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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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Eton
et c’était un ami de Maud, un de ceux avec qui elle échangeait volontiers des
ragots. Fitz répugnait à agir dans le dos de ses supérieurs, mais le sort de
Paris était tellement incertain qu’il s’y était senti obligé. Décidément, le
patriotisme n’était pas simple.
    Son intervention avait eu des
conséquences explosives. Asquith, le Premier ministre, avait aussitôt envoyé à
Paris Lord Kitchener, son nouveau ministre de la Guerre, et Sir John
s’était fait rappeler à l’ordre par son patron pas plus tard que l’avant-veille.
Fitz espérait ardemment qu’on le remplacerait rapidement. Ou, au moins, qu’il
sortirait enfin de sa léthargie.
    Il ne tarderait pas à en avoir le
cœur net.
    Il s’écarta de Gini et s’assit au
bord du lit.
    « Tu t’en vas ? »
demanda-t-elle.
    Il se leva. « J’ai du
travail. »
    Elle repoussa les draps. Fitz
contempla ses seins parfaits. Saisissant son regard, elle sourit à travers ses
larmes et écarta les jambes d’un air engageant.
    Il résista à la tentation. « Fais
un peu de café, chérie. »
    Elle enfila une nuisette de soie
vert pâle et fit chauffer de l’eau pendant qu’il s’habillait. La veille au
soir, il avait dîné en uniforme à l’ambassade britannique, puis s’était
débarrassé de sa tunique écarlate trop voyante pour aller s’encanailler en
smoking.
    Elle lui servit un bol de café
noir. « Je t’attendrai ce soir chez Albert », lui dit-elle. Les
boîtes de nuit étaient officiellement fermées, ainsi que les théâtres et les
salles de cinéma. Les Folies-Bergère elles-mêmes avaient baissé le rideau. Les
cafés fermaient à huit heures du soir et les restaurants à neuf heures et
demie. Mais il n’était pas facile d’interrompre la vie nocturne d’une grande
ville et des hommes astucieux du genre d’Albert avaient eu vite fait d’ouvrir
des établissements clandestins, où ils vendaient du Champagne à des prix
prohibitifs.
    « Je tâcherai d’être là à
minuit », fit-il. Le café était amer mais acheva de le réveiller. Il donna
à Gini un souverain britannique en or. C’était très généreux pour une nuit
d’amour et, en ces temps difficiles, tout le monde préférait l’or au
papier-monnaie.
    Quand il l’embrassa pour lui dire
au revoir, elle s’accrocha à lui. « Tu reviendras cette nuit, n’est-ce
pas ?»
    Il avait de la peine pour elle. Son
univers s’effondrait et elle était désemparée. Il aurait bien aimé la prendre
sous son aile, s’engager à veiller sur elle, mais c’était impossible. Son
épouse était enceinte et risquait de faire une fausse couche à la moindre
contrariété. Même s’il avait été célibataire, il aurait été la risée de ses
camarades en s’encombrant d’une poule française. De plus, la situation de Gini
n’avait rien d’exceptionnel : ils étaient des millions à craindre pour
leur sort. Seuls les morts n’avaient plus de souci. « Je ferai de mon
mieux », dit-il en s’arrachant à son étreinte.
    Sa Cadillac bleue était garée
devant l’immeuble, un petit Union Jack fixé au capot. Dans les rues, les
voitures particulières se comptaient sur les doigts de la main et la plupart
arboraient un pavillon similaire, le plus souvent le drapeau tricolore ou celui
de la Croix-Rouge, afin de montrer qu’elles étaient essentielles à l’effort de
guerre.
    Pour faire venir sa voiture
depuis Londres, Fitz avait fait appel à toutes ses relations et dépensé une petite
fortune en pots-de-vin, mais il se félicitait d’avoir pris cette peine. Il
effectuait des allées et venues quotidiennes entre les QG anglais et français,
et cela le dispensait de mendier le prêt d’un véhicule ou d’un cheval auprès
des autorités militaires.
    Il actionna le démarreur
électrique et le moteur rugit. Les rues étaient quasiment désertes. On avait
réquisitionné jusqu’aux autobus pour ravitailler les troupes au front. Il dut
faire halte pour laisser passer un immense troupeau de moutons, que l’on
acheminait probablement vers la gare de l’Est pour aller nourrir les soldats.
    Comme il arrivait devant le
palais Bourbon, il fut intrigué par un attroupement autour d’une affiche
fraîchement collée au mur. Il se gara, rejoignit les badauds et put lire :
     
    Armée de Paris,
    Habitants de Paris…
     
    Le regard de Fitz se porta
immédiatement en bas du feuillet et il vit que la proclamation était signée du
général Gallieni,

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