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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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de prières et de béatitudes sans travailler la terre !
    — C’est le ciel qui récompense ma vertu, dit sœur Philomène.
    Et jetant l’une sa bêche, l’autre sa serpe, elles rentrèrent dans l’intérieur du couvent. Il y avait entre ces deux femmes une sorte d’association : elles avaient mis en commun le gain et le dommage — et surtout leur misère, mais Mariange, rusée finaude et matoise, trouvait toujours à manger là où sa compagne mourait de faim ; comme dans toutes les associations possibles, l’une des deux parties était sacrifiée, l’autre s’engraissait à ses dépens. Mariange, donc, parvenue dans le réduit où deux mauvaises paillasses servaient de couchettes aux deux religieuses, s’accroupit, versa dans son giron le contenu de la bourse et se mit à compter à doigts tremblants. C’était une fortune !
    Et déjà la matoise cherchait le moyen de frustrer sa compagne de la part qui en toute justice eût dû lui revenir. Mais Philomène, moins pratique, allait et venait, songeant à ces étrangers et surtout à quelqu’un dont la noble prestance l’avait vivement frappée et qu’elle n’avait cessé d’examiner du coin de l’œil. Ce quelqu’un, c’était le magnifique Croasse. Elle maugréait, grommelait, et enfin, n’y tenant plus :
    — Je suis curieuse, oui ! curieuse comme une pie, puisse le Seigneur me le pardonner ! Il faut que je sache ce que ces gens sont venus faire !
    — Courez-y, dit sœur Mariange. En cas pareil, la curiosité est un devoir.
    Philomène ne se le fit pas répéter et, rapidement, se dirigea vers le vieux pavillon, tandis que Mariange s’empressait d’enfouir la précieuse bourse dans une cachette…
    q

Chapitre 25 L’ETE DE LA SAINT-MARTIN
    P endant que Charles et Pardaillan pénétraient dans le vieux pavillon, les deux laquais, c’est-à-dire Picouic et Croasse, demeuraient au dehors en sentinelles. Le premier avait été posté au pied de la brèche. Le second devait rester à l’entrée même du pavillon.
    Croasse qui, bien à contre-cœur, était passé foudre de guerre, commença par jeter tout autour de lui un regard menaçant. Et il mit la dague à la main. Il appuya cette contenance belliqueuse d’un « hem ! » sonore ou plutôt caverneux.
    Ce coup de voix creuse, ce regard étincelant et cette exhibition de dague étaient pour inspirer un salutaire respect aux innombrables ennemis dont il était convaincu que le couvent était rempli, et qui, dans son idée, lui en voulaient spécialement à cause de l’affaire de la chapelle Saint-Roch. Car Croasse n’avait jamais menti sciemment en racontant la terrible, mais imaginaire bataille de la chapelle. Les adversaires qu’il avait assommés avec un escabeau, il les avait réellement vus — dans son imagination, il est vrai. Il n’y avait pas en lui de mensonge. Il s’était bien battu, il en avait bien tué des douzaines : personnages fictifs créés de toute pièce par la peur… Mais que de récits historiques ont eu la même origine !
    Donc, Croasse était parfaitement sincère en se figurant que le duc de Guise avait juré sa perte, et avait dû aposter contre lui des bandes d’assassins. Cependant, ayant constaté que le potager, en fait d’assassins et d’ennemis, ne présentait à ses regards que de modestes herbages légumineux, il commença à se dire que le moment d’une nouvelle bataille n’était sans doute pas arrivé. Il éteignit donc le feu de son regard, et tout doucement rengaina sa dague, en murmurant :
    — Je les verrai bien toujours venir.
    En attendant, par mesure de simple prudence et pour ne pas s’exposer inutilement, il quitta à petits pas le poste où il avait été mis en surveillance et se dirigea vers un hangar où étaient remisés les ustensiles de jardinage : faible abri, mais abri tout de même. Or, juste comme il allait atteindre le hangar et s’y terrer, une ombre parut. Croasse bondit et dit :
    — Les voici !…
    Ce n’était pas l’ennemi : c’était sœur Philomène.
    — Arrêtez, pour l’amour de Dieu, s’écria-t-elle en voyant Croasse tirer un pistolet de sa ceinture.
    Croasse, voyant qu’il n’avait affaire qu’à une femme déjà âgée et paraissant toute saisie de frayeur, remit le pistolet à sa place. Et ayant constaté la terreur que son geste avait inspirée à cette femme, il commença à prendre lui-même une opinion exorbitante, bien que, dans le fond, il regrettât amèrement sa

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