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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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contre le mien, une grosse boule dans la gorge.
    Elle tourna les talons sans plus me jeter un regard, m’adressa un baiser de la main, de dos, sans se retourner et elle disparut.
    Je pensais ne plus jamais la revoir. Il ne me restait d’elle, ce soir-là, que moult délicieux souvenirs et un évanescent parfum de bois de santal.
     
     

     
     
    Le lendemain à la première heure, je galopai à brides retenues vers la ville de Nicosie. Il bruinait. Le sol était glissant Mon coursier trébucha à plusieurs reprises et je faillis bien verser cul par-dessus tête.
    Parvenu au monastère, le chevalier de Montfort nous informa que nous levions le camp pour Famagouste, dès le lendemain. Le mestre-capitaine lui avait fait savoir que les deux nefs et la sienne, avec lesquelles nous devions naviguer de conserve, étaient radoubées et prêtes à appareiller dans les deux jours après avoir embarqué de nouvelles cargaisons de produits d’Orient.
    Nous prîmes congé des frères mineurs qui nous avaient accueillis si généreusement en leur monastère. Arnaud les remercia particulièrement et non sans hypocrisie, pour lui avoir apporté dans des moments pénibles, paix et sérénité au cours de ces mois. Il les complimenta pour la qualité de leurs offices et de leurs chants. J’y vis toutefois là de belles dispositions pour me réconcilier prochainement avec lui, bien que je doutasse forte ment de la sincérité de ses propos.
    Foulques de Montfort leur bailla de généreuses aumônes pour leurs pauvres, dont ils le remercièrent avec chaleur, non sans nous avoir bénis en retour.
    Pendant que le chevalier de Montfort s’affairait à régler les derniers préparatifs de notre embarquement qui avait été retardé de cinq jours, Arnaud vint vers moi. Il me mit le bras autour des épaules et m’entraîna à l’écart. Il resta un long moment silencieux. Il avait quelque chose à me dire.
    « Pardonne-moi, Bertrand, je reconnais tout à trac avoir eu quelques paroles malheureuses à ton endroit. Au fond, j’avais mérité la gifle que tu m’as administrée. Bien qu’il m’en cuise encore. Me pardonnes-tu ?
    — Oui, Arnaud, bien sûr. Mais reconnais qu’il me sera difficile d’oublier certains mots.
    — Qui pardonne sans oublier, ne pardonne point.
    — Je ferai tout pour les oublier, je te le promets. Laisse-moi un peu de temps. Tu sais bien que tu es mon seul ami et que je t’aime comme un frère. Comme un compain d’armes aussi. N’avons-nous pas combattu les Godons côte à côte dans les faubourgs de la Madeleine à Bergerac, puis à Auberoche ?
    — Oui, et tu as fait preuve de grande vaillance, je le reconnais.
    — Or donc, évitons dorénavant de lancer des traits qui blessent plus mortellement qu’un carreau d’arbalète, rétorquai-je, les muscles du col plus noués que les racines d’un vieux chêne.
    Même sous l’effet de la colère. La colère est une drolasse qu’il est difficile de maîtriser. Mais elle est toujours mauvaise conseillère.
    — Les mois pendant lesquels Montfort m’a reclus m’ont paru durer une éternité. Je lui en veux beaucoup, une aussi longue punition, à mon âge ! Pour un déguisement ! Une espingale ! Une farcerie ! dit-il avec outrecuidance.
    — Par Saint-Denis ! Une farcerie qui a bien failli nous coûter la vie à tous trois !
    — La princesse Échive, ta mie, aurait bien fini par nous innocenter.
    — Peut-être. Probablement trop tard.
    — Oublions cette affaire sans intérêt
    –……
    — Les meilleurs souvenirs que je garderai de notre séjour sur cette île sont ceux de nos chevauchées, au printemps. T’en souviens-tu, Bertrand ? »
    Ces mots me réchauffèrent le cœur que j’avais froid et sec. Le réchauffèrent sans l’enflammer. Serait-ce parce que je doutais au fond de moi de l’amitié que me portait Arnaud ? De ce trop rapide changement d’attitude à mon égard ?
    L’avenir le dirait. En vérité, je n’allais pas tarder à être fixé
    « Au fait, as-tu pris du bon temps avec Échive ? Une baise royale ! J’aurai bien aimé être à ta place…
    — Ne parle pas en ces termes de la princesse, je te prie. C’est une gente damoiselle. Courtoise et savante.
    — Moi, vois-tu, je n’ai pas eu besoin de mugueter Raïssa pendant des lustres pour la biscotter. Tiens, le jour où Montfort nous avait invités au supplice de ces deux coquardeaux d’écuyers, j’ai profité de mon après-midi de liberté

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