto Skorzeny, dépêché sur les lieux du soulèvement par Walter Schellenberg, patron des renseignements étrangers de la Sûreté, ainsi que l’apparition du chef de la Sûreté, Ernst Kaltenbrunner, et du commandant Otto Ernst Remer, tout juste nommé commandant du bataillon des gardes de Berlin et largement responsable de l’écrasement du coup d’État, avaient interrompu les exécutions sommaires et mis fin à la sédition. Entretemps, Himmler avait pris l’avion pour Berlin et, en sa nouvelle qualité temporaire de commandant en chef de l’armée de réserve, avait donné l’ordre qu’aucune autre action indépendante ne fût entreprise contre les officiers soupçonnés.
    Peu après 4 heures du matin, Bormann put informer les chefs provinciaux du parti, les Gauleiter, que le putsch était terminé. À cette heure, toutes les personnes arrêtées dans la Bendlerstrasse avaient été emmenées en attendant de connaître leur destin, dont le frère aîné de Stauffenberg, Berthold   ; l’ancien fonctionnaire et vice-président de la police de Berlin, Fritz-Dietlof von der Schulenburg   ; Peter Graf Yorck von Wartenburg, membre en vue du « cercle de Kreisau   » ; le pasteur protestant Eugen Gerstenmaier   ; ainsi que le propriétaire foncier et officier de l’Abwehr, Ulrich Wilhelm Graf Schwerin von Schwanenfeld. L’ancien général de corps d’armée Erich Hœpner, arrêté par Fromm mais non exécuté, et le feld-maréchal Erwin von Witzleben, qui avait quitté la Bendlerstrasse avant l’effondrement du coup d’État, furent aussi promptement jetés en prison en même temps que diverses autres personnes impliquées. Le ministre prussien des Finances, Popitz   ; l’ancien ministre de l’Économie, Schacht   ; l’ancien chef d’état-major, le général de corps d’armée Haider   ; le général de division Stieff et, de l’Abwehr, l’amiral Canaris et le général de division Oster furent eux aussi arrêtés dans les meilleurs délais. Le commandant Hans Ulrich von Oertzen, l’officier de liaison pour le district de défense de Berlin, qui avait donné les premiers ordres de l’opération « Walkyrie   », se donna la mort avec une grenade à main. Henning von Tresckow, le premier inspirateur des tentatives d’assassinat contre Hitler, se tua de la même façon sur le front polonais, près d’Ostrow. Le général Wagner se suicida. Le général Fellgiebel refusa de le faire. « On tient tête, on ne fait pas cela   », dit-il à son ordonnance. Sachant qu’il allait être arrêté d’une minute à l’autre, il passa une bonne partie de l’après-midi à la « Tanière du Loup   » et alla même jusqu’à féliciter Hitler d’en avoir réchappé, puis attendit son inévitable destin.
    Ceux qui tombèrent dans les griffes de la Gestapo devaient s’attendre à de redoutables tortures. Ils les subirent pour la plupart avec l’idéalisme, voire l’héroïsme, qui les avait animés tout au long de leur périlleuse opposition. Dans les premiers stades de l’enquête, la Gestapo obtint étonnamment peu d’informations, en dehors de ce qu’elle savait déjà, des victimes de ses sévices. Malgré tout, à mesure que la « commission spéciale pour le 20 juillet   », mise en place le lendemain du coup manqué sous l’autorité du SS-Obersturmbannführer Georg Kiessel, et qui devait bientôt compter quatre cents officiers, élargit son enquête, le nombre des personnes arrêtées s’accrut rapidement. Kiessel put bientôt faire état de six cents personnes emprisonnées. Presque tous les chefs de file des diverses branches de la conjuration furent arrêtés rapidement même si Gœrdeler demeura caché jusqu’au 12 août. Tous les jours, Hitler recevait le nom des personnes impliquées. Il s’était trompé au départ en croyant que seule une « minuscule clique   » d’officiers s’étaient opposés à lui. Les ramifications du complot allaient beaucoup plus loin qu’il n’avait pu l’imaginer. Il fut particulièrement en colère en découvrant que même Graf Helldorf, le président de la police de Berlin, « ancien combattant   » du mouvement nazi et autrefois chef SA, avait été profondément impliqué. Tandis que la

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