La colère du lac
plage, si on
recommençait.
— Qu’est-ce que ça donnerait ? l’interrompit Julianna en le repoussant un peu.
On s’entendra jamais tous les deux, dit-elle en baissant les yeux.
— Non, dis pas ça, ma princesse… J’rêve juste à toé depuis que t’es débarquée
de ce foutu bateau. Enfin, débarquée, façon de parler… la taquina-t-il.
— Oh, François-Xavier Rousseau, tu vois, on passerait tout notre temps à nous
chicaner.
— Mais oui, pis au moins on sera sûrs de pas s’ennuyer jamais
ensemble…
— Est-ce qu’on est en train de parler d’avenir tous les deux par hasard ?
demanda Julianna.
— J’pense ben que oui. Julianna, voudrais-tu devenir ma femme ?
— Oui, mais à condition que tu m’embrasses tout de suite.
— J’ai l’impression que tu vas me mener par le bout du nez, toé !
— J’en ai ben l’intention, dit-elle en l’attirant vers son visage.
— Hum… En fin de compte, j’pense qu’on va vraiment ben s’entendre, déclara-t-il
après s’être exécuté de bonne grâce. T’es tellement belle, Julianna… j’t’aime…
T’as été dans mes rêves, jour et nuitte, ton image me quittait jamais. J’ai vécu
l’enfer ces derniers mois…
— Moé aussi, c’est pour ça qu’j’ai plus voulu revoir Henry.
— C’est la même chose avec Eugénie, murmura-t-il en cherchant à l’embrasser
encore.
— Eugénie ? C’est qui Eugénie ? questionna-t-elle en le repoussant
subitement.
— Eugénie, c’était ma presque fiancée, lui répondit-il en souriant.
— Ta presque fiancée ! répéta la jeune fille en se levant. Que faites-vous ici
d’abord François-Xavier Rousseau, allez vous marier pis vite, ajouta-t-elle en
désignant la porte de la main. Eugénie doit s’impatienter. De toute façon, moé
j’ai ma carrière à Montréal qui m’attend ! Marraine pis moé, on va partir vivre
là-bas pour de bon.
François-Xavier ne cessait de sourire. Elle était si belle avec son fameux
petit nez en l’air à jouer la grande dame offusquée.
— Ben oui, ben oui, me marier, c’est ben c’que j’ai l’intention d’faire.
— Moé, je serai célèbre !
François-Xavier s’approcha doucement, la faisant reculer jusqu’au bord de la
fenêtre au dos de laquelle elle se trouva coincée.
— Pis tu vas avoir des tas de soupirants qui te couvriront de
fleurs et de baisers comme ceci…
Lentement, il se pencha vers sa promise et dit :
— J’ai très envie de t’embrasser encore, ma princesse…
— Gardez vos baisers pour Eugénie, le défia-t-elle.
— C’est pas elle que j’ai envie d’embrasser.
— Moé, ça me tente pas, bouda-t-elle.
— Alors tant pis !
François-Xavier n’insista pas et jouant l’indifférent, se recula un peu.
— Ah non, se fâcha Julianna les mains sur les hanches, tu vas pas
recommencer !
— Recommencer quoi ? demanda-t-il hypocritement. À pas t’embrasser de force, à
pas t’enlever dans mes bras pis t’emmener dans mon château ? demanda-t-il en
revenant vers elle.
Il plaça ses bras de chaque côté de la fenêtre, piégeant ainsi la jeune
fille.
— Tu vas m’épouser ! ordonna-t-il.
Elle fit signe que oui.
— Tu vas m’aimer toute la vie.
Encore une fois elle acquiesça silencieusement.
— Tu vas venir vivre avec moé su’a Pointe pis tu vas m’faire les plus beaux
enfants du monde pis tu vas m’faire oublier toutes les Eugénie de la terre… pis
tu vas chanter rien que pour moé… j’vas être ton prince… pis tu me quitteras
jamais… jamais.
— Jamais, promit avec ferveur Julianna.
Et ils s’embrassèrent longuement.
— On descend annoncer la bonne nouvelle ? demanda François-Xavier, peu
après.
— Oui, allons les trouver pis leur annoncer notre mariage, répondit
Julianna.
Ils trouvèrent Ernest et Léonie encore installés au salon sur
le divan de velours vert, une nouvelle tasse de thé dans les mains.
— Ah, vous voilà les jeunes, dit Ernest.
— Comment ça va ma grande ? s’inquiéta Léonie.
— Je suis si heureuse ! C’est le plus beau jour de ma vie ! lança-t-elle avant
d’ajouter, devant le regard ahuri d’Ernest et de Léonie : C’est sûr que j’ai de
la peine pour mon père, mais c’est parce que…
François-Xavier l’interrompit et mit un genou à terre devant Léonie et demanda
solennellement :
— J’le sais que
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