La chance du diable
jouer un rôle dominant. Ils doivent être subordonnés à des processus ordonnés : châtiment des criminels et réparations par coopération. La Pologne peut recevoir un substitut de la Prusse occidentale et de la Posnanie à travers une union fédéraleavec la Lituanie. Cela profiterait aux deux peuples, et la Pologne disposerait ainsi d’un accès à la mer. Une pareille union a de fait existé dans les siècles passés ; elle a volé en éclats sur des questions dynastiques. De telles tensions n’existent plus aujourd’hui, ou elles sont surmontables. De plus, la possibilité existe de garantir les relations avec le commerce et le trafic mondiaux à travers les ports allemands. À l’avenir, les relations de ce genre ne se limiteront plus à des arrangements militaires. Car de l’instauration d’une paix durable dépend la survie de tous les peuples d’Europe ou leur disparition.
Aussi faut-il espérer que progressivement, dans le sillage de ces expériences terribles et douloureuses, la relation entre l’Allemagne et la Pologne trouve une solution. En tout état de cause, nous serons prêts à apporter toute l’aide possible à la Pologne aujourd’hui, pour panser ses blessures, et à l’avenir.
La réparation des dégâts infligés aux Européens et aux autres peuples est impensable. Dès avant la guerre actuelle, Hitler avait contracté d’énormes dettes au nom de l’Allemagne. L’admiration que d’autres peuples ont vouée à Hitler dans ce domaine d’activités a été fatale au peuple allemand. L’Allemagne partage avec le monde entier l’immense fardeau des dettes de cette malheureuse guerre. Mais les destructions causées par cette guerre sont déjà plus amples en Allemagne qu’en aucune autre partie de l’Europe. Il est donc physiquement impossible à l’Allemagne d’engager la reconstruction dans d’autres pays, parallèlement à la reconstruction intérieure, qui demandera plusieurs générations.
Nous suggérons donc un projet dans l’intérêt tant de la détente émotionnelle que de l’aide tangible à l’Europe : une communauté européenne chargée de la reconstruction, à laquelle chaque État européen participerait au prorata de ses ressources.
Nous n’avons rienà dire sur les conflits d’intérêts entre l’Angleterre et la Russie : ils existent. Au XIX e siècle, ils ont été neutralisés à la faveur de l’équilibre des puissances en Europe. Malgré cet équilibre, il y a eu des conflits armés : la guerre de Crimée, par exemple. En 1918, l’Angleterre pouvait accepter à la légère l’humiliation de l’Allemagne, parce que la puissance russe semblait avoir été éliminée durablement. Aujourd’hui, cependant, on ne saurait douter de la récupération de la Russie. Certes, la Russie est elle aussi gravement affaiblie par cette guerre. Mais, étant proche de la nature, le peuple russe compense ces pertes plus rapidement que ne le peuvent les peuples européens plus délicats.
Pour l’heure, la Russie est gouvernée par un système uniformément bolcheviste. Même les Russes ne peuvent fermer les yeux sur le fait que le bolchevisme tue toute aspiration et toute initiative chez l’homme. Aussi ont-ils de plus en plus dilué le communisme. Mais cela arrive après que le peuple a eu le temps de faire l’expérience amère du système sous le communisme. Si la Russie actuelle assied sa suprématie sur l’Europe, les peuples d’Europe centrale et d’Europe de l’Ouest, affaiblis par la guerre, mus par les émotions, confrontés à des tâches presque insurmontables, seront la proie du communisme radical. Ce serait la mort de la culture européenne et de l’Europe elle-même comme entité. Ce serait aussi un grand danger pour l’Angleterre. Mais la Russie sera plus dangereuse encore si elle retrouve progressivement le chemin des vraies lois de l’économie et de l’art de gouverner. Car alors sa puissance ne cessera de croître. La Russie est l’unique pays sur terre quipuisse menacer l’Empire britannique sans grande flotte. Il appartient bien entendu à l’Angleterre d’examiner cette situation et d’en tirer la conclusion qui s’impose à ses yeux dans son intérêt. Nous ne pouvons que donner notre opinion : que tous les peuples européens à l’ouest de la Russie doivent se protéger contre la suprématie et l’hégémonie russes.
Ni la France, ni l’Italie ni une union de petits peuples ne sauraient
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