La dottoressa
de quelque chose, pas la peine d’essayer.
Rien à faire. Je suis comme ça, et pas près de changer. Pour finir, Maman s’est
rendu compte que c’était inutile. Alors, bien entendu, ça a fait scène sur
scène : « Tu ne penses qu’à galoper partout avec ce Max Adler, c’en
est indécent ! »
Mais maintenant que j’étais à l’université, adieu, plus
question du petit Adler, les choses suivaient un tout autre cours à présent. À Salzbourg,
au moment de ma matura, j’avais rencontré un certain Norbert Baudisch.
Ce Norbert Baudisch était fils d’un fonctionnaire de
Salzbourg ; il avait une bonne situation. Il est tombé amoureux de moi, et
ç’a été réciproque. Mes parents avaient loué une maison pour l’été à Grossgmain,
près de Salzbourg, et Baudisch venait tout le temps me voir… bref, j’ai eu
cette petite amourette avec Baudisch, plus ou moins avec la bénédiction de mes
parents. Ils se disaient, mes parents : « Après tout, ce garçon fait
aussi sa médecine ; rien de commun avec cet autre, Adler ; il y a
donc un petit progrès. Elle n’en a que pour cet autre maintenant, et rien ne s’oppose
sérieusement à ce qu’ils se marient peut-être, par la suite. » Sans doute
en étaient-ils sincèrement convaincus, bien que ni moi ni Norbert nous n’ayons
jamais eu le mariage en tête. Rien n’était plus loin de moi que ce genre de
projets domestiques ; les miens étaient d’une indépendance totale, mais
cette liaison représentait au moins quelque chose que les parents avaient l’impression
de comprendre – ce qui était le comble de l’ineptie, étant donné qu’ils y
voyaient à peu près aussi clair dans cette histoire que dans les précédentes.
Tandler me taquinait constamment à propos de Baudisch, et j’ai
été très méchante un jour ; c’était dans la salle de dissection, oui, et
avec la seringue qui sert à seringuer les cadavres j’ai arrosé tout le monde, et
le professeur n’a eu que le temps de prendre la porte. Tout ça à cause de ce
type, ce Baudisch. Quand je vous le dis que la Dottoressa a toujours été une
femme impossible…
Ensuite, je suis partie en vacances. Cette fois, mes parents
se montrèrent d’une confiance, à n’y pas croire ! – d’autant qu’elle
était sans l’ombre d’un fondement ; j’ignore ce qui leur a pris, mais le
fait est que je suis allée à Florence avec Baudisch.
Voilà comment ça s’est passé. Nous avions fait un tour dans
les Alpes en redescendant sur Doblach ou un nom de ce genre, dans le sud du
Tyrol. Nous étions une bande d’alpinistes. Les parents ne voient pas d’inconvénient
à ça. Mais l’alpinisme fini, nous sommes montés tous les deux dans un
compartiment de train, parce que nous avions envie de visiter l’Italie et d’aller
à Florence.
À Florence je suis descendue à la Pensione Daddi. C’était là
que mes parents m’avaient dit d’aller, sauf que Norbert Baudisch y était
également et qu’ils étaient loin de s’en douter. Et nous avons fait tout ce qui
se fait d’habitude à Florence, visité les Giardini Boboli et autres ; après
quoi, comme de bons petits enfants sages, nous sommes rentrés.
Naturellement, je m’étais précipitée dans tous les musées. Je
ne parlais que très peu l’italien en ce temps-là. Pas trop, juste ce qu’on
apprend dans les grammaires. Ça ne fait rien, c’était plus que n’en savait
Baudisch : lui, n’en connaissait pas un traître mot. Oui, ç’a été mon
premier voyage en Italie et le pays ne m’avait pas terriblement impressionnée. Pour
les vacances de l’année suivante, je suis allée plus loin – jusqu’à Rome ;
mais pas avec Baudisch. Non, non… déjà c’était autre chose.
C’est avec un dénommé Tolleg que j’ai été à Rome l’année d’après.
Un Français. Une miniature de petit bonhomme. Encore très jeune, cela dit. Il
était peintre. Enfin… pas véritablement. Caricaturiste. Et maladif avec ça. Un
pauvre diable, quoi. Ça, je me le rappelle. Et avec lui je suis allée au café
Greco, et pataci et patalà, et visiter les musées. Et puis il y avait un autre
confrère médecin le docteur Beck, que je continue à voir. Lui aussi était à
Rome, et très intéressé par Tolleg ; ils sont devenus de grands amis.
Moi, en revanche, leur Rome, je ne pouvais pas la voir en
peinture, pas plus que ce Tolleg, et je suis partie toute seule pour Palerme. Tellement
ça m’attirait. À
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