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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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anneau d’or, une gemme de couleur bleue, assortie à la huque fourrée dont le prince s’était vêtu.
    – Il semble réjoui de l’issue des débats.
    Tristan acquiesça d’un mouvement du cou : il regardait les grands hommes liges, vêtus de velours et de soie, d’écarlate et de camalin blanc, tous enjoués comme si, ayant assisté au Jugement dernier, ils y avaient appris le pardon de leurs fautes.
    – Qui sont-ils ?
    – Il n’y a pas que des gens du Parlement. Il y a ceux qui sont venus voir, d’autres se faire voir ne serait-ce que dans la galerie où nous sommes… Mail lard, bien sur qui s’efforce de nettoyer sa conscience et ne parvient qu’à l’assombrir. C’est cet homme en gamache noire, là-bas… Tiens, Tancarville… Et là, cette calette en velours purpurin : Geoffroy le Meingre, frère du maréchal Boucicaut. Il est évêque de Laon, élu à la place de Robert le Coq, l’âme damnée du Mauvais qui a fui en Espagne.
    – Pur… purin ?
    – Pas lui… Hugues de Châlon, le Vert Chevalier (359) … Monseigneur d’Étampes et Yves Derain, notaire et secrétaire du prince Charles qui l’a anobli l’an passé. Regarde : il avait tout du corbeau, le voilà désormais qui se prend pour un paon… Simon de Roucy, comte de Braisne (360) Je le croyais otage en Angleterre : il y a peu qu’il en est revenu… Pépin des Essarts…
    – Qui m’est suspect, dit Tiercelet.
    Tristan acquiesça et reprit :
    – Louis, vicomte de Beaumont, maître d’hôtel de monseigneur Charles (361) … Et voilà le plus beau… Ah ! Il s’est mis en frais…
    C’était Guesclin, chaperonné de vermillon, près duquel marchait Olivier de Mauny tout aussi indigné que le cousin Bertrand. Ils se ressemblaient : têtes rondes, faces larges. « Si la lune était rouge, elle paraîtrait leur mère ! » Grosses bouches, mentons courts ; des cous de taurillons. Ils avaient revêtu leurs habits du dimanche. On les y sentait engoncés. Leur paletoc à col fourré leur tombait aux chevilles. Ils n’avaient pas cru bon de ceindre leur épée.
    –  Tiens, te voilà, toi… Ca… Ca…
    C’était une indécision volontaire. Et vulnérante. Tristan fit en sorte d’en rire.
    – Castelreng… Comment vas-tu ? Es-tu satisfait ?
    – Non… Lui, qui c’est ? Ton écuyer ? L’autre est mort ?
    – Mon ami Tiercelet de Chambly.
    – Chambly !… Les mailles de Chambly !… On en fait de meilleures en Bretagne…
    Tiercelet ne broncha pas. Son métier de mailleur était loin derrière lui.
    – Avez-vous vu ?… Felton a été déboutonné de sa requête !
    – Débouté, dit Mauny, fâché de cette erreur.
    – Soit, cousin, débouté… Nous ne nous devons rien. J’aurais voulu l’occire… Que fais-tu, Castelreng dans cette livrée ?
    – Service de monseigneur le dauphin.
    Guesclin eut un rire éraillé, « supérieur » et comme menaçant dans sa superbe. Si sa faconde s’était tarie il riait avec une fougue terrible, endiablée, tout en grommelant un jargon où quelques mots bretons parsemaient le français.
    –  N’aimerais-tu pas plutôt guerroyer avec moi ?
    – Guerroyer, si… Je ne vois donc pas ce que je ferais avec toi !
    Guesclin grimaça. Il devait avoir, en toute chose une sorte de féroce passion de l’essentiel – et l’essentiel, pour lui, c’était d’occire. Sa grimace révélait, sans ambiguïté, qu’il s’indignait. Il détestait qu’on lui résis tât, même en usant de mots ordinaires – les seuls qu’il put comprendre.
    J’ai été le témoin de ta façon de batailler.
    – Je gagne mes batailles !
    – C’est pourquoi le dauphin te considère comme la nouvelle incarnation du dieu Mars… Pour moi, tu… nous ne sommes qu’en février.
    Guesclin se mit à rire. Le son se répercuta d’une façon sinistre sous la voûte de la galerie dépeuplée.
    – Près de moi, tu irais de victoire en victoire. Loin de moi tu n’es rien qu’un manant en livrée !
    Sur cette pique acérée, le Breton entraîna son cousin et ses hommes – une douzaine ceints de leur seule épée. Tous allaient pede presto comme au-devant d’une nouvelle embuscade.
    Soudain, Bertrand s’arrêta pour le plaisir de faire front et de brandir son poing. Il l’avait gros et noir comme un frappe-devant.
    *
    Le mois de mars fut tout aussi rigoureux que les précédents. Après une journée morose, soit au Louvre, soit à Vincennes – dans l’immuable

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