La fabuleuse découverte de le tombe de Toutankhamon

obtiendra un objet mille fois plus précieux, archéologiquement parlant, que la poignée de silex auquel il se serait réduit autrement. Ce n’est là qu’un exemple de l’importance du travail sur le terrain ; nous en aurons d’autres, plus frappants, à rapporter, quand nous en arriverons aux diverses catégories de matériel.
    Une dernière chose. En notant la position exacte d’un objet ou groupe d’objets, on se procure les moyens de trouver ailleurs un objet similaire. C’est le cas, notamment, pour les dépôts de fondations. Dans chaque construction, l’arrangement des dépôts suit un ordre régulier et, quand on en a trouvé un, il est assez simple de découvrir les autres.
    Un fouilleur doit donc voir les objets tels qu’on les a trouvés ; il doit prendre des notes détaillées avant de les déplacer et, si nécessaire, appliquer un traitement pour les préserver, au moins temporairement, à l’endroit même où on les a découverts. Il est donc extrêmement important de ne pas s’éloigner du site. Pendant que le travail se fait, il faut être sur le terrain toute la journée et, à toute heure du jour, les ouvriers doivent savoir où vous trouver pour vous communiquer sans délai la moindre découverte.
    Si la trouvaille est intéressante, vous le saurez avant même qu’on vienne vous le dire. La nouvelle, en effet, se propage instantanément – surtout en Égypte – et produit un curieux effet sur l’équipe de travail. Le chantier devient plus silencieux. Les chants s’arrêtent, les conversations baissent d’un ton. Quand il s’agit d’une découverte moins importante, le comportement de l’homme qui vous apporte le message vous met tout de suite la puce à l’oreille. Il est exclu qu’il vienne directement vous dire ce qu’il a trouvé. Il se promène d’un air important, pour bien montrer à tout le monde qu’il est porteur d’un secret considérable et vous entraîne finalement à l’écart pour vous communiquer les nouvelles. Même à ce moment-là, il vous sera difficile d’obtenir de lui plus qu’une vague description, et ce n’est que lorsque vous aurez atteint l’endroit en question que vous saurez exactement de quoi il retourne. Toute cette mise en scène tient au goût qu’ont les Égyptiens du mystère pour le mystère. Le même homme racontera en détail toute l’histoire à ses amis à la première occasion, mais cela fait partie du jeu de prétendre qu’ils ne doivent rien savoir sur le moment. Mais cela s’explique aussi par l’excitation. Non pas que l’ouvrier porte un véritable intérêt aux objets eux-mêmes, mais parce qu’il les considère comme une monnaie d’échange. La plupart des fouilleurs appliquent en effet le système du bakchiche  ; c’est-à-dire qu’en plus de leur salaire ils récompensent leurs ouvriers, à chaque objet qu’ils trouvent. Ce n’est pas un arrangement idéal, mais il comporte deux avantages : d’une part, les ouvriers ne sont pas tentés d’empocher les objets, en particulier les petits, facilement dissimulables, lesquels peuvent vous être extrêmement précieux pour les datations. D’autre part, leur zèle en est stimulé et ils se montrent plus soigneux dans la manipulation de leurs trouvailles, la récompense étant proportionnée non à la valeur de l’objet, mais à son intégrité.
    Voilà quelques-unes des raisons, parmi tant d’autres, qui rendent la présence sur le terrain indispensable. Et même lorsqu’on ne trouve rien de très remarquable, il ne faut pas croire qu’on puisse rester oisif. D’abord, chaque tombe, chaque construction, chaque mur en ruine, doit être noté et, lorsqu’il s’agit de tombes creusées dans le roc, cette étude demande pas mal de gymnastique. Leur profondeur peut varier de trois à trente-cinq mètres, et j’ai calculé un jour qu’au cours d’une seule saison j’avais grimpé à la force des bras huit cents mètres de corde. Puis, il y a les photos à prendre. Chaque objet de valeur doit être photographié avant d’être déplacé et, le plus souvent, il faut en prendre plusieurs séries pour enregistrer les différents stades du déblaiement. On gaspille ainsi quelques pellicules mais, quand un problème se pose, le moindre négatif peut devenir un document précieux. Il est également essentiel de photographier l’objet sous tous les angles, et c’est peut-être là le travail le plus fastidieux du prospecteur. Il m’est personnellement