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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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combat,
mais les quelques revers que je vous ai fait subir m’ont donné la dimension
d’un héros légendaire, d’une sorte de demi-dieu. Si vous m’aviez considéré
comme un prisonnier, la guerre aurait de nouveau embrasé la région. Je vous
sais gré de ne pas l’avoir fait. J’aspire à la paix, tout comme vous, mais
laissez-moi le temps de me familiariser avec votre Dieu, votre pape et tous vos
saints…
    Je m’attachai à
rendre son séjour agréable, en ne lui laissant pas penser qu’il se présentait à
moi en vaincu. J’aurais aimé entretenir avec lui des relations de confiance et
d’amitié, mais il y avait encore en moi, contre lui, trop de griefs et quelques
relents de vindicte qui se dissipèrent vite. J’aurais aimé le faire participer
à une expédition de chasse dans la grande forêt de la Croix-aux-Bois, mais il
n’était pas en état d’en suivre le train.
    Lourd d’émotion, le baptême collectif se
déroula le lendemain de son arrivée, dans l’église d’Attigny. Widukind se
soumit sans manifester la moindre réserve au cérémonial d’usage, mais son
épouse et quelques-uns de ses suivants s’y refusèrent.
    Il me dit en remontant dans son chariot :
    — Sire, je vous le répète : ma
conversion est sincère et m’accompagnera jusqu’aux derniers sacrements. Je vous
donnerais de faux espoirs en vous disant que notre peuple est disposé à suivre
mon exemple. Vous en avez eu la preuve au cours de la cérémonie du baptême.
    Je lui demandai où il comptait finir ses
jours. Il me répondit :
    — Je vais regagner le Danemark pour une
retraite définitive dans le petit domaine que le roi Siegfried m’a concédé, sur
l’île d’Aerö. Désormais, vous n’entendrez plus parler de moi. En revanche, je
ne puis vous donner la certitude que les peuples que vous avez soumis ne
chercheront pas à contrarier vos ambitions. L’amour de l’indépendance et de la
liberté est un sentiment plus cher que leur existence.
    — Je ne l’ignore pas, lui répondis-je,
mais, pour me montrer aussi franc que vous l’êtes, dites-vous que je poursuivrai
ma mission civilisatrice, quitte à y laisser ma vie, D’autres après moi
reprendront la lutte. Que Dieu vous garde, Widukind. Je ne vous oublierai pas
dans mes prières si vous me promettez de faire de même.
    Il me répondit avec des larmes séniles :
    — Je vous le promets, Charles. Nous nous
retrouverons un jour dans le paradis des guerriers, au pied de la croix.
    Il repartit comblé de cadeaux et muni d’une
escorte armée pour assister la sienne au cas où il serait attaqué par des
brigands. La neige avait cessé. Des vols d’oiseaux noirs balayaient un ciel de
cristal bleu.
    Quelques années plus tard, j’appris sa mort,
non dans son île des mers froides mais dans la ville d’Engern, en Westphalie.

2
    L’hiver que je passai à Attigny fut clément,
avec des pluies modérées et de brèves apparitions de la neige.
    Mon entourage, à commencer par Fastrade,
s’était attaché à rendre ces longues semaines agréables, comme s’il craignait
qu’une mouche me piquant, j’eusse pu reprendre le chemin de l’Est.
    Confortablement assis dans le fauteuil
capitonné qui m’était destiné, je consacrais des heures, chaque jour ou
presque, à assister aux débats de l’académie Palatine.
    J’écoutais avec ennui les vaticinations de
savants sur les auteurs de l’Antiquité, mais avec un intérêt proche de la passion
Alcuin dissertant de son paradis perdu, l’Italie, et truffant ses exposés de
poèmes de Catulle ou de Virgile. Les logorrhées des premiers me fermaient les
paupières ; les propos d’Alcuin me les rouvraient. J’admirais ce clerc et
le redoutais ; il avait le jugement juste mais la critique acerbe, ce dont
je faisais parfois les frais. Certaines controverses entre lui et moi
ébranlaient les murs.
    Parenthèse :
    Éginhard :
    — Dieu merci,
nous sommes débarrassés de ce trublion ! Je ne supportais plus sa prétention
à tout connaître du monde et des hommes, son emphase, son mépris pour ses
contradicteurs.
    — Il semble
qu’à Saint-Martin de Tours où Dieu l’a appelé, tous ne soient pas de ton avis.
Il y a créé une autre académie, et, à ma requête, des écoles. Il s’y est fait
des adeptes.
    — Certes, en
les comblant de faveurs !
    — Ne serais-tu
pas jaloux de lui, toi, mon vieil ami ?
    — Pourquoi le
serais-je, sire ? Je suis moins savant que lui mais plus

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