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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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lit dans ce réduit, Violetta dormait toute habillée. Fausta la contempla ardemment. Lentement, elle détacha son masque et le laissa tomber à ses pieds.
    — Belle, murmura-t-elle, certes ! Une figure d’ange. Le front pur de Léonore de Montaigues et la lèvre fière des Farnèse. Elle est digne vraiment de ce héros de chevalerie qui s’appelle Pardaillan. Comme il doit l’aimer !… Et comme il doit souffrir d’être séparé d’elle !
    Ces paroles ou plutôt ces pensées firent pâlir Fausta.
    — Eh bien ! qu’il souffre donc, puisqu’il s’est mis en travers de ma route. Quoi ! j’aurais jusqu’ici marché au but sublime avec la victorieuse et sereine volonté que rien n’arrête, j’aurais passé comme l’envoyé de Dieu, courbant les têtes, brisant les orgueils, sapant les puissances, soufflant sur les trônes qui s’écroulent, chassant des rois, soulevant un royaume entier, et il se trouvera un homme, un seul, qui aura pu me dire en face : « Tu n’iras pas plus loin !… »
    Fausta palpitait. Ses mains s’étaient étendues vers Violetta, crispées, prêtes à s’incruster dans sa gorge. Et elle comprenait qu’elle se mentait à elle même. Prétextes !… Elle ne haïssait Pardaillan ni pour l’affaire de la place de Grève, ni pour l’affaire du moulin. Le haïssait-elle seulement ?…
    Ah ! elle ne le sentait que trop dans cette minute : ce qu’elle haïssait, c’était cette Violetta qu’elle supposait aimée de Pardaillan. Le sentiment qui se déchaînait en elle, c’était la jalousie !… Le marbre s’amollissait !… Le bronze de ce cœur se faisait malléable… L’envoyée de Dieu devenait une femme, et l’ange repliant ses ailes fulgurantes tombait et touchait terre.
    Fausta cacha son visage dans ses deux mains. Une douleur affreuse l’étreignit… La pire douleur… La douleur de la honte… et elle haleta :
    — Je ne suis plus moi !…C’est donc un rêve insensé que j’ai fait lorsque je me suis juré que jamais mon cœur ne connaîtrait le sentiment féminin ! C’est donc une chose impossible et surnaturelle qu’une femme puisse passer dans la vie sans aimer !… Alors que je cherche dans ma pensée l’étincelle sacrée qui devait faire de moi la guerrière de Dieu, la vierge inaccessible, je n’y trouve que le plus bas, le plus pauvre, le plus féminin des sentiments… la jalousie !… Jalouse, moi ! Grand Dieu !…
    A ce moment, Violetta s’éveilla. Elle vit ce jeune homme — Fausta était vêtue en cavalier — qui pantelait, le visage dans les deux mains, et semblait lutter contre une terrible et mystérieuse souffrance. Ses grands yeux bleus s’emplirent de pitié.
    Et elle apparut, la vivante antithèse de Fausta, tout amour, elle !… tout entière faite et destinée pour l’amour…
    Violetta ne s’étonna ni ne s’effraya de voir un jeune homme si près d’elle, la nuit. Si elle était l’amour même, elle était aussi l’innocence qui ne redoute pas le danger.
    Il n’existait pour elle qu’un homme au monde… Et cet homme, dont elle ne savait même pas le nom, elle ne le revoyait que les bras chargés de lys et de roses, répandant des fleurs sur le corps de la pauvre morte, apparition inoubliable qu’elle évoquait comme elle eût prié.
    Sa main fine toucha le bras de Fausta. Et d’une voix de compassion charmante :
    — Qui êtes-vous ? demanda-t-elle. Etes-vous comme moi une victime ?… Etes-vous… Ah !…
    Ce dernier cri soudain s’exhala dans une angoisse d’épouvante et d’horreur, et d’un bond, elle fut debout, s’acculant à l’angle le plus sombre de la pièce : Fausta, touchée au bras, avait violemment tressailli, ses deux mains étaient tombées, son visage ravagé par la passion apparaissait en pleine lumière, et Violetta la reconnaissait…
    Mille pensées flamboyèrent dans l’esprit de Fausta. Mille paroles ardentes se pressèrent sur ses lèvres, des insultes peut-être, ou des cris de douleur… car à ce moment, elle n’était plus Fausta la Vierge sacrée, Fausta la Souveraine, Fausta l’élue du Conclave secret… elle était seulement la descendante de Lucrèce Borgia. Et toutes ces pensées, toutes ces paroles, plaintes, insultes, jalousie, fureur, passion déchaînée, tout cela se traduisit par un seul mot jeté dans un cri rauque, incompréhensible :
    — Venez !…
    Venir !… Où ?… Que voulait-elle donc en faire ?… Quelle atroce et sombre

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