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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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quelques minutes, entendez-vous, Pardaillan ?
    — Oui ! fit le chevalier en frémissant. Je reconnais ces rumeurs-là. Je les ai entendues déjà deux ou trois fois dans ma vie. Et à chaque fois que j’ai entendu Paris pousser de ces grognements, c’est que Paris allait commettre un crime…
    — Un crime !… Pardaillan, vous avez appris quelque chose que vous me cachez !…
    Pour toute réponse, le chevalier, grommela un juron et précipita sa marche. Que pensait-il ? Que redoutait-il ? Rien de précis. Il courait à la place de Grève parce que Fausta lui avait donné rendez-vous sur la place de Grève, en prononçant le nom de Violetta.
    Lorsqu’ils débouchèrent, haletants et couverts de sueur, sur la place où roulait le flot tumultueux, d’où montaient des hurlements et des acclamations, Pardaillan s’adressa au premier bourgeois venu :
    — Que se passe-t-il ?…
    — Ne le savez-vous pas ? on va pendre et brûler les damnées Fourcaudes en présence de Mgr de Guise.
    — Ouf ! ne put retenir Pardaillan. Ce n’est pas elle qu’on va tuer !…
    — Elle ! haleta le jeune duc en pâlissant. Qu’aviez-vous donc pensé ?…
    — Vous êtes sûr, dit Pardaillan au bourgeois, qu’il s’agit des Fourcaudes ?
    — Parbleu !…
    — Et combien sont-elles ?…
    — Deux : Madeleine et Jeanne.
    — Pauvres filles ! murmura Pardaillan en se reprochant le mouvement de joie qu’il venait de ressentir.
    — Pardaillan ! murmura Charles. Au nom du ciel, que soupçonnez-vous donc ?…
    — Rien maintenant, rien. Je soupçonnais… mais à quoi bon ?… Et pourtant ! se reprit-il tout à coup.
    — Allons-nous-en, si vous ne soupçonnez rien, reprit Charles. Ces spectacles me font un mal affreux.
    — Avançons au contraire ! dit Pardaillan.
    Et aussitôt, se mettant à jouer des coudes et des épaules, il s’avança vers les bûchers surmontés de leurs potences.
    — Bonjour, monsieur le chevalier, dit tout à coup près de lui une voix féminine.
    Pardaillan considéra attentivement la jeune femme fardée qui venait si hardiment de le saisir par le bras.
    — Où diable vous ai-je vue, mignonne ?
    — Quoi ! vous ne vous souvenez pas de l’
Auberge de l’Espérance 
?. La soirée où vous vîntes voir la bohémienne qui disait la bonne aventure ?… Vous m’avez donné deux écus, et moi je vous ai donné… mon adresse.
    — Loïson ! fit le chevalier avec un sourire.
    — Ah ! vous vous rappelez mon nom ! s’écria gaîment la ribaude.
    Une rafale de hurlements interrompit Loïson… C’était Guise qui, à ce moment, débouchait sur la place avec sa royale escorte et allait, au milieu des acclamations, s’installer sur l’échafaud.
    — Et que fais-tu ici ? reprit Pardaillan attendri par le regard de gratitude admirative de la ribaude.
    — Dame, fit Loïson, je cherche aventure.
    — Avec ton ami le Rougeaud ? dit le chevalier en riant.
    — Avec tous et toutes, dit Loïson. Tenez, monsieur le chevalier, regardez du côté des bûchers…
    — Eh bien ?… Je ne vois que bourgeois agitant leurs toques comme des possédés et criant comme si on les saignait !…
    — Oui, et pendant qu’ils se démènent, plus d’une bourse tombe dans la main des nôtres. Ce soir il y aura grande ripaille à la Petite Truanderie, et si monsieur le chevalier voulait… la Truanderie a gardé de vous un tel souvenir depuis la scène de l’auberge de l’
Espérance
… que…
    Loïson n’eut pas te temps de développer l’honorable invitation qu’elle avait sur les lèvres. Une nouvelle rafale de clameurs plus exaspérées passa sur la Grève et agita violemment les masses profondes de la multitude. Cette fois, c’étaient les Fourcaudes, les condamnées qui apparaissaient, Madeleine marchait la première, entourée par les archers, qui à grand-peine la protégeaient contre la foule impatiente de tuerie.
    A ce moment, Charles d’Angoulême était à quelques pas de Pardaillan. Il tournait le dos au côté de la place par où arrivaient les Fourcaudes.
    Son regard flamboyant s’était fixé sur le duc de Guise dont il appelait le regard ; sa main tourmentait la garde de sa rapière ; des pensées de folie envahissaient son cerveau ; il méditait l’acte insensé : bondir sur cette estrade, braver et provoquer le duc — le ravisseur de Violetta et l’assassin de Charles IX ! — l’insulter au milieu de toute sa cour de gentilshommes, au milieu de ce peuple

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