La Femme Celte
quinque en latin, pimp en gaulois, pemp en breton, pymp en gallois et coic en gaélique.
Mais si l’on étudie de près le vocabulaire gaulois – ou du
moins le peu qu’il nous en reste – on s’aperçoit qu’il existe dans la langue
gauloise un certain nombre d’archaïsmes proches à la fois du gaélique et du
latin [12] . Pourtant, nous sommes
sûrs que les Gaulois parlaient une langue brittonique : la meilleure
preuve se trouve dans le fait que les Gaulois et les Bretons se parlaient sans
avoir besoin d’interprète, comme nous le montre l’exemple de Commios
l’Atrébate, missionné par César auprès des Bretons [13] .
La langue gauloise est indiscutablement une langue celtique en P, et n’a pu
être apportée en Gaule qu’au cours des émigrations de l’âge du fer, que ce soit
à l’époque de Hallstatt (avant 500) ou à l’époque de la Tène (après 500). Alors
comment expliquer les archaïsmes du gaulois et sa parenté évidente avec le
gaélique ?
La réponse à cette question ne peut être qu’une hypothèse,
mais elle a le mérite de combler la fameuse lacune concernant le sort des Gaëls
entre l’époque où ils se sont séparés de la masse indo-européenne et le moment
où ils se sont établis en Irlande. Il est très probable qu’ils avaient déjà des
territoires dans la Gaule et qu’ils se sont fondus avec la nouvelle vague de
Celtes en P, les Brittons. Ils auraient donc pu influencer très nettement la
langue des envahisseurs dans un sens archaïsant. Un élément milite en faveur de
cette hypothèse, c’est celui de la langue des Celtibères, peuple du nord-ouest
de l’Espagne qui n’avait guère été touché par la seconde vague d’envahisseurs
brittons. D’après les rares inscriptions que nous connaissons, « il semble
bien que la langue des Celtibères ait appartenu au type « Q celtique »,
car la conjonction « et » (latin -que …),
qui suppose un indo-européen * kwe , est
représentée en celtibère par Ce ou par Cue [14] ». Cette
constatation s’accorde avec les anciennes légendes irlandaises selon lesquelles
les fils de Mile, c’est-à-dire les Gaëls, seraient venus s’établir en Irlande
après avoir séjourné en Espagne [15] . Il est donc permis de
penser que tout le territoire de la Gaule avait reçu des immigrants gaéliques,
soit à l’âge du bronze récent, soit au premier âge du fer (Hallstatt), soit aux
deux âges.
Ce problème de langage montre la complexité du peuplement de
la Gaule celtique. Et comme tout problème en entraîne d’autres, nous sommes
amenés à nous en poser immédiatement deux autres ; qui ont une grande
importance, et qui sont liés ensemble : que penser de la parenté du
gaulois et du latin, et pourquoi le gaulois a-t-il disparu au profit du latin
sur tous les territoires occupés par les Romains sur le continent, à l’exclusion de l’île de Bretagne, laquelle a conservé sa
langue celtique jusqu’à l’arrivée des Saxons ?
On a fait grand cas, à une certaine époque, d’une soi-disant
communauté italo-celtique. Les Celtes et les Latins se seraient séparés
ensemble de la masse indo-européenne et c’est ce qui expliquerait les analogies
de langage. Les déclinaisons sont en effet très proches, les conjugaisons
également. Latin et celtique ont le génitif en -I dans les thèmes en -O (latin equi , v. irlandais * eqi ),
des superlatifs presque identiques (latin maxima ,
gaulois uxisama ), des futurs en B et les
verbes déponents en -R. Mais ces particularités se retrouvent un peu partout
dans le domaine indo-européen et ne sont pas toutes contenues dans les autres
langues italiques comme l’osque ou l’ombrien, qui, ne l’oublions pas, étaient
parlés par quantité de gens dans la péninsule avant que ne s’affirmât la
suprématie du latin. « L’hypothèse italo-celtique ne semble pas devoir
être maintenue, tout au moins avec la rigueur qu’on lui accordait autrefois… Il
est préférable de penser qu’il y a eu, à date très ancienne, des contacts suivis
entre ces deux groupes de langues plutôt qu’une communauté originelle
postérieure à celle de l’unité indo-européenne [16] . »
De toute façon les ressemblances entre le celtique et le
latin s’expliquent aisément par leur origine commune indo-européenne et par les
contacts permanents que ces peuples avaient entre eux, soit en commerçant, soit
en se faisant la guerre. Des mots celtiques ont dû
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