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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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acquiesça. Le gouvernement
du prince Lvov avait annoncé qu’ils poursuivraient les combats. Il n’était pas
question pour l’Allemagne de dégarnir son front est ni d’envoyer des renforts
en France. La guerre continuait.
    « Il ne reste plus qu’à
espérer que le gouvernement Lvov tombera et que les partisans de la paix
prendront le pouvoir, ajouta-t-il.
    — C’est possible ?
    — Difficile à dire. Les
révolutionnaires de gauche continuent à réclamer du pain, la paix et des
terres. Le gouvernement a promis de faire élire démocratiquement une assemblée
constituante, mais qui va gagner ? »
    Il ramassa un bâton qu’il jeta au
chien. Pierre bondit et le rapporta fièrement. Walter se baissa pour lui
caresser la tête. Quand il se redressa, Monika était tout près de lui.
    « Je vous aime bien, Walter,
dit-elle en le regardant droit dans les yeux. J’ai l’impression que nous ne
manquerons jamais de sujets de conversation. »
    Il partageait ce sentiment et il
savait que s’il essayait de l’embrasser, là, tout de suite, elle ne lui
résisterait pas.
    Il s’écarta.
    « Moi aussi, je vous aime
bien. Votre chien aussi, je l’aime bien. »
    Il rit pour lui faire comprendre
qu’il plaisantait.
    Mais il voyait bien qu’elle était
blessée. Elle se mordit la lèvre et se détourna. Elle s’était montrée aussi
hardie que pouvait l’être une jeune fille bien élevée et il l’avait repoussée.
    Ils reprirent leur promenade.
Après un long silence, Monika demanda :
    « Quel est votre secret ?
Je voudrais bien le savoir. »
    Sapristi, pensa-t-il, elle ne
manque pas de finesse. Il mentit :
    « Je n’ai pas de secret. Et
vous ?
    — Aucun qui vaille la peine. »
Elle leva la main et lui effleura l’épaule comme pour en chasser quelque chose.
« Une abeille.
    — C’est un peu tôt dans la
saison.
    — Nous aurons peut-être un
été précoce.
    — Il ne fait pas tellement
chaud. »
    Elle fit mine de frissonner.
    « Vous avez raison, il fait
frisquet. Vous voulez bien aller me chercher une étole ? Vous n’avez qu’à
aller à la cuisine et demander à une domestique, elle en trouvera une.
    — Volontiers. »
    Il ne faisait pas vraiment froid,
mais un gentleman se devait d’obtempérer, même si la requête paraissait
saugrenue. Elle voulait manifestement rester seule un moment. Il repartit vers
la maison. Il était obligé de repousser ses avances, tout en étant désolé de la
faire souffrir. Ils étaient parfaitement assortis, leurs mères avaient raison,
et, de toute évidence, Monika ne comprenait pas pourquoi il se dérobait.
    Il entra dans la demeure,
descendit au sous-sol par un escalier de service et tomba sur une vieille
servante en robe noire et bonnet de dentelle. Elle partit à la recherche d’un
châle.
    Walter attendit dans l’entrée. Le
décor de la maison était entièrement Jugendstil. À l’opposé des
fioritures baroques qu’affectionnaient ses parents, ce nouveau style très à la
mode privilégiait les pièces lumineuses et les couleurs tendres. Le hall orné
de colonnades était tout en marbre d’un gris apaisant sur un tapis à dominante
beige.
    Il avait la sensation que Maud
était à des milliers de kilomètres, sur une autre planète. C’était vrai en un
sens, car le monde d’avant-guerre n’existerait jamais plus. Il n’avait pas vu
sa femme ni eu de ses nouvelles depuis près de trois ans, et peut-être ne la
reverrait-il jamais. Si elle ne quittait pas ses pensées – comment
oublierait-il la passion qui les avait unis ? – il s’apercevait, à
son grand désarroi, qu’il ne se rappelait plus les menus détails des moments
passés ensemble : la tenue qu’elle portait, le lieu où ils se trouvaient
quand ils s’embrassaient ou se tenaient par la main, ce qu’ils avaient bu,
mangé, et de quoi ils avaient parlé lors de toutes ces réceptions londoniennes
qui se confondaient dans son esprit. Il se disait parfois que la guerre avait
en quelque sorte prononcé leur divorce. Il écartait aussitôt cette idée
affreusement déloyale.
    La domestique lui apporta un
foulard de cachemire jaune. Il retourna auprès de Monika. Elle était assise sur
un tronc d’arbre, Pierre à ses pieds. Walter lui donna le châle, dont elle s’enveloppa.
La couleur lui allait bien. Elle faisait briller ses yeux et rayonner son
teint.
    Elle lui tendit son portefeuille
avec une expression étrange.
    « Il a dû tomber de votre
poche,

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