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La Cour des miracles

Titel: La Cour des miracles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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aussitôt garnies de meubles et de tentures.
    Dès le lendemain, le pavillon se trouva logeable, du moins dans la partie destinée à être habitée par Margentine et sa fille. Il restait à les décider.
    – Ce sera difficile, songea la duchesse, mais avec de la patience on arrive à tout. Et puis, en somme, si la petite Gillette doit m’en vouloir, Margentine, au contraire, me doit de la reconnaissance, puisque je lui ai réellement fait retrouver sa fille.
    Maintenant, quelle était au juste la pensée de la duchesse d’Etampes ?
    Voulait-elle sérieusement aider le roi à triompher de Gillette ?
    Ou plutôt n’avait-elle pas quelque espoir secret qu’au contraire la jeune fille résisterait plus facilement dans le pavillon des gardes ?
    Elle n’eût pu le dire exactement.
    Lorsqu’elle arriva dans l’appartement de la duchesse de Fontainebleau elle trouva Margentine dans un fauteuil. Malgré sa blessure, elle ne se couchait plus pour être toujours prête à défendre sa fille.
    Gillette était assise près d’elle.
    La mère et la fille, perdues dans une de ces longues et douces conversations qui étaient leur vie depuis qu’elles s’étaient retrouvées, ne virent point entrer la duchesse.
    Elle avait entre-bâillé la porte de leur chambre, et si basse que fût leur voix, elle put entendre une partie de leur entretien.
    – Et ce jeune homme, disait Margentine, tu dis qu’il s’appelle ?…
    – Manfred, mère.
    – Manfred… Manfred, fit Margentine songeuse ; c’est étrange, il me semble que je connais ce nom-là… bien mieux, il me semble le reconnaître lui-même au portrait que tu m’en as tracé… On dirait que je l’ai connu à une époque lointaine de ma vie.
    Margentine, au temps de sa folie, habitait dans la rue des Mauvais-Garçons, c’est-à-dire sur les frontières de la Cour des Miracles.
    Or, Manfred n’habitait-il pas la Cour des Miracles ?
    Mais Gillette évitait avec une sorte de terreur de dire quoi que ce fût qui pût faire comprendre à sa mère qu’elle avait été folle.
    – Ne vous tourmentez pas, chère mère, dit-elle. Et surtout, ne songez à rien de votre passé, puisque cela peut vous faire du mal.
    – Pourquoi ne penserais-je pas au passé, ma chère enfant ? J’y songe au contraire autant que je puis. Je voudrais pouvoir combler ce trou qu’il y a dans ma mémoire ; je voudrais pouvoir joindre le présent à ma jeunesse et jeter un pont sur le fossé qui les sépare… Enfin, pour revenir à Manfred, je crois vraiment l’avoir connu. Où et quand ? Voilà ce que je ne puis dire…
    – C’est une illusion, mère…
    – C’est possible… Et tu dis qu’il t’a sauvée ? Oui tu m’as dit cela… Et tu l’aimes… Pauvre chérie, je comprends ce que tu dois souffrir, loin de lui… Mais toutes tes misères vont finir, va ! Je te tirerai d’ici, moi… n’aie pas peur.
    – Je n’ai plus peur, ma mère… Tenez, même lorsque… le roi s’est présenté ici brusquement, je n’ai pas eu peur, tandis que je serais morte de terreur si j’avais été seule… comme là-bas…
    – Oui ! Tu m’as dit… comme dans la grotte de l’Ermite… Oh ! l’infâme !
    – Avec vous, je ne redoute plus rien.
    – Et vous avez peut-être tort, mon enfant, dit la duchesse d’Etampes en s’avançant.
    Et comme Gillette demeurait tout interdite, elle se hâta d’ajouter :
    – Pardonnez-moi d’avoir surpris vos derniers mots et d’entrer en tiers dans votre conversation. Je viens en amie…
    – Qui êtes-vous, madame ? demanda Margentine.
    La duchesse, en voyant le regard clair et intelligent de Margentine, comprit la vérité. Elle n’était plus folle !
    – Vraiment, fit-elle, regardez-moi bien… ne me reconnaissez-vous pas ?
    – Madame ! implora Gillette.
    – Laisse parler, ma fille ! interrompit Margentine. Il me semble que je vais enfin savoir… comprendre…
    – Taisez-vous, par pitié ! supplia Gillette à voix basse.
    – J’ai dit que je venais en amie, répondit Anne avec une fermeté voisine de la dureté ; il faut que je le prouve… Regardez-moi, Margentine… Tâchez de vous souvenir… voyons… Vous rappelez-vous Paris… la rue des Mauvais-Garçons ?…
    – La rue des Mauvais-Garçons ! fit Margentine en prenant son front dans ses deux mains.
    – Oui… c’est là que vous m’avez vue, Margentine.
    – Vous m’appelez par mon nom comme s’il vous était familier… et

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