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La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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verger, de l’île des Fées, de la Pomme, symbole
solaire, et aussi au culte préhistorique de l’Ambre, autre symbole solaire [467] .
    Il y a donc de fortes chances pour que les Celtes, comme les
autres Indo-Européens, aient connu une déesse-soleil, représentée d’ailleurs
dans l’iconographie et les inscriptions par la déesse Sul honorée à Bath en
Grande-Bretagne. De même qu’Apollon a pris la place de sa mère-sœur Lêto-Artémis,
Mabon prend la place de sa mère Modron, et s’affuble de surnoms divers, comme
Belenos, « le Brillant ». Mais il n’en reste pas moins le souvenir de
la mère, comme en témoigne Belisama (= la Très Brillante), et aussi des traces
parfaitement visibles dans les différents mythes où les femmes jouent le rôle
principal. C’est le cas pour l’histoire de Tristan et Yseult et pour tous ses
archétypes ou équivalents. Yseult, comme Grainné, comme Deirdré, serait alors
le nouvel et ultime aspect de la déesse-soleil ancienne, dont l’image s’est
perpétuée à l’intérieur d’une société masculinisée à l’extrême.
    Ainsi la structure de l’histoire de Tristan et Yseult
devient très simple, pour peu qu’on veuille la considérer comme le vestige d’un
culte solaire féminin. Yseult (ou Essyllt, il est impossible de savoir quel est
le nom originel, ni sa signification) est la Femme-Soleil, Mark (ou March, nom
qui signifie « cheval ») est celui qui entraîne le soleil dans la
Nuit, et qui fait attendre la renaissance du Soleil [468]  :
c’est le conducteur du char du soleil, rôle normal pour le dieu-cheval qu’il
est à l’origine [469] . Tout cela est le
développement littéraire de l’objet rituel de l’âge du bronze, le chariot
solaire. Quant à Tristan, dont le nom d’origine picte (et brittonique) Drustanos peut signifier « force du feu »,
il est le zélateur de cette religion solaire, celui qui prend sa force au feu
du soleil : il est l’adorateur d’Yseult ,
déesse solaire, et veut donc la ravir à Mark qui la maintient trop longtemps
dans la nuit [470] .
    C’est ce caractère de divinité solaire qui confère à Yseult,
et à toutes les héroïnes celtiques, l’aspect tyrannique sous lequel elles
apparaissent bien souvent, et qui fait que le geis dont elles disposent a une valeur absolue et obligatoire. Et par voie de
conséquence, l’amant d’Yseult (et de toutes les autres héroïnes) étant son
adorateur, son zélateur, il est normal de le voir en extase devant le visage
divin : c’est la source à laquelle il aspire, les rayons auxquels il se
réchauffe, dont il se nourrit, dont il s’abreuve ; et c’est aussi à cause
des rayons de la reine, maîtresse divine de la vie et de la mort, qu’il souffre
et qu’il meurt. Car comme Apollon dispense le bonheur, la prospérité, la guérison,
mais aussi les maladies et la mort, Yseult contient en elle-même les deux aspects
fondamentaux de la même réalité : elle est le carrefour où s’enchevêtrent
les contraires.
    Elle est tyrannique. Toutes les Dames (du latin Domina , maîtresse) de l’Amour
courtois sont tyranniques. Lancelot du Lac en fait l’expérience avec Guenièvre,
dans le récit de Chrétien de Troyes. Grainné est peut-être le modèle le plus
parfait de ce qu’une femme peut faire accomplir à un homme. Mais à la différence
de l’héroïne grecque (Phèdre) qui ne peut pas se faire obéir, l’héroïne
celtique est assurée que l’Amant la suivra et finira par la prendre dans une
possession charnelle qui retranchera les deux personnages du monde social où
ils évoluent. À la différence des héroïnes grecques que nous voyons chez
Racine, telle Hermione devant qui rampe littéralement Oreste, au mépris de sa
dignité et de son honneur, jamais une héroïne celtique, et Grainné en est la
preuve, ne tolérera une attitude basse et vile. Ce que veut Grainné, c’est un
homme, conscient de ses responsabilités, digne de son estime et de son amour.
Et tout cela parce qu’elle est tyrannique au
sens ancien du terme.
    En effet, il serait bon de songer à la déesse-mère des
Étrusques. Elle s’appelait Turan , et son nom
provient d’une racine indo-européenne tur qui
signifie « donner », racine encore reconnaissable dans le grec δώρον.
Si le tyran des époques historiques est un véritable despote, cruel et
sanguinaire, il n’en était peut-être pas de même aux époques anté-historiques,
surtout si la tyrannie était

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