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La chevauchée vers l'empire

La chevauchée vers l'empire

Titel: La chevauchée vers l'empire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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Gengis
lutta pour se dominer.
    — Il semble que je sois un homme difficile à tuer, dit-il
d’un ton mesuré. Tu es le bienvenu dans mon camp, Djötchi.
    Le jeune homme demeura immobile car lui accorder l’hospitalité
par cette formule, comme à un guerrier quelconque, équivalait à une pointe
subtile. Gengis n’avait pas adressé les mêmes mots à Süböteï ni à Khasar :
ils étaient inutiles.
    — Tu me fais grand honneur, seigneur khan, répondit Djötchi,
s’inclinant pour que son père ne puisse lire la fureur dans ses yeux.
    Gengis hocha la tête, regarda le jeune homme prendre
doucement les mains de sa mère dans les siennes et s’incliner de nouveau, le
visage pâle et tendu. Les yeux de Börte s’emplirent de larmes de joie mais elle
montrait envers Djötchi plus de retenue qu’avec Ögödei : dans un tel
climat, elle n’osait pas serrer contre elle son fils aîné. Avant que Gengis
puisse reprendre la parole, Djötchi se tourna vers son frère cadet et toute
raideur le quitta instantanément.
    — Je te vois, petit homme.
    Avec un sourire radieux, Ögödei s’avança, frappa par jeu son
frère à l’épaule et se lança dans un bref assaut de lutte qu’il termina la tête
au creux du bras de Djötchi. Agacé, Gengis eut envie de les interrompre par des
mots qui perceraient la façade désinvolte de Djötchi. Mais celui-ci s’éloignait
déjà en emmenant son frère, auquel il frictionnait le crâne de son poing malgré
ses protestations. Le khan, qui n’avait pas vraiment autorisé Djötchi à prendre
congé, ouvrit la bouche pour le rappeler.
    — Ton fils a bien appris, seigneur, lui dit Süböteï
avant qu’il puisse le faire. Il a commandé un tuman contre les guerriers de
Russie et ses hommes le respectent.
    — Ne l’as-tu pas promu trop vite ? répliqua Gengis
d’un ton renfrogné, conscient que la situation lui échappait.
    Un homme plus faible aurait peut-être acquiescé, mais Süböteï
secoua aussitôt la tête, loyal envers le jeune homme qu’il avait soutenu
pendant trois ans.
    — Il a rapidement compris ce que commander signifie :
que chaque homme se tourne vers toi seul pour puiser de la force. Mon poète a
écrit de nombreux vers sur Djötchi et les hommes parlent en bien du fils du
khan. Il sait commander : je ne trouve pas de plus grand éloge.
    Gengis se tourna vers l’endroit où Djötchi riait avec Ögödei.
Ensemble, ils paraissaient plus jeunes, ils ressemblaient davantage aux gamins
qui avaient grandi dans sa yourte. Il eut un hochement de tête réticent mais, lorsqu’il
reprit la parole, les espoirs de Süböteï retombèrent.
    — Les vieilles rancœurs peuvent resurgir à tout moment,
général. Dans une charge, il pourrait faire demi-tour. Veille à ne pas risquer
ta vie sur cet homme-là.
    Bien qu’il ne pût contredire le khan sans l’offenser, Süböteï
mourait d’envie de s’élever contre ce jugement injuste. Son dilemme demeura
intérieur et il baissa la tête.
    — Jelme et Djaghataï ne sont qu’à trois jours de cheval,
poursuivit Gengis, dont le visage s’éclaira. Tu verras alors un de mes fils et
tu sauras pourquoi je suis fier de lui. Nous éclairerons la terre de nos lampes,
nous boirons et mangerons tellement que les guerriers en parleront pendant des
années.
    — À tes ordres, seigneur, répondit Süböteï, cachant sa
détresse.
    Pendant trois ans, il avait vu Djötchi devenir un chef
remarquable, capable de mener une armée entière. Il n’avait trouvé aucune
faiblesse en lui et il se savait bon juge en hommes. Il compatissait à la
souffrance que le fils du khan devait ressentir. Qu’y avait-il de pire qu’être
rejeté par son père ? Si Djötchi était estimé de tous les généraux mais
méprisé par Gengis, il ne sentirait que ce mépris.
    Tandis que le khan s’éloignait avec Khasar et Kachium, Süböteï
secoua de nouveau la tête, reprit son masque impassible et rejoignit les autres
pour préparer le festin. Jelme et Djaghataï arrivaient, mais Süböteï n’était
pas pressé d’entendre Gengis louer son deuxième fils aux dépens du premier.

 
4
    Quelque chose tira brusquement Jelme d’un profond sommeil. Dans
l’obscurité totale de la yourte dont le trou d’évacuation de fumée était fermé,
il se redressa, tendit l’oreille. La femme jin étendue à côté de lui remua et
il tendit le bras pour lui plaquer une main sur la bouche.
    — Silence, murmura-t-il.
    Il connaissait tous les

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