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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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retranchements.
Il nous fallut des semaines pour en venir à bout, avec des pertes sensibles
occasionnées par l’efficacité des défenses et surtout en raison des fièvres suintant
des marais, qui me privèrent de centaines de soldats, malades ou morts faute de
soins appropriés.
    Je restai moi-même une semaine à suer sang et
eau, agité de frissons, torturé par des vomissements, et crus ma dernière heure
arrivée. Étaient-ce les prières de mes moines, ma robuste constitution ou la
volonté de Dieu ? Toujours est-il que j’en réchappai.
    Je profitai de ma présence en ces lieux pour
poser les jalons d’une ville destinée à prendre la place du village d’Herstel
qui, me dit-on, signifiait en langue saxonne « repos de l’armée ».
Lorsque j’y retournai, quelques mois plus tard, avant de revenir en Francie, je
constatai qu’une vingtaine de maisons de pierre étaient sorties de terre en mon
absence, avec des amorces de rues, de places, ainsi que les fondements d’une
église et d’un bâtiment monastique. Nous célébrâmes là les fêtes de Pâques.
    Avant de repartir, j’envoyai en Nordalbingie,
petite nation entre l’Elbe et l’Eider, quelques officiers chargés de rendre la
justice en mon nom. Cette initiative audacieuse allait connaître une fin
tragique.
    À peine mes officiers avaient-ils franchi
l’Elbe, ils avaient été pris à partie par une population xénophobe, molestés
puis emprisonnés dans le but d’en tirer rançon. Ceux qui avaient résisté furent
massacrés.
    Ma riposte allait être foudroyante. Je fis
avancer mon armée jusqu’à Minden, ville proche de la frontière, et alertai mes
amis obodrites. Ils répondirent à mon appel mais, peu préparés à une guerre,
furent exterminés au premier engagement.
    Écœuré par ces expéditions qui m’apportaient
quelques satisfactions pour de nombreuses désillusions, je laissai Charles
poursuivre la pacification de ces territoires en me jurant de ne plus jamais
m’y risquer. C’est un cadeau que je lui faisais, car il aimait la guerre plus que
moi ; si je l’avais écouté, il n’aurait jamais quitté son destrier ni
laissé son épée au fourreau.
    J’appris à mon
retour à Aix une nouvelle qui me peina : le pape Adrien venait de quitter
ce monde qui lui avait causé beaucoup de misères pour quelques satisfactions
aléatoires.
    Il était mort le matin de Noël de l’an 795.
Dans le ciel de Rome, les cloches de la Nativité avaient fait écho aux glas
funèbres. Je ne pouvais oublier qu’il avait été pour moi, malgré ses
sempiternelles lamentations, un allié fidèle et presque, si j’ose dire, un ami.
    Avec le secours d’Éginhard, je fis graver une
épitaphe en latin, sur une dalle de marbre noir des Alpes, ornée d’un décor de
pampres et de grappes : « En pleurant le Père, moi, Charles, j’écris
ce poème : Doux ami, je me lamente. Je joins nos noms illustres à nos
titres : Hadrien et Charles, moi Roi et toi Père. »
    Au retour d’une campagne, je lui avais offert
le présent le plus agréable qui fût pour lui : la création d’évêchés à
Paderborn, Bremen, Münster, Minden et Verden, avec une condition expresse à
l’adresse des évêques : qu’ils interdisent les conversions obtenues le
couteau sur la gorge et veillent à la bonne discipline du clergé et des moines.
    J’avais acquis la certitude qu’un jour une
bonne entente régnerait dans nos rapports avec les nations de l’Est et que nous
constituerions le grand Empire germano-franc d’Occident dont j’ai toujours
rêvé.
    Restait aux populations soumises à oublier que
j’avais été pour elles un tyran et un bourreau, pour ne se souvenir que du guide
leur ouvrant les voies de la civilisation et de la vraie religion.

4
Sang et soleil

1
    Palais
d’Aix : été 800
    Il ne se passe par
une journée que je ne rende visite à un hôte illustre, mais encombrant de mon
palais : mon ami Aboul-Abbas.
    Lorsque je l’ai vu surgir, un soir de neige, à
la tête d’une caravane, je me suis cru transporté par magie dans un village
d’Afrique ou d’Asie. Ses énormes oreilles battaient dans la bourrasque et sa
trompe paraissait faire la chasse aux papillons blancs qui tournoyaient autour
de lui. On avait pris soin de le caparaçonner de grosses couvertures de laine,
si bien qu’il ne paraissait pas souffrir du froid.
    Je venais de prendre livraison d’Aboul-Abbas
et de faire sa connaissance avec, de sa part, quelques

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