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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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Montfort, plus grise pour frère Jean, plus blonde pour moi.
    Nous ne pouvions bien évidemment pas recourir à bord aux services de notre barbier. Il rasait d’autres barbes en d’autres lieux. Avec les quatre nouveaux écuyers et les six pages qu’avait recrutés le baron de Beynac, il ne devait point chômer, notre barbier préféré ! Les sentences en latin dont il ponctuait ses phrases me manquaient aussi.
    La barbe d’Arnaud devait être châtain clair. Mais Arnaud était toujours en cale sèche. Sa paillasse restait vide. Le chevalier l’aurait-il oublié ? Ce serait peu dire qu’il n’avait pas apprécié d’entendre traiter de bagasse égyptienne, Joseph, le protégé de son ancêtre, le comte Philippe de Montfort.
    Une heure ou deux plus tard, nous surgîmes tous les trois à peu près au même instant sur le pont et nous esbouffâmes : nous portions de légères entailles sous les oreilles et le bas du visage, encore fraîches. Le léger tangage de la nef avait rendu le maniement du rasoir, délicat et inconfortable. Et les lames étaient émoussées.
    Frère Jean s’était contenté de se raser sans changer de robe. Moi aussi. J’avais changé de chemise et de chausses, mais point de surcot. Ne disposant, en ce qui nous concernait d’aucun sauf alant et venant pour pénétrer en la ville de Tyr et nous rendre au comptoir génois de la place, nous ne pouvions ni l’un ni l’autre accompagner Foulques de Montfort.
    En revanche, ce dernier était à présent sanglé dans un long pourpoint gris de marchand, aux manches bouffantes et aux extrémités doublées d’une bande de fourrure de castor du plus beau bistre.
    Son doublet de laine bleue était garni d’une doublure de lin blanc, fermé par des boutons d’étain. Il mettait discrètement en évidence les poignets d’une chainse qui étaient d’un blanc plus éclatant que l’amidon.
    On ne disposait bien évidemment pas d’amidon à bord, mais l’eau de mer dans laquelle elle avait été nettoyée par les mousses avait déposé de fines particules de sel d’un blanc un peu raide mais du plus bel effet.
    Un chaperon de feutre orné d’un écusson tissé aux armes des marchands de Gênes le coiffait avec élégance. Ses chausses rouges, nouées sous la tunique par des jarretières, s’inséraient par des pattes glissées sous les pieds dans de coûteuses bottines en cuir de veau brunes et souples.
    En guise d’armes et de munition, il portait, accroché à sa ceinture, un petit cotel de table, une grosse aumônière de cuir bien gonflée, décorée et patinée par le temps, et un trébuchet, sorte de petite balance permettant de peser la valeur des monnaies en leur poids d’argent.
    Bref, tout l’aspect du riche marchand génois qu’il n’était pas. Sa haute stature, sa grande noblesse, son air fendant et hautain, ses traits burinés en imposaient. En imposaient peut-être un peu trop, mais que diable, on ne se refait pas !
     
    « Messire Foulques, quelle prestance ! Ces habits doivent valoir leurs besants d’or ! » m’exclamai-je, en me permettant un jeu de mots facile. Le chevalier se contenta d’esquisser un léger sourire et nous dit :
    « Cette fois, nous approchons du but : la famille Al-Hâkim tient comptoir de change et de courtage en la ville de Tyr et je ne tarderai pas à récupérer le trésor de mes ancêtres ! Je possède ici le document original revêtu des doubles seings et des sceaux de Joseph et de Philippe de Montfort, qui attestent mes droits de propriété », déclara le chevalier en portant une main sur sa bourse.
    — Croyez-vous, messire Foulques ? En êtes-vous vraiment sûr ?
    — Évidemment, frère Jean : mes informations sont précises. En douteriez-vous ? Aux dernières nouvelles…
    — Aux dernières nouvelles ? À quand remonteraient ces dernières nouvelles ?
    — Cela ne vous regarde point ! » répondit sèchement le chevalier de Montfort. Puis se ravisant :
    « Allons, allons, frère Jean. Ne gâtez point une aussi belle journée par des propos aussi déplacés que décourageants ! Soyez confiant. Bien qu’au fond, cela vous importe peu, n’est-il pas ?
    — Pardonnez, mais cela m’importe plus que vous ne pouvez l’imaginer. Je ne doute pas de l’existence de quelques biens que vous revendiquez ici-bas. Je doute seulement de l’usage qui pourrait être fait d’iceux.
    — Je reconnais bien là votre esprit de charité, ironisa le chevalier, un pli

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