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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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dépourvus de bon sens imaginaient déjà que le Breton connaîtrait le sort enviable de Charles d’Espagne qui, passant par la couche du roi Jean, était devenu connétable.
    *
    Le 13 avril, on apprit la reddition de la dernière tour de Meulan (365) . Tout danger disparu – car il eût pu mourir transpercé par une sagette comme Richard Cœur de Lion à Châlus –, le dauphin décida de se rendre sur les lieux où ses hommes d’armes avaient vaincu, on le savait désormais, des manants et des bourgeois mal armés, sans aucune expérience de la guerre. Laissant Tiercelet, Paindorge et Matthieu à La Main d’argent, Tristan dut accompagner l’héritier du trône et quelques antrustions sans savoir quels chemins ils avaient décidé d’emprunter.
    –  Monseigneur Charles va complimenter les Bretons, dit Bohémond, un des rares soudoyers admis parmi les prud’hommes. Car il n’y a pas que Guesclin !
    Toujours imprévisible, le dauphin décida d’une visite au château de Vernon. Là, vivait la reine Blanche. Fille de Philippe d’Évreux, frère du Mauvais veuve de Philippe VI, elle tenait compagnie à Jeanne de Navarre dont Tristan ignorait de laquelle il s’agissait : il y avait tant de Jeannes à l’entour de la Couronne que les plus proches courtisans du dauphin s’y perdaient. Cependant, à ouïr quelques propos, il comprit que monseigneur Charles avait décidé de visiter sa sœur, épouse de Charles II, son ennemi.
    D’emblée, il ne sut rien de ce qui s’était dit, mais lorsque le régent remonta difficilement sur son palefroi docile comme une haquenée, il devina qu’il y avait de la déception dans l’air : l’héritier du trône avait le visage d’un joueur ayant perdu toutes ses mises.
    – Tudieu ! dit-il simplement sans oser, de sa main valide, ébaucher un signe de croix qui lui eût fait lâcher les rênes.
    Quand il eut parcouru une demi-lieue, le régent brisa enfin son silence et sa voix chevrota non de froid mais de rage :
    – Avez-vous ouï, Boucicaut, ce qu’elles m’on dit ?
    – Oui, monseigneur.
    – Que c’était l’honneur des dames de s’indigner contre les actes des malandrins à la solde du royaume et d’accabler de leur mépris la bestialité placée au service de la rapine… Qu’elles haïssent la force assez répugnante pour écraser la faiblesse innocente… C’est bien ce que m’a dit ma sœur ?
    – Oui, monseigneur.
    – J’ai pris acte de ces propos… Elles vont l’une et l’autre savoir qui je suis !… Il me déplaît qu’elles contestent mon autorité et fassent référence au roi mon père (366)  !
Oui, monseigneur.
    Boucicaut semblait las des chevauchées qu’il avait accomplies entre Rolleboise, Mantes et Paris ; las également des propos d’un prince qui préférait un rustique coureur d’aventures à tous ceux qui composaient la fleur de la Chevalerie du royaume.
    – Où allons-nous, monseigneur. N’avez-vous point trop froid ?
    On piéta lentement jusqu’aux abords de Meulan. Les assaillants en étaient partis. Du haut de leurs murailles, quelques manants lancèrent des pierres en direction de ces nobles hommes de France qui ressemblaient aux meurtriers de leurs parents. La vue de la bannière du prince Charles provoqua des huées. Des poings menaçants s’élevèrent. Le dauphin sourit aigrement :
    –  Veni, vidi, vici, dit-il.
    Tristan trouva qu’il eût dû inverser les mots : vici, vidi, veni. Il avait vaincu, certes, il avait vu, certes, mais il n’avait pas assisté aux meurtres dont on parlait ouvertement à Paris. Enfin, s’il était venu, c’était avec l’intention d’accomplir ce détour par Vernon d’où il était reparti vergogneux et peut-être infecté de haine : deux femmes, et non des moindres, lui avaient donné la leçon.
    Une pierre lancée par un frondeur vrombit aux oreilles du prince. Une autre atteignit le poitrail de son palefroi qui se cabra. Le bras de Boucicaut évita une chute malencontreuse pour la réputation d’un homme qui n’était même point à l’aise lorsqu’il se prétendait à cheval sur les principes. Il fut pris tout à coup d’un courage bizarre :
    – Nous allons entrer, messires, et ils vont voir !… Ah ! Ils demeurent fidèles au comte de Mantes !… Ah ! Ah ! Ils vont savoir qui je suis…
    Boucicaut se tourna vers Tristan :
    – Demeurez à la surveillance des portes… Aucun manant ne doit s’enfuir.
    Tristan accepta. Quelque chose

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