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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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Peut-être
le Daily Herald. » Le Herald était un journal de gauche. « Tu
veux bien accompagner Lloyd chez sa nounou ?
    — Oui, bien sûr. »
    Ethel réfléchit un instant et
écrivit en haut d’une feuille de papier : « La Russie aux Russes ! »
    2.
    Maud ne put retenir ses larmes en
se promenant dans Paris. Les larges boulevards étaient jonchés de gravats
laissés par les obus allemands. Les fenêtres brisées des grands immeubles
étaient bouchées par des planches et lui rappelaient douloureusement le beau
visage de son frère défiguré par son œil blessé. De grands trous béants
déparaient les vastes avenues là où les vieux chênes et les nobles platanes
avaient été sacrifiés pour leur bois. La moitié des femmes étaient en deuil.
Des invalides de guerre mendiaient aux coins des rues.
    Elle pleurait aussi pour Walter.
Elle n’avait pas reçu de réponse à sa lettre. Elle avait demandé à se rendre en
Allemagne, mais c’était impossible. Elle avait déjà eu beaucoup de mal à
obtenir l’autorisation de venir à Paris. Elle avait espéré que Walter y serait
envoyé avec la délégation allemande, or il n’y avait pas de délégation
allemande : les pays vaincus n’étaient pas invités à la conférence de
paix. Les puissances victorieuses avaient l’intention de se mettre d’accord
entre elles, puis de présenter aux vaincus un traité à signer.
    En attendant, le charbon manquait
et il faisait un froid de loup dans tous les hôtels. Elle avait une suite au
Majestic, où la délégation britannique avait installé son quartier général.
Craignant les espions français, les Anglais avaient remplacé tout le personnel
par des gens à eux. Résultat : la nourriture était infâme – porridge
au petit déjeuner, légumes trop cuits et mauvais café.
    Enveloppée dans un manteau de
fourrure d’avant-guerre, Maud retrouva Johnny Remarc au Fouquet’s sur les
Champs-Elysées.
    « Merci d’avoir organisé mon
voyage à Paris, lui dit-elle.
    — Je ne peux rien te
refuser, Maud. Mais pourquoi tenais-tu à venir ? »
    Elle n’allait pas avouer la
vérité, surtout à un bavard invétéré comme lui. « J’avais envie de faire
du shopping, répondit-elle. Je ne me suis pas acheté de vêtements depuis quatre
ans.
    — Oh, ne me raconte pas d’histoire.
Il n’y a rien à acheter, ou alors à des prix exorbitants. Quinze cents francs
une robe ! Fitz lui-même mettrait son holà. Allons ! Tu as un
amoureux français, avoue-le.
    — Si seulement !» Elle
changea de sujet. « J’ai récupéré la voiture de Fitz. Sais-tu où je
pourrais trouver de l’essence ?
    — Je vais voir ce que je
peux faire. »
    Ils commandèrent à déjeuner. Maud
demanda : « Tu crois que nous allons vraiment réclamer aux Allemands
des milliards de réparations ?
    — Ils sont mal placés pour
protester. Après la guerre franco-prussienne, ils ont exigé cinq milliards de
francs de la France, qui les a payés en trois ans. Et en mars dernier, au
traité de Brest-Litovsk, l’Allemagne a fait promettre un versement de six
milliards de marks aux bolcheviks qui, naturellement, ne les payeront pas.
Autant dire que les cris indignés de l’Allemagne paraissent un peu hypocrites. »
    Maud n’aimait pas qu’on parle
durement des Allemands. Comme si leur défaite en faisait des barbares. Et si c’était
nous qui avions perdu, avait-elle envie d’objecter, devrions-nous admettre que
nous sommes responsables de la guerre et payer pour tout ? « Mais on
leur réclame des sommes tellement extravagantes : vingt-quatre milliards
de livres. Quant aux Français, ils exigent presque le double !
    — Il est difficile de
discuter avec les Français. Ils nous doivent six cents millions de livres et
encore plus aux Américains. Si nous leur refusons les réparations allemandes,
ils nous diront qu’ils ne peuvent pas nous rembourser.
    — Les Allemands peuvent-ils
payer ce que nous leur demandons ?
    — Non. Selon mon ami Pozzo
Keynes, ils ne peuvent en payer qu’un dixième : deux milliards de livres,
et encore, cela risque de mettre le pays à genoux.
    — Tu veux parler de John
Maynard Keynes ? L’économiste de Cambridge ?
    — Oui. Nous le surnommons
Pozzo.
    — Je ne savais pas qu’il
était… de tes amis. »
    Johnny sourit. « Mais si, ma
chère, un ami très proche, même. »
    Maud envia sur le moment la
joyeuse dépravation de Johnny. Elle avait eu tant de mal à

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