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La couronne dans les ténèbres

La couronne dans les ténèbres

Titel: La couronne dans les ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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avaient confié à Corbett la tâche d’extirper de Londres la rébellion et la haute trahison avec leur cohorte de crimes. Aidé par son serviteur Ranulf, Corbett avait mené à bien sa mission, mais l’avait payé au prix fort. Edouard I er et son chancelier Burnell étaient de rudes maîtres qui n’avaient pas hésité à envoyer aux bûchers de Smithfield, pour y subir une mort affreuse, la femme qu’aimait Corbett 1 . Ce dernier soupira et continua sa lettre : «  Nous avons franchi la frontière écossaise sans incident, si ce n’est qu’une troupe de soldats arborant les armoiries de Lord Bruce nous ont arrêtés et ont examiné nos lettres de créance avant de nous laisser repartir en direction d’Édimbourg. »
    Corbett fit une pause pour tailler sa plume. L’Écosse ! Ces hommes étaient de solides frontaliers, pauvrement vêtus mais bien armés ; portant casques d’acier, broignes de cuir bouilli, jambières et bottes épaisses, ils montaient des poneys de montagne, petits mais résistants. Chacun de ces soldats avait bouclier, lance et poignard et paraissait impatient de s’en servir. Ils auraient certainement préféré lui trancher la gorge, pensa Corbett. Il n’avait pas compris leur langue étrange et rude. En revanche, leur jeune chef, au regard d’acier et aux joues glabres, parlait français et avait examiné soigneusement les lettres de créance et les documents de Corbett et de son escorte avant de les laisser pénétrer dans son étrange pays à la beauté sauvage.
    Pour Corbett, qui avait servi dans les armées d’Édouard en France et au pays de Galles, le nord de l’Angleterre avait été une découverte, mais l’Écosse en était une autre, bien différente : c’était une contrée plus tranquille, plus reculée, la nature y était magnifique et pourtant menaçante. Il l’avait soigneusement observée sur son trajet jusqu’à Édimbourg : de vastes forêts de pins, sombres et hostiles, où régnaient en maîtres sangliers et loups, d’immenses étendues d’une lande désolée et obsédante, des marécages, des montagnes et des lacs. En Angleterre, les anciennes voies romaines, en piteux état parfois, mais aux fondations solides, partaient toutes de Londres et c’était elles que l’on empruntait pour voyager. En Écosse, à part la Route royale, la Via Regis, il n’y avait guère de routes, seulement des sentiers. Corbett avait trouvé pénible le voyage jusqu’à la cité royale d’Édimbourg, et, une fois arrivé, s’était demandé amèrement si cela en valait la peine. Perchée sur son plateau escarpé, sa lugubre forteresse séparée d’un mille de l’abbaye de Holy Rood, Édimbourg s’était avérée froide, humide et inhospitalière. Corbett et son escorte s’étaient rendus directement au château pour présenter leurs lettres de créance, mais s’étaient retrouvés promptement et brutalement logés dans les cellules glacées et austères, aux murs chaulés, de l’hostellerie de l’abbaye.
    Corbett avait attendu deux jours avant de commencer cette lettre et répugnait à présent à la continuer car, après sept semaines de voyage, il n’avait que peu de nouvelles à communiquer à son maître. Il avait fait la connaissance de John Benstede, chapelain d’Edouard I er , nommé à la tête de l’ambassade spéciale du roi auprès de la cour d’Ecosse, et ce clerc avait réservé à Corbett un accueil extrêmement chaleureux. Ce dernier avait tout de suite éprouvé de la sympathie pour Benstede, dont il connaissait la réputation de loyauté à toute épreuve envers le roi Edouard, qui lui confiait les missions diplomatiques les plus délicates. Benstede avait une silhouette rondouillarde, des cheveux blancs comme neige et un visage poupin d’angelot qui dissimulait une intelligence aiguë d’homme de loi. Il avait accepté, heureusement sans hésitation, l’explication de Corbett, selon laquelle Burnell l’avait envoyé à Édimbourg à cause de la crise traversée par la cour d’Écosse.
    Se levant, Corbett s’emmitoufla dans sa cape et se mit à faire les cent pas dans la pièce nue et lugubre. Burnell l’avait convoqué à Westminster {2} à la fin mars pour lui annoncer abruptement que, par suite du décès mystérieux et soudain du roi Alexandre III d’Écosse, le clerc devrait se rendre à Édimbourg pour découvrir la cause réelle du décès. Corbett avait eu beau supplier, plaider, pousser des hauts cris et lancer force

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