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La dernière nuit de Claude François

La dernière nuit de Claude François

Titel: La dernière nuit de Claude François Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bertrand Tessier
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Finalement, il est content que « la Petite », comme il l’appelle, soit de retour dans son giron. Roi du licenciement abrupt, il aime passer l’éponge et réengager. Précurseur dans son métier, il déteste la nouveauté dans son entourage : il aime être avec les siens.
    Dans quelques instants, il se retrouvera seul avec Kathalyn. Leurs corps se frôleront, leurs cheveux dorés s’entrelaceront.
    Quand ils sont ensemble, il est toujours heureux. Avec elle, les choses sont simples, limpides, évidentes. Elle n’entre pas dans son jeu pervers du conflit permanent. Elle l’a encouragé à se rapprocher d’Isabelle, la mère de ses enfants : ils ont même passé le dernier Noël tous ensemble, au moulin. Élevée dans la Californie du flower power , le mot « jalousie » lui est inconnu. Elle ne se formalise pas de ses incartades et ne lui met pas la pression pour se marier ou avoir des enfants.
    Elle est douée pour le bonheur.

    Dès son arrivée à Paris, Claude a appelé Josette :
    — Alors ?

    Avec lui, il valait toujours mieux évoquer l’effet que la cause…
    — Tes poissons vont bien. Je viens d’avoir maman : ils ont parfaitement résisté.
    Tout l’après-midi, elle s’était démenée pour que l’électricité soit rétablie. Pour n’importe quel autre abonné, il aurait fallu patienter le week-end mais, pour Claude François, on avait fait une exception. En fait, les fonctionnaires n’avaient jamais imaginé qu’il s’agissait du vrai Claude François : le chanteur avait tellement d’homonymes.
    — Donc, demain, on se retrouve au moulin. On sera une quinzaine. Avec un peu de chance, on pourra déjeuner dehors.
    Mercredi, avant de partir, il lui a envoyé une note de service :
    N’oublie pas de dire à Lazo de sortir un à un tous les meubles de la piscine, de bien les nettoyer, ainsi que les trois fauteuils en bois qui se trouvent au-dessus de la chambre des machines. Il faudra même penser au barbecue un de ces jours.
    Elle le rassure, elle a anticipé ses ordres, même le barbecue est en état de marche. Pour lui mettre un peu de baume au cœur, elle lui annonce fièrement :
    — Quand tu arriveras, tu seras content.
    — Pourquoi ?
    — Tu verras…
    — Non, dis-moi !
    — Le magnolia que t’a offert Kathalyn est en fleur.
    — J’ai hâte de le voir. À demain !
    À peine a-t-elle raccroché qu’elle appelle sa mère, malgré l’heure tardive. Non pour lui confirmer le dîner du lendemain, elles l’ont parfaitement anticipé, mais pour la rassurer.
    Car, ce vendredi matin, Chouffa a appelé sa fille.
    — Écoute, je ne suis pas tranquille. J’ai fait un rêve…
    Josette a tendu l’oreille : dans la famille, les rêves de Chouffa ont la réputation d’être prémonitoires.
    — J’ai vu Claude noyer un bébé dans la baignoire de son appartement. Je tentais de l’en empêcher, je lui disais : Tu es fou, tu vas le tuer, laisse cet enfant. La chambre était emplie de monde, Claude continuait à s’acharner sur le nourrisson. Je lui disais : Arrête, toi qui aimes tant les enfants. Ensuite, je me suis réveillée. Josette, je n’aime pas ce rêve, je suis inquiète…
    Cette nuit, Josette rappelle donc sa mère.
    — Il est arrivé, le voyage s’est bien passé. Ne t’inquiète pas.
    Sa mère la coupe :
    — Dans ce cas, il faut attendre quarante-huit heures. Attendons samedi soir…

Samedi
11 mars 1978

    C’est chez lui un réflexe : quand il ouvre les yeux, il regarde le rai de lumière qui dépasse des rideaux de velours. Plus il est faible, plus le temps est nuageux. L’enfant d’Ismaïlia n’a jamais réussi à se résoudre à la lumière torve de la grisaille parisienne. S’il aime autant vivre la nuit, c’est peut-être pour y échapper…
    Cette journée de samedi s’annonce bien : lorsque Marie-Thérèse Dehaeze, son attachée de presse, entre dans la chambre pour le réveiller sur le coup de midi et demi, il remarque tout de suite la belle lumière qui s’infiltre entre la corniche et le rideau. Il en est sûr, il fait beau. Ses vêtements enfilés, il monte le petit escalier qui conduit à la terrasse et penche la tête en arrière pour profiter pleinement des rayons du soleil. Le beau temps le galvanise. D’une certaine manière, il envie Isabelle, la mère de ses enfants, qui vit dans le sud de la France. À une époque, il avait même acheté un bateau, L’Ismaïlia, mais avait fini par le revendre. Perpétuellement

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