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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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de mon fils me mit au bord du précipice. Par mon calme et ma
volonté, j’évitai d’y chuter, mais j’ai gardé de cet épisode dramatique des
traces indélébiles.
    La Saxe venait de se soulever comme un seul
homme.
    J’avais l’habitude, à la moindre menace de
rébellion, de sauter en selle et de prendre la tête d’une armée pour
l’entraîner dans des expéditions souvent décevantes voire inutiles, rarement
triomphales, avec le regret de sacrifices superflus.
    Celle que je croyais la dernière me ramenait
au souvenir du vieux chef saxon Widukind, qui, après s’être prosterné devant
moi, était allé mourir dans son île du Danemark.
    Pour cette nouvelle alerte, pas de chef
comparable à lui, du moins à ma connaissance. Les prisonniers saxons étant peu
bavards, même pris de bière ou de vin, les livrer au bourreau eût été inutile.
Cette fois-ci, j’avais l’impression que Widukind avait insufflé son esprit
d’indépendance à tout son peuple.
    À peine avions-nous franchi nos frontières, il
semblait que, dans tous les villages et dans toutes les chaumières, on s’était,
durant des années, préparé au combat.
    Après trois semaines d’alertes continuelles,
parfois d’accrochages d’une rare intensité qui nous occasionnaient des pertes
importantes, je dus me résoudre à rebrousser chemin, conscient de ne pouvoir,
en une seule campagne, venir à bout d’une insurrection de cette ampleur.
    De retour en Francie, je décidai de réformer
mon armée pour lui donner des moyens plus abondants et plus efficaces. J’accrus
l’importance de ma cavalerie, dotai cavaliers et chevaux de cuirasses, de hauts
boucliers en forme d’amande, avec un umbo saillant pour écarter flèches et
javelines, de casques métalliques à nasal…
    Mon épouse, Fastrade, exigea, en dépit de sa
santé précaire, de me suivre dans la campagne que j’organisais. Elle
souhaitait, me dit-elle, « avant de mourir », revoir son père, le duc
Rodolphe de Franconie, sa famille et sa terre natale. Je confiai à mon fils
Charles le soin de lui servir d’écuyer et de la surveiller. Elle s’en offusqua,
disant que les longues randonnées à cheval ne lui faisaient pas peur.
    Un soir où nous festoyions chez un de mes
comtes, aux approches de la Franconie, Charles l’avait tancée pour lui
reprocher l’abus qu’elle faisait de la bière. Elle lui avait jeté le contenu de
son gobelet au visage, l’avait injurié, disant qu’elle n’avait pas besoin d’un
chien de garde et, par-dessus la table, lui avait jeté un os en aboyant :
    — Wooo… Wooo… Bon chien…
    Charles avait blêmi, s’était essuyé le visage
à la nappe, avait jeté l’os sous la table, avant de se retirer dignement.
C’était le mieux qu’il eût à faire ; cette furie eût été capable de
l’agresser avec son couteau.
    J’avais assisté à la scène et m’étais levé
pour éviter le pire. Le repas terminé, j’avais fait transporter Fastrade, ivre
morte, sous ma tente, avais allumé ma chandelle puis je l’avais giflée avec une
telle violence qu’elle avait chancelé et s’était accrochée au piquet central
pour ne pas s’écrouler. Elle m’avait toisé avec un rictus et, tirant son
poignard de sa ceinture, s’était ruée sur moi avec un hurlement de fauve.
J’étais parvenu sans peine à la désarmer et l’avais forcée à avaler un vomitif
qu’elle avait recraché aussitôt, criant que je voulais l’empoisonner.
    Je l’avais fait asseoir sur le bord de mon lit
et l’avais sermonnée.
    — Veuillez tenir ma réaction, lui dis-je,
pour un dernier avertissement. En humiliant le prince Charles, vous avez passé
les bornes. Je devrais vous faire reconduire à Aix. Promettez-moi de mettre un
terme à vos humeurs.
    Fastrade n’avait rien répondu à cette
admonestation ; elle s’était endormie.
    Fastrade mourut
d’épuisement quelques mois plus tard. Certains murmurèrent, voyant dans cette
mort ma volonté de me séparer de cette mégère. Je laissai cancaner. Dieu merci,
je répugne à ces pratiques dignes de Byzance et de Cordoue. Le pire des
châtiments que j’eusse envisagé était de lui faire prendre le voile.
    Cette brutale disparition ne me surprit guère
et me désola moins encore. La fatigue, l’abus des boissons fortes, la chaleur
pesante de l’été, son état de santé précaire laissaient prévoir cette fin.
    Après trois jours d’agonie, elle mourut à
Francfort, à la suite d’une

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