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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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demande pardon, mon général… des renforts ?
    — Je suis aussi surpris que
vous. Trois corps d’armée et une division de cavalerie.
    — D’où viennent-ils ?
    — De France – où nous
avons besoin de concentrer toutes nos forces si nous voulons que le plan
Schlieffen produise ses effets. »
    Walter se rappela que Ludendorff
avait participé à l’élaboration de ce plan, avec son énergie et sa méticulosité
habituelles, et qu’il savait très précisément de combien d’hommes, de chevaux
et de balles on avait besoin en France. « Mais pourquoi ?
demanda-t-il.
    — Je l’ignore, mais je peux
le deviner, répliqua Ludendorff d’un ton amer. C’est une raison politique. Les
princesses et les comtesses berlinoises sont allées pleurnicher auprès de l’impératrice
pour qu’on empêche les Russes de s’emparer de leurs domaines familiaux. Le haut
commandement a cédé à cette pression. »
    Walter rougit. Sa propre mère
faisait partie de celles qui étaient allées harceler l’impératrice. Que des
femmes s’inquiètent et réclament une protection, c’était compréhensible, mais
que l’armée s’incline devant leurs suppliques, au risque de compromettre la
stratégie d’ensemble, c’était impardonnable. « N’est-ce pas exactement ce
que souhaitent les Alliés ? s’indigna-t-il. Les Français ont persuadé les
Russes de nous envahir avec une armée de bric et de broc, dans l’espoir de nous
voir paniquer et envoyer des renforts sur le front est, affaiblissant du même
coup notre armée en France !
    — Exactement. Les Français
sont en pleine déroute – nous leur sommes supérieurs en nombre et en
armes. Ils sont battus. Leur seul espoir était de nous occuper ailleurs. Et
leur vœu vient d’être exaucé.
    — Donc, conclut un Walter
désespéré, malgré la grande victoire que nous avons remportée à l’est, les
Russes ont obtenu l’avantage stratégique dont leurs alliés avaient besoin à l’ouest !
    — Oui, fit Ludendorff.
Exactement. »

XIII.
Septembre-décembre 1914
    1.
    Fitz fut réveillé par des pleurs
de femme.
    Il crut d’abord que c’était Bea.
Puis il se souvint que son épouse se trouvait à Londres, et lui à Paris. La
femme couchée à ses côtés n’était pas une princesse enceinte de vingt-trois ans
mais une entraîneuse française de dix-neuf ans au visage d’ange.
    Il se redressa sur son coude et
la regarda. Ses cils blonds se posaient sur ses joues comme des papillons sur
des pétales de fleur. Ils étaient à présent mouillés de larmes. «  J’ai
peur  », sanglota-t-elle.
    Il lui caressa les cheveux.
«  Calme-toi  », dit-il. Il avait fait plus de progrès en
français en fréquentant des femmes comme Gini qu’à l’école. Gini était le
diminutif de Geneviève, un prénom qu’il trouvait trop chic pour elle. Sans
doute s’appelait-elle tout bêtement Françoise, ou quelque chose d’aussi
ordinaire.
    La matinée était belle et une
brise tiède entrait par la fenêtre ouverte de la chambre de Gini. Fitz
n’entendait ni coups de feu ni bruits de bottes sur les pavés. « Paris
n’est pas encore tombée », murmura-t-il d’une voix rassurante.
    Ce n’était pas la chose à dire,
car Gini se mit à sangloter de plus belle.
    Fitz consulta sa montre-bracelet.
Huit heures et demie. Il devait être à son hôtel à dix heures sans faute.
    « Si les Allemands arrivent,
tu t’occuperas de moi ? demanda Gini.
    — Bien sûr, chérie  »,
dit-il en refoulant un sentiment de honte. Il le ferait s’il le pouvait, mais
ce ne serait pas sa priorité.
    « Est-ce qu’ils viendront
jusqu’ici ? » insista-t-elle d’une petite voix.
    Fitz aurait bien aimé le savoir.
L’armée allemande était deux fois plus importante que ne l’avaient prévu les
spécialistes français du renseignement. Elle avait déferlé sur le nord-est de
la France, remportant toutes les batailles. La ligne de front se trouvait à
présent au nord de Paris – à quelle distance précisément, Fitz
l’apprendrait dans moins de deux heures.
    « Certains disent qu’on ne
défendra pas la ville, sanglota Gini. C’est vrai ? »
    Fitz l’ignorait également. Si
Paris résistait, l’artillerie allemande la pilonnerait. Ses splendides
monuments seraient détruits, ses larges boulevards criblés de cratères, ses
bistrots et ses boutiques transformés en ruines. Il était tentant de répondre
que la ville devait se rendre pour échapper à

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