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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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s’étaient blottis les uns contre les autres. Pierre qui séjournait chez son
     parrain, s’était retrouvé coincé entre Delphis et Samuel. Dans leur sommeil, ses
     cousins s’étaient recroquevillés contre lui. Dans le lit voisin, Augustin et les
     jumeaux ronflaient doucement. Dans la chambre d’à côté, Sophie tenait sa
     demi-sœur Antoinette étroitement enlacée entre ses bras. Inconfortable etayant un peu mal à la gorge, Pierre était le seul des enfants à
     ne pas dormir. Les yeux ouverts, il écoutait le bruit des voix qui montait du
     salon. Son oncle Georges et ses cousins Elzéar et Jean-Marie y discutaient. Il
     avait eu connaissance que sa tante Rolande avait souhaité une bonne nuit aux
     hommes avant de se retirer dans sa chambre du rez-de-chaussée prendre soin de
     bébé Hélène. Pierre avait entendu les pleurs de la petite qui s’étaient
     rapidement tus.
    Pierre était déçu... À cause du froid, ils n’avaient pu jouer au hockey. En
     plus, sa gorge le faisait de plus en plus souffrir. Il tendit l’oreille. Son
     cousin Jean-Marie haussait le ton et s’obstinait avec son père comme
     d’habitude.
    — J’vous l’dis, son père, l’avenir est dans les patates ! Écoutez-moé pour une
     fois ! Avec le sol sablonneux de la terre, y faudrait faire pousser rien que
     ça...
    — Bateau, j’haïs les patates ! J’ai ben assez de misère avec mes dix rangs.
     Demande à Elzéar, on perdrait toute notre argent rien que pour les bebittes à
     patate.
    Elzéar approuva en bâillant. Lui et l’agriculture... Il était bien content que
     son frère aîné soit revenu. Son père lui faisait peser lourd sur les épaules
     qu’un jour la ferme lui reviendrait. Maintenant, au moins, il serait libre de
     partir à l’aventure lui aussi. Il devait remonter aux chantiers dès le lendemain
     si la température le permettait. Cependant, il n’avait guère aimé l’expérience
     et avait été déçu. La vie de camp de bûcherons n’était pas pour lui. Il avait
     espéré que ces grands espaces lui offriraient une sensation de liberté mais au
     contraire, il se sentait encore plus piégé là-bas que sur la ferme. Tout autour
     ce n’était que d’immenses forêts. Qu’il se tourne à gauche, à droite, il savait
     que toute civilisation était à des milles de là. Il s’était rendu compte qu’il y
     étouffait. Il avait l’impression que les arbres se refermaient sur lui, lui
     barraient le passage. Ce dont Elzéar rêvait, c’était pouvoir aller où ses pas le
     mèneraient…
    Jean-Marie, enflammé par son idée, essaya de convaincre son père.
    — Son père, chus certain d’avoir raison. Vous pourriez avoir
     une belle compagnie si vous vous lanciez dans les patates à grande
     échelle.
    — C’est pas parce que t’as vu un peu de pays qu’y faut que tu te penses un
     grand Joe connaissant ! T’as jamais eu raison sur quoi que ce soit, j’vois pas
     pourquoi tu commencerais.
    — On sait ben, je fais jamais rien de correct pour vous, son père... Mais
     prenez le temps de m’écouter comme y faut.
    Ti-Georges avait beau essayer de faire taire la jalousie ressentie envers son
     fils, il n’y avait rien à faire. C’était plus fort que lui. Il avait besoin de
     rabaisser son fils… Il aurait voulu être parfait, ne pas ressembler à son propre
     père. Cette recherche de perfection ne lui laissait guère de latitude et le
     rendait intransigeant.
    — Pis tes poches de patates, à qui c’est qu’on vendrait ça ?
    — C’est là qu’y faut être prêts, son père. Vous vous en rendez peut-être moins
     compte par icitte, mais la guerre est à nos portes !
    — La guerre ? fit Elzéar, intéressé par ce sujet-là.
    — Partout on parle rien que de ça, affirma Jean-Marie.
    — Une autre guerre... marmonna pensivement Ti-Georges.
    — En tout cas, moé je m’engage tout de suite si y a une guerre, déclara
     Elzéar.
    — Guerre ou pas, les patates, c’est des idées de fou ! décréta le père.
    — Vous ferez ben ce que vous voudrez. De toute façon, vous savez que je reste
     pas par icitte… dit Jean-Marie.
    — Quoi, tu vas repartir ? demanda Elzéar.
    Plusieurs coups frappés à la porte vinrent les déranger.
    — Bon, qui c’est qui peut ben se pointer si tard avec c’te frette-là en plus ?
     maugréa Ti-Georges en demandant à Jean-Marie d’aller répondre.
    L’aîné des fils revint avertir son père qu’il avait

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