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La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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fait.
     Pourquoi tant d’animosité ? Elle devait aider son prétendant.
    — Papa, interpella timidement la jeune fille, Patrick a quelque chose à vous
     dire…
    — Patrick ? s’étonna le père en levant son regard vers sa fille. Tul’appelles par son p’tit nom ?
    — Monsieur Mailloux… s’interposa le jeune homme.
    — Toé, j’t’ai rien demandé ! se fâcha le père. C’est à ma fille que
     j’parle.
    — Monsieur Mailloux, répéta Patrick en élevant la voix à son tour. Moé vouloir
     votre fille !
    — En mariage, s’empressa de rectifier Joséphine. Y m’a demandée en
     mariage !
    « Ah ! quelle situation délicate ! » se dit Patrick. Mais dans quoi s’était-il
     embarqué !
    Estomaqué, le père Mailloux resta un instant interdit, assimilant ce que sa
     fille venait de lui annoncer. Où s’était-il trompé ? Il était sûr d’avoir bien
     manœuvré pourtant pour éviter justement que cela ne se produise. Il avait averti
     le marin, sa fille… Il devait vraiment se faire vieux ! Mais il avait encore des
     atouts. S’ils pensaient s’en tirer si facilement ces deux-là et lui jouer dans
     le dos, ils se trompaient lourdement. Il avait décidé qu’il finirait ses vieux
     jours dans cette maison, que sa fille prendrait soin de lui, et c’était ainsi
     que cela se passerait. Et si ce maudit embarras de matelot pensait partager ces
     années-là, il allait déchanter le pauvre ! Il n’endurerait pas d’étranger chez
     lui. Jamais !
    — Jamais ! explosa-t-il en se levant brusquement.
    Brandissant sa canne, qu’il avait toujours à proximité de lui, il en asséna un
     violent coup sur l’assiette pleine de légumes et de viande de Patrick.
    La vaisselle de faïence explosa sous l’impact, barbouillant de bouillon le
     visage d’un Patrick O’Connor complètement sidéré par la réaction violente du
     père.
    Mais la rage du vieil homme ne faisait que commencer.
    — Jamais ! fulmina-t-il de nouveau.
    Toujours à l’aide de sa canne, il fustigea le prétendant de sa fille àgrands coups, sous lesquels Patrick dut se lever et reculer afin
     de se protéger.
    — Papa ! supplia Joséphine, en allant se placer comme bouclier devant Patrick.
     Non, papa, faites pas ça ! Je l’aime !
    — Ôte-toé de mon chemin ! la menaça son père sans l’écouter. Quant à toé, sors
     de ma maison tusuite, ordonna-t-il en lui désignant la sortie. Pis j’veux pus
     jamais te revoir rôder dans le boutte. Retourne-toé donc chez tes pareils. On
     veut pas de toé par icitte !
    — Mais monsieur Mailloux… tenta une nouvelle fois Patrick.
    — J’t’avais averti de pas approcher de ma fille, t’aurais dû m’écouter ! J’t’ai
     dit de sacrer ton camp, tu vas-tu comprendre le français, maudit de sale
     Irlandais !
    Enragé, le père Mailloux tassa sa fille et alla ouvrir grand la porte. Puis,
     comme on chasse un chien galeux à coups de bâton, le vieil homme fonça sur le
     marin qui n’eut que le temps de crier :
    — Moé être chez le curé, Joséphine, chez le curé ! Moé va t’attendre ! avant de
     se faire violemment pousser dehors.
    Le père claqua la porte sur les cris désespérés du marin et se retourna vers sa
     fille à moitié affaissée sur le bord du mur.
    — Pourquoi vous avez fait ça, j’comprends pas… larmoya Joséphine.
    — Y a jamais un bon à rien de sale étranger qui va mettre la main sur mes
     affaires, gronda le père. Quand j’serai pus là, tu marieras qui tu voudras, mais
     en attendant, c’est encore moé qui mène icitte !
    Joséphine se redressa :
    — J’va aller le rejoindre d’abord. On se mariera sans vous, pis s’il le faut,
     j’irai vivre dans son pays ! se révolta la jeune fille. Pis, c’est pas vous pis
     votre sale canne qui vont m’en empêcher ! s’écria-t-elle tout en empoignant son
     châle qu’elle mit n’importe comment sur ses épaules.
    Le vieil homme, resté dos à la porte, ne broncha pas. Redevenutrès calme, il s’adressa froidement à sa fille :
    — Pis les dernières volontés de ta mère pis ta promesse, que c’est que t’en
     fais, ma fille ?
    Joséphine, estomaquée, resta sans voix devant ces arguments. Elle était sous le
     choc. Tout s’était déroulé si vite. Trop d’événements dans une seule journée…
     Passer du plus grand bonheur au plus grand désespoir… C’était trop… Elle
     s’écroula sur une chaise et se mit à

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