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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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de ne pas compromettre leur commerce et de préserver leur
indépendance.
    Irrité d’une telle inconstance, Pépin envahit
leur territoire et leur ôta leurs illusions.
    Devant une situation
à ce point inextricable, qui risquait de dégénérer en conflit général, la seule
solution était de proposer sinon la paix, du moins une trêve. Pépin s’y
attacha. Les négociations paraissaient sur le point d’aboutir quand une
nouvelle me frappa comme d’un trait de foudre : la mort de Pépin, dans la
lagune de Venise, victime des fièvres à ce que l’on m’a dit.
    Quelques mois plus tard, autre nouvelle
dramatique : le basileus Nicéphore I er disparut à son tour
au cours d’une campagne contre les peuplades bulgares soumises à un khan nommé
Krum, qui agressaient ses postes frontaliers. Il avait été massacré au cours
d’une bataille.
    Je n’eus, en apparence du moins, qu’à me louer
des dispositions favorables que me témoignait son gendre, Michel Rangabé, qui
lui avait succédé. Il était, me dit le pape Léon, pieux, et surtout pacifique
ce qui me rassurait plus encore.
    À peine avait-il coiffé la couronne, il
m’adressa une ambassade porteuse de propositions de paix, qui me trouva tout
disposé à mettre fin à ce dangereux imbroglio. Que l’on juge de ma confusion
quand ils me saluèrent du titre de basileus et non d’empereur, en me
couvrant de dithyrambes, comme si j’était à la fois le maître de l’Occident et
de l’Orient !
    Michel Rangabé n’allait pas longtemps jouir de
ses pouvoirs, une révolution de palais l’emporta comme un fétu de paille, après
une autre défaite contre les Bulgares.
    De son successeur, Léon V, dit
l’Arménien, je n’appris que peu de chose, cloué au lit par une maladie.
    Je ne puis que me réjouir que mon gouvernement
eût échappé aux meurtres et aux dépositions intempestives qui étaient devenues,
à Constantinople, une sorte de tradition. Si j’excepte le complot mené contre
moi par mon fils Pépin le Bossu, aucune lame de fond n’est venue troubler la
relative sérénité de mon règne.

2 Les derniers feux

1
    Palais
d’Aix : printemps 812
    Depuis quelques
années, je vis avec en moi une sorte d’embryon qui manifeste sa présence par
des irruptions dans mon sommeil de nuit et celui de ma sieste. Discret mais
redoutable, il ne cesse de me harceler par des signes. Cet élément étranger, ce
double de ma personne, porte un nom : la mort.
    Ce matin, au saut du lit, j’avais l’impression
que mon sommeil aurait pu ne pas avoir de fin, et j’éprouvais le regret qu’il
n’en eût pas été ainsi. À la réflexion, que m’apporte le surcroît de vie que
Dieu m’accorde, quelle compensation à mes angoisses ? Que fais-je là,
assis au bord de ma couche, jadis réceptacle de mes rêves fous et de mes
ambitions raisonnables ? À quoi bon, une fois de plus, respirer l’air
frais du matin, regarder la flaque de soleil où baignent mes pieds nus,
savourer le lait chaud et les tartines grillées de mon premier repas, laisser
mon serviteur faire ma toilette ?
    Autour de moi, la
faucheuse fait sa moisson.
    De mes trois fils, il ne reste qu’un
vivant : Louis. Pépin est mort en Italie. Charles, mon aîné, mon préféré,
celui sur lequel je comptais pour coiffer la couronne impériale, l’a suivi de
peu dans la tombe. Il a été terrassé par une mort subite, au cap de Lippenheim,
sur le Rhin, alors qu’il approchait de la quarantaine.
    Ma petite Rothilde m’a quitté pour une autre
sorte de mort : le cloître, et par ma faute. Je m’étais opposé à sa
mésalliance avec le maître des chiens, Garin. Inconsolable, elle m’avait
supplié de la laisser prendre le voile. À l’heure qu’il est, elle chante laudes
et psaumes chez les nonnes de Thionville avec un vœu formel : renoncer à
tout contact avec le monde, ce qui m’interdit à jamais de la revoir.
    Une autre disparition m’a cruellement
frappé : celle de mon éléphant Aboul-Abbas, à la suite d’une diarrhée
persistante, peut-être aussi en raison de son âge : le mien à peu d’années
près. Je lui rendais visite chaque jour, avec chaque fois quelque
friandise ; il me saluait et me remerciait par des barrissements joyeux.
    Il m’arrivait de l’emmener dans mes
déplacements, caparaçonné à la mode arabe et le front couronné d’un diadème.
Lorsque nous pénétrions dans un village, les habitants s’enfermaient dans leur
masure avec des cris

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