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La couronne de feu

La couronne de feu

Titel: La couronne de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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qu’il en est de l’enquête engagée auprès des gens du Barrois, concernant la moralité de la Pucelle ?
    – J’en suis fort mécontent ! J’ai envoyé ces clercs afin qu’ils me rapportent des témoignages à charge et ils prétendent n’avoir rien trouvé qui puisse être imputé à cette garce. Je compte bien apporter à leur rapport quelque accommodement qui modère leur indulgence. À qui se fier, mon Dieu ?
    – Pardonnez-moi ! protesta le dominicain, mais est-ce là le beau procès dont vous parlez ? Ne sommes-nous pas chargés de faire la vérité sur la coupable et non la travestir ?
    Le prélat eut un sourire crispé avant de riposter :
    – La vérité, mon très cher frère, est comme les femmes : éminemment mutabile ! Il faut l’utiliser au moment le plus favorable, en évitant de se poser des problèmes de conscience. Pour moi il n’est qu’une vérité : il faut à tout prix faire condamner Jeanne. Pour cela, sachez que je ne reculerai devant rien. Le Régent, le cardinal, toute l’Angleterre n’accepteraient pas que Jeanne pût leur échapper...
    Bien que conscient que l’évêque était au bord d’une colère dont les prémices embrasaient son regard, Jean Lemaître osa néanmoins une ultime question :
    – La coupable devra être défendue par un avocat. C’est la règle dans les procès d’Inquisition. Qui avez-vous prévu ?
    – Personne ! grogna l’évêque. L’accusée se défendra elle-même. Elle en est fort capable.
    Il ajouta en donnant congé au dominicain :
    – Dites-vous bien que ce procès est MON procès et que j’entends le mener à ma guise... avec votre appui, bien entendu.
    Jean Lemaître quitta l’hôtel Saint-Cande le corps en sueur et le feu aux joues en se répétant qu’il devrait, pour la sérénité de sa conscience, refuser de donner son accord à cette parodie de justice : il pourrait toujours, pour excuser son absence, alléguer d’un problème de territorialité, le procès se déroulant en territoire emprunté .
     
    Nicolas Bailly, tabellion champenois licencié en théologie, avait, à la demande de Pierre Cauchon, accepté de diriger les investigations d’un groupe de clercs dans le Barrois afin d’apporter au dossier de la Pucelle de quoi la confondre. Quelques semaines plus tard il rapportait une moisson décevante, Jeanne étant quasiment réputée irréprochable.
    Fureur de l’évêque...
    – Il n’y a dans ce rapport, maître Nicolas, rien qui puisse m’aider à fonder une accusation solide. Jeanne, si j’en crois cette enquête, serait une sainte fille, une créature céleste, une enfant docile, une héroïne au grand coeur, que sais-je encore ?
    – Nous nous sommes, monseigneur, bornés à relever une quinzaine de témoignages selon vos consignes. Or je n’ai rien trouvé sur l’accusée que je n’eusse aimé voir dans ma propre soeur.
    – Certes... certes... Nous allons donc arranger cela. Jeanne, croyante sincère, dit ce rapport ? Nous allons démontrer que sa foi n’était qu’apparence. Ses rondes autour de l’arbre « sacré » n’étaient que pratiques de magie ! Son séjour à Neufchâteau... voilà qui est intéressant. Elle était servante d’auberge ? nous en ferons une catin, et de la Rousse, sa patronne, une maquerelle ! Pourquoi se rendit-elle fréquemment auprès de Baudricourt et de sa garnison ? parce que c’était une fille à soldat ! Et que dire de la promesse qu’elle a faite à ce brave procureur de Toul de l’épouser ? C’est une imposture pure et simple ! Prétendre qu’elle était soumise à ses parents est un mensonge : elle a fui sans leur permission avec un groupe de soudards qui ont abusé d’elle à l’envi...
    – Je vous en demande pardon, monseigneur, mais Jeanne est toujours vierge à ce que j’ai entendu dire.
    – Vous avez raison, maître Nicolas. Passons ! Mais... je ne vois pas trace de mandragore dans votre rapport. N’aurait-elle jamais usé de cette plante pour jeter des sorts ?
    – Ma foi, nous n’en avons pas trouvé trace.
    – C’est que vous avez mal cherché ! La mandragore va de pair avec l’arbre prétendument sacré, la fontaine aux fées... Cela fait toujours impression dans un procès. En résumé, nous allons proclamer que Jeanne a dit, fait et perpétré nombre de méfaits, crimes, péchés et délits honteux, cruels, scandaleux, déshonorants. En quelque sorte qu’elle n’a cessé de pécher contre la foi.
    – Monseigneur, fit mine de s’extasier

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