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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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croix tournante au-dessus de la petite croix immobile du clocheton. A la chapelle Saint-Roch commençait un sentier rocailleux qui, s’enfonçant à droite dans les terrains de culture, se mettait bientôt à grimper les flancs abrupts de la butte et serpentait jusqu’au moulin. Ce sentier était fort étroit et les ânes qui portaient le blé au moulin n’y pouvaient passer qu’un à un. Or, au moment où Maurevert et François de Roncherolles, sire de Maineville, arrivaient à la chapelle, un spectacle extraordinaire s’offrit à eux.
    Sur le sentier, des mulets cheminaient et grimpaient à la file, d’un sabot hardi ; ces mulets portaient chacun un grand sac qui pouvait contenir de la farine ou du blé. Mais ce qui pouvait paraître étonnant, ce n’était pas que des mulets chargés de blé se rendissent au moulin, c’était que ces animaux — et il y en avait trente — étaient conduits par une dizaine de muletiers qui ressemblaient à des muletiers comme Maineville pouvait ressembler à un garçon meunier. Ces gens, poussiéreux et hâlés par le soleil comme s’ils eussent fait une longue étape, portaient à la ceinture de forts pistolets d’arçon et des dagues fort aiguisées que leurs manteaux jetés sur leurs épaules, malgré la chaleur, ne dissimulaient qu’à moitié.
    — Ah ! ah ! fit Maineville, voilà bien la troupe de mulets signalée dans la lettre.
    — Voilà du blé qui doit valoir son pesant d’or, dit Maurevert dont les yeux étincelaient.
    — C’est ce dont il faut nous assurer. Suis-moi, Maurevert, et tiens-toi prêt.
    Les deux hommes s’élancèrent à travers champs et, tout en courant, établirent leur plan. Ils atteignirent le sentier, à hauteur du dernier mulet derrière lequel marchait le dernier muletier de l’escorte.
    — Au large ! dit le muletier d’une voix menaçante.
    — Faquin ! cria Maurevert. Je vais t’apprendre le respect dû à un gentilhomme !
    — Un instant, mon officier, intervint Maineville, ce brave homme ignore que je suis l’un des garçons du moulin et que vous êtes, vous, l’officier des meuneries royales. Allons, l’ami, nous t’escortons jusque là-haut.
    — Vous êtes garçon meunier ? fit le muletier en jetant un regard soupçonneux sur Maineville.
    — Il me semble que cela se voit assez, et ce gentilhomme que tu vois là est préposé au droit de mouture.
    — Et de par mes fonctions, dit Maurevert, je veux voir quelle qualité de blé contient ce sac.
    — A votre aise, mon officier, reprit Maineville. Ce brave homme ne voudra pas attirer une mauvaise affaire à mon patron, en résistant.
    Le muletier jeta un rapide coup d’œil autour de lui. Il vit que ses camarades avaient marché pendant cette discussion ; il parut un instant vouloir les rappeler ; mais sans doute il se ravisa à la réflexion, car il reprit d’un ton de mauvaise humeur :
    — Faites donc votre office. Je vais vous montrer mon blé.
    Et il commença à défaire la cordelette qui nouait la tête du sac jeté en travers de la mule de façon qu’il pendait à droite et à gauche sur les flancs de la bête. Le muletier ayant entrouvert le sac en tira une poignée d’orge ; mais à ce moment, comme pour l’aider, Maineville se précipita et bouscula l’homme ; le sac s’ouvrit, l’orge se répandit sur le sentier, et le sac n’ayant plus de contrepoids tomba de l’autre côté. Le muletier, sans un mot, se rua. Mais déjà Maurevert avait plongé la main dans le sac à moitié délesté, et avait constaté au fond la présence d’un deuxième sac qu’il tâta rapidement.
    Il se releva comme le muletier arrivait sur lui… Maurevert était tout pâle ! Ce deuxième sac, à son toucher, avait rendu un son de métal… et sous ses doigts, il avait senti des formes dures qui ne rappelaient que vaguement l’orge ou tout autre grain… c’étaient des ducats ou des écus !…
    — C’est bien, dit-il froidement. Ramasse ton blé, mon brave homme.
    Le muletier, sans répondre, tira un de ces pistolets et l’amorça.
    — Au large, mon officier ! cria Maineville ; ce muletier est fou furieux.
    Les deux hommes bondirent. Comme ils avaient gagné une vingtaine de pas, Maurevert sentit un choc au-dessus de sa tête, et son chapeau tomba : c’était le muletier qui venait de tirer… Maurevert et Maineville disparurent bientôt, et le muletier murmura :
    — Qui sont ces deux hommes ?… Ont-ils dit la vérité ?… Je ne crois pas

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