La chapelle du Diable
Julianna se dit que cela serait bienvenu. Dans l’intimité, ce moyen de
contraception naturel lui permettait de se laisser aller un peu plus.
François-Xavier admira son épouse. Qu’elle était belle ! Il exhala une longue
bouffée dans sa direction. Cela chasserait un peu les insectes. Ses pensées
dévièrent encore vers sa future fromagerie. Il y avait un an que monsieur Morin
lui avait offert son soutien financier. Le projet allait bon train. Après
presque deux ans de fiançailles, Léonie et Albert avaient enfin annoncé la date
de leur mariage. L’été prochain, le 21 avril 1937, le couple de Montréal
convolerait en voyage de noces. François-Xavier sourit. Cela coïnciderait
probablement avec la mise en chantier de la fromagerie. Avec l’argent accumulé
jusqu’ici, il avait pu verser un dépôt sur le terrain. Il voulait se le
réserver. Il avait trouvé l’emplacement idéal. Ce n’était pas très loin de la
ferme et il pourrait continuer à travailler pour monsieur Dallaire. Cet hiver,
il retournerait chez les trappistes faire de la glace. Il accumulerait ainsi la
moitié convenue. Il ne manquerait plus que la part de monsieur Morin. Enfin, il
commençait à croire à sa bonne étoile.
Julianna se tourna vers lui. D’un geste langoureux, elle remonta ses cheveux
sur sa nuque. Ce mouvement alluma le désir en lui. Si cela n’avait été des
enfants, il l’aurait prise dans ses bras et l’aurait emmenée sur-le-champ dans
leur lit. Il aurait pris son temps pour la déshabiller. Il l’aurait voulu
gémissante et abandonnée. Il aimait tant la voir hocher la tête de gauche à
droite, les yeux fermés, gémissant tout doucement, chavirée de plaisir. Chaque
fois qu’il l’aurait sentie proche de la jouissance, il aurait changé de caresse.
Il serait devenu bourreau et lui aurait offert le plus doux des supplices. À la
fin, il l’aurait soulevée et l’aurait assise sur lui, lui faisant enfourcher son
membre en un seul coup. Il lui aurait tenu les hanches et se serait maintenu
ainsi au plus profond d’elle quelques secondes sans bouger, avant de lui
permettre de le chevaucher sauvagement. Il aurait été encore plus excité en
voyant ses seins bouger au rythme dugalop sensuel. Il n’aurait
pas résisté. Il se serait redressé à moitié et en aurait pris un dans sa bouche,
ses mains empoignant les fesses et…
— À quoi tu rêves encore, François-Xavier Rousseau ?
Julianna regarda son mari d’un air moqueur. Son mari se racla la gorge d’une
drôle de manière. Il mentit.
— Je… je pensais à ma fromagerie…
— Ah oui ? fit Julianna.
Nonchalamment, elle se leva et vint se pencher devant son mari.
— Y a que ça dans ta tête… Tu me vois même pus… À croire que j’existe pus pour
toi ! lui reprocha-t-elle gentiment en le taquinant d’un baiser furtif sur la
joue. Je me mettrais toute nue, là devant toi, pis tu t’en apercevrais même pas…
lui chuchota-t-elle à l’oreille.
François-Xavier se dit que témoins ou pas, il allait la basculer, là, dehors,
et la prendre tout de suite.
Julianna s’assura de tourner le dos aux enfants et de la main se mit à caresser
le torse de son mari, descendant de plus en plus bas jusqu’à recouvrir la bosse
proéminente entre les jambes de François-Xavier.
— Pis c’est en pensant à ta fromagerie que tu t’es mis dans cet état-là ?
fit-elle avec un petit gloussement.
François-Xavier avait l’esprit si embrouillé de désir qu’il prit un instant
pour comprendre que son épouse n’avait pas cru un instant à son mensonge.
Julianna enleva sa main et abandonna son mari à sa frustration. Elle avait hâte
à plus tard… Hum… Cette attente était délicieuse et troublante…
— Pis je suppose, reprit-elle, qu’avec tout ça, t’as oublié l’arrivée de Henry
demain ?
— Henry, répéta François-Xavier encore étourdi d’émotions.
— On l’a pas vu depuis la fête de marraine l’été dernier.
— Ah oui, c’est vrai ! Je… j’avais pas oublié…
— T’es vraiment un mauvais menteur, François-Xavier Rousseau,l’agaça Julianna, persuadée qu’au contraire, son mari était loin de se
souvenir que l’avocat venait séjourner à Saint-Ambroise. Pis si je couchais les
enfants pis que je te disais que je m’endors de ben de bonne heure à soir, tu me
dirais que t’as pas envie de
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