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La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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la semaine prochaine.
    — Vous savez, son père, que Ti-Georges a même pas encore le droit de prononcer
     leurs noms chez eux ?
    — Ce qui se passe chez les Gagné, ça nous regarde pas.
    — Joséphine est pas là ? s’informa François-Xavier en changeant de sujet.
    — Tu l’sais ben qu’est pas là, s’impatienta Ernest. A te l’a dit troisfois qu’a s’en allait soigner le petit dernier des Girard.
     C’est justement à propos de c’te maladie-là que chus en train d’écrire à
     mademoiselle Coulombe. Ç’a l’air que depuis le début de l’automne, ça commence à
     tomber comme des mouches… Bon j’ai pas rien que ça à faire, envoye mon fils, que
     c’est qui te chicote à soir ?
    — J’veux vous parler d’avenir, déclara gravement François-Xavier en s’asseyant
     à la table près de son père.
    Ernest plia soigneusement la missive inachevée, la mit de côté et prit le temps
     d’allumer une pipée. Seulement après il dit :
    — J’t’écoute, mon gars.
    — Vous savez que depuis que j’ai fini l’école, Joséphine arrête pas de
     m’asticoter pour que j’continue à faire de grandes études.
    — Joséphine, a te considère un peu comme son propre fils. T’as jamais eu de
     mère… enfin… ben… baptême, tu comprends ce que j’veux dire, balbutia
     Ernest.
    Le jeune homme regarda affectueusement son père adoptif.
    — J’le sais ben… Ce que j’veux vous dire, c’est que j’ai ben jonglé à tout ça
     cet été pis j’me suis décidé.
    — Y fallait ben que j’m’attende à ce que tu partes un jour… L’éducation c’est
     important, pis chus ben fier de toé, mon gars pis Chicoutimi, c’est pas si loin
     pis mon fils va p’t-être ben devenir docteur…
    D’émotions, Ernest s’était mis à parler rapidement, car il ne voulait pas
     montrer à son fils le désarroi dans lequel l’idée de son départ le mettait. Mais
     François-Xavier l’interrompit :
    — Vous m’avez pas ben compris, son père. Chus décidé à pas partir à
     Chicoutimi.
    — Ah non ? Tu restes su’a ferme avec moé ?
    — Non.
    — Non ?
    — Non.
    Le jeune homme sourit devant la déconfiture de son père. Enfin, il annonça
     triomphalement :
    — J’va avoir une fromagerie ! Fermez la bouche, son père, vous allez avaler des
     mouches ! s’esclaffa François-Xavier devant l’air ahuri de son père
     adoptif.
    — Une fromagerie ! répéta Ernest.
    — J’ai pensé à tout, son père… Enfin Ti-Georges m’a aidé… mais tout est
     arrangé. J’m’en va être apprenti pendant trois ans à la fromagerie Perron de
     Saint-Prime. Y ont accepté, j’pars après l’hiver pis après on ouvre notre
     fromagerie, icitte, su’a Pointe-Taillon !
    — Ah ben baptême si j’m’attendais à ça !
    — Vous allez l’dire à Joséphine pour moé ? demanda François-Xavier en
     retrouvant tout à coup une voix de petit garçon. J’voudrais pas la
     décevoir…
    — Ah mon fils, si t’as pas encore compris que Joséphine, tout ce qu’a veut dans
     vie, c’est ton bonheur, c’est que t’es un moyen cabochon. Astheure, laisse-moé
     finir ma lettre. J’va annoncer la grande nouvelle à mademoiselle Coulombe.
    — P’t-être ben qu’a va venir voir notre fromagerie dans une couple
     d’années !
    — Compte pas trop là-dessus. A promis de jamais remettre les pieds icitte pis
     baptême, j’commence à croire que c’étaient pas des paroles en l’air !

D EUXIÈME PARTIE
    —  N
on, Julianna, on
     reviendra pas là-dessus encore ! On part demain matin un point c’est tout.
    — Mais, marraine… j’ai pas envie d’y aller !
    — Arrête d’en faire toute une histoire. On va passer l’été en vacances au
     Lac-Saint-Jean, j’t’emmène pas à l’abattoir !
    — Passer l’été dans ce coin reculé, c’est pareil, riposta la jeune fille.
     Peut-être que l’abattoir serait plus agréable !
    — Oh ! Julianna, arrête de faire le bébé ! T’as dix-neuf ans maintenant !
     J’commence à être tannée de m’obstiner avec toé !
    Bon voilà que sa nièce recommençait à bouder ! Léonie sentit le découragement
     l’envahir. Il est vrai qu’elle-même n’était pas vraiment patiente depuis une
     couple de semaines… depuis qu’elle avait reçu cette fameuse lettre. Ce n’était
     pas dans ses habitudes de rabrouer ainsi sa fille adoptive. D’ailleurs, elle
     soupçonnait ce manque de

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