Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La complainte de l'ange noir

La complainte de l'ange noir

Titel: La complainte de l'ange noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
Vom Netzwerk:
la nuit.
    — Pourquoi cette inquiétude au sujet de Lavinius ? s’étonna le roi.
    Corbett saisit l’occasion de narrer, en quelques phrases lapidaires, les événements de Hunstanton. Édouard se grattait la barbe, de plus en plus embarrassé, en imaginant son principal magistrat fourvoyé dans les marais côtiers et les prés inondés du Norfolk.
    — J’espérais, dit-il lorsque Corbett eut achevé son récit, que vous pourriez venir en aide à Lavinius, surtout après la mort de Cerdic.
    Il désigna Warenne, qui, la mine sombre, fixait les flammes.
    — Et Surrey était d’accord !
    — Lavinius est un excellent clerc, renchérit Warenne.
    — Monseigneur, rétorqua Corbett, Lavinius a perdu l’esprit !
    Le comte se retourna d’un bloc, mais Corbett soutint son regard sans ciller.
    — Et vous le savez, Monseigneur, enchaîna-t-il calmement. Le chagrin l’a rendu fou.
    — Et les pastoureaux ? se hâta de demander le monarque.
    — Sire, je me permets de vous recommander de signer, à la prochaine réunion du conseil à Westminster, un décret enjoignant à tous les shérifs, baillis et officiers portuaires, ainsi qu’à vos barons et principaux seigneurs, de bannir les pastoureaux du royaume.
    — Pour quels motifs ?
    — Pour préserver l’ordre public et la paix civile.
    — Pourquoi ? Croyez-vous les pastoureaux responsables de ces meurtres ?
    — Cela se pourrait. Mais je n’aime pas voir des étrangers arriver dans une région et exhorter les jeunes à partir en les appâtant avec des voyages à l’autre bout de la terre.
    Édouard opina du chef.
    — Mais la mission de Monck ne concerne pas les pastoureaux, n’est-ce pas ? poursuivit Corbett. Sire, allez-vous me dire la vérité ou devrai-je vous rendre les insignes de ma charge et, à l’instar de Sir Simon Gurney, me retirer sur mes terres ?
    Le monarque se pencha et saisit le genou de Corbett en un geste soudain d’affection. Les larmes brillaient dans ses yeux bleus. « Oh, Seigneur ! Pas ça ! supplia Corbett à part soi. Pas Édouard en monarque âgé, abandonné de ses amis ! » Il devinait ce qu’il allait entendre.
    — Hugh ! l’interpella le souverain d’une voix rauque. Vous êtes épuisé !
    — Acceptez sa démission ! railla Warenne.
    — Silence, Surrey ! Silence ! Allez au diable ! rugit Édouard.
    Il bondit, l’humeur radicalement changée, et s’approcha du comte, le dominant de toute sa haute taille.
    — Cet imbroglio est de votre faute ! hurla-t-il. Je vous avais averti. Mais non, il a fallu que vous envoyiez Monck en mission là-bas !
    Warenne observait son souverain. Celui-ci lui adressa un clin d’oeil. Le comte soupira. Depuis leur plus tendre enfance, il était le souffre-douleur du roi ; il se prêterait encore à cette mascarade. Corbett regarda par la fenêtre et s’efforça de se composer un visage. Le monarque et le comte jouaient la comédie, il le savait, mais il se détendit : il allait enfin apprendre la vérité – une partie, tout au moins.
    Édouard s’avança vers la table, remplit trois gobelets de vin blanc et en tendit un à Corbett et un à Warenne. Puis il s’assit de guingois sur le banc et but bruyamment en fixant Corbett d’un air furibond de dessous ses sourcils broussailleux.
    — Je ferai rédiger des mandats dès ce soir. Vous continuerez la mission de Monck.
    Il se passa une langue gourmande sur les lèvres.
    — Maintenant, Surrey, veuillez expliquer à notre ami Corbett ce à quoi s’emploie Monck à Mortlake.
    Warenne traîna sa chaise vers Corbett et lui tapota l’épaule.
    — Sans rancune, j’espère, Hugh !
    — A Dieu ne plaise, Monseigneur.
    Warenne contempla le fond de son gobelet.
    — L’histoire commence en octobre 1216, la dernière année du règne du roi Jean sans Terre, le noble et puissant grand-père de notre actuel souverain.
    — Point de sarcasme ! intervint Édouard.
    — Bref, Jean sans Terre passa le plus clair de son règne à combattre ses grands barons et à parcourir le pays pour tenter de soumettre tel ou tel seigneur. Il s’éteignit à Newark-on-Trent. D’aucuns pensent qu’il fut empoisonné, d’autres qu’il mourut le coeur brisé d’avoir perdu, dans le Wash, les insignes de la royauté et tout le trésor.
    Il sourit en voyant s’éclairer la mine de Corbett.
    — Apparemment, vous avez déjà entendu cette histoire. Je vais vous rafraîchir la mémoire. Le roi Jean, parti de

Weitere Kostenlose Bücher