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La couronne de feu

La couronne de feu

Titel: La couronne de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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serait contraint de vous absoudre, ce qui rendrait ce procès sans objet.
    – Je comprends... soupira Jeanne, mais je ne suis pas l’hérétique qu’il imagine. Oserai-je vous demander à vous de m’entendre en confession, puisque vous êtes prêtre ?
    – Ma fille, je n’en ai pas la permission. Je n’ai pas celle non plus, d’ailleurs, de m’entretenir avec vous. Pardonnez-moi, je dois me retirer...
    Jeanne mangea la moitié de la carpe de bon appétit et laissa ce qui restait à ses gardiens.
    – Pourquoi ne pas l’avoir mangée entièrement ? lui demanda Berwoit. Craindrais-tu que l’évêque veuille t’empoisonner ?
    – C’est que je n’avais plus faim, dit Jeanne.
    Elle s’endormit dès l’ Ave Maria du soir. Peu après, réveillée par de violentes douleurs au ventre, elle appela ses gardiens pour qu’ils la conduisent aux latrines.
    – On a voulu m’empoisonner ! gémit-elle. Faites venir un médecin.
    – Demain, à la première heure, c’est promis, dit Berwoit.
    Elle passa la nuit entière à se tordre sur son grabat. Le lendemain à l’aube maître Desjardins, médecin du château, était à son chevet, alerté par le gouverneur qui lui confia :
    – Maître Guillaume, il faudra faire appel à toute votre science pour guérir cette fille. Elle ne doit pas mourir d’une quelconque maladie. Nous l’avons payée trop cher pour qu’elle nous échappe d’une manière aussi banale. De crainte que vous ne tombiez sous le charme de cette diablesse je vais vous faire accompagner du chanoine Jean d’Estivet qui doit dire la messe ce matin dans notre chapelle.
    – Je suis médecin, protesta Desjardins, et la sorcellerie n’a aucune prise sur moi !
    Muni de sa trousse, ce petit homme sec comme un fagot, affligé d’une claudication qui lui donnait l’allure d’un gros oiseau blessé, ordonna sèchement aux gardiens de se retirer, de fermer la porte, et au chanoine de tourner le dos. Il pria Jeanne d’ôter son pourpoint et sa chemise, et s’exclama en feignant la répugnance :
    – Ce que tu peux puer, ma fille ! Tu ne fais donc jamais ta toilette ?
    – Lorsqu’on m’y autorise, dit-elle, et ce n’est pas tous les jours. Quant à donner mes vêtements à laver, je m’y suis opposée, de crainte qu’on ne me les rende pas ou qu’on ne me donne à la place des habits de femme qui me protégeraient mal du harcèlement des houspilleurs chargés de ma garde.
    – Je comprends tes craintes, dit maître Guillaume. On n’a pas choisi de confier ta garde à des anges...
    Tout en parlant et en l’auscultant il marmonnait dans sa barbe, tantôt en français, tantôt en latin comme s’il priait.
    – Tu as une forte fièvre, dit-il, mais tes jours ne sont pas en danger. Une bonne saignée te remettra d’aplomb en quelques jours. Qu’as-tu mangé qui ait pu t’indisposer à ce point ?
    Elle lui parla de la carpe ; le médecin fronça les sourcils.
    – Une carpe, vraiment ? Sûrement pas de la première fraîcheur...
    – Si fait, et même excellente. Mes gardiens ont mangé la moitié que je leur ai laissée et n’ont pas été indisposés.
    – Bizarre... bizarre... marmotta-t-il. Alors il faut croire que...
    Il n’alla pas jusqu’au bout de sa pensée, de crainte d’être surpris par d’Estivet, mais sa conviction paraissait établie : on n’avait pas voulu faire mourir la prisonnière mais simplement diminuer son énergie pour mieux la maîtriser dans la suite du procès.
    Lorsqu’il eut pratiqué la saignée, le chanoine se retourna en s’écriant :
    – Cette garce est de la dernière mauvaise foi ! Elle répond à la générosité de monseigneur l’évêque par des accusations mensongères. Si tu crois, ordure, que cette carpe était empoisonnée, eh bien ! dis-le haut et fort !
    – Laissez cette malheureuse en paix ! protesta le praticien. Cette fille est malade pour avoir consommé une nourriture suspecte. De plus, elle est mal nourrie et manque des soins qu’on ne refuserait à aucun criminel.
    Il annonça qu’il reviendrait quelques jours plus tard pour effectuer une nouvelle saignée si la santé de sa patiente ne s’améliorait pas.
    – Je m’y oppose ! Cette catin en profiterait pour tenter de mettre fin à ses jours ! grogna le promoteur.
    – Absurde ! protesta Desjardins. Vous êtes peut-être le médecin des âmes, mais je suis celui des corps. Laissez-moi faire mon métier.
    Il dit à Jeanne :
    – Il faut que tu te reposes. Je vais demander à tes

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