La Femme Celte
très peu encourageant pour la femme de se voir ainsi reléguée au rang
nettement subalterne (et pourtant magnifié, cela ne coûte pas cher !) d’ assistante . Qu’on se rassure, les décisions sont
prises par l’homme, en l’occurrence le Christ, et tout est mis en œuvre, même
l’abaissement de la féminité, pour que s’accomplisse son « sacerdoce royal ».
Vive le roi, mais que la reine se tienne dans l’ombre, au service de son maître
et seigneur…
Tout cela ressort de l’escroquerie intellectuelle la plus
pure. Mais il fallait bien dire quelque chose, les femmes, à l’heure actuelle,
constituant le plus important contingent des fidèles de l’Église catholique
romaine. On s’explique alors l’efficacité d’un culte marial tout entier
consacré au rôle nécessaire, efficace, mais modeste, de la Vierge Marie, et les encouragements auxquels il donne lieu de la part des
autorités ecclésiastiques. Il s’agit bel et bien de canaliser et d’endiguer le
féminisme, à l’intérieur d’un dogme rassurant, qui ne risque certes pas de provoquer
le moindre bouleversement dans la conscience qu’ont les femmes de leur rôle.
Ainsi se perpétue le lent et sournois travail de sape entrepris par l’Église
depuis que le christianisme est devenu religion officielle de l’empire romain
et l’instrument docile d’un pouvoir temporel à prétentions universalistes,
héritier de César, de Néron et autres dictateurs que d’ailleurs cette même
Église s’acharne à déconsidérer à la face du monde [489] .
Il serait peut-être temps de revenir à la pureté originelle des textes
évangéliques et autres écrits des témoins (ou dits tels) apostoliques. L’Église
romaine prétend appuyer son dogme sur des textes, mais elle se garde bien de
livrer à ses fidèles l’intégralité de ces textes. Au cours des siècles,
elle a pris soin d’en éliminer, et de tronquer, au gré des exigences de ses
positions doctrinales (qui recoupaient ses positions temporelles), ceux qu’il
était impossible d’égarer ou de déclarer apocryphes. Pourquoi, par exemple,
avoir « gommé » le rôle de la mystérieuse Marie de Magdala, quitte à
s’offusquer (et à adopter une attitude franchement fasciste) lorsqu’un
romancier grec et un cinéaste italien se permettent d’interpréter à leur
manière et selon leur sensibilité cette énigme évangélique [490] ?
Et pourtant… Il suffirait de si peu de choses… Le texte du
pape Jean-Paul II, publié à l’occasion de l’année mariale de 1988,
contient une proposition qui va plus loin que l’on pourrait penser en premier
lieu, sans que l’on puisse savoir s’il s’agit d’une pensée sous-jacente qui
s’infiltre dans un discours conservateur ou d’une volonté consciente de
provoquer une nouvelle interprétation des faits. Il s’agit précisément de Marie
de Magdala, la « Madeleine » que la tradition populaire persiste à
considérer comme la « pécheresse » repentie, et qui, en réalité,
semble avoir été une veuve très riche et l’une des premières disciples de
Jésus. Jean-Paul II rend en effet un hommage appuyé à la Madeleine, et
après avoir rappelé que, selon l’Évangile de Jean, elle fut le premier être
humain à avoir vu Jésus sortir de son tombeau, il ajoute : « C’est
pour cela qu’on l’a même appelée l’Apôtre des Apôtres. Marie de Magdala fut,
avant les apôtres, témoin oculaire du Christ ressuscité et, pour cette raison,
elle fut aussi la première à lui rendre témoignage devant les apôtres. »
Cette réflexion a le mérite de situer l’importance de l’événement considéré et
de mettre en lumière, si l’on en croit Jean – l’évangéliste qui semble le mieux
informé, en tout cas le plus fiable parce que le plus ancien –, les circonstances
mêmes qui ont entouré l’événement. Quand on y songe, en effet, cela paraît
« énorme ». Jésus, qui appartenait à une société éminemment
patriarcale, qui est présenté comme régissant une troupe d’apôtres
exclusivement masculins, aurait donc pris comme premier témoin de sa
résurrection une femme, non pas sa mère, mais celle avec qui il semble – si on
lit entre les lignes – entretenir des rapports affectifs privilégiés.
Quelle est en effet la signification de cette scène ?
Une lecture historicisante, telle qu’elle est pratiquée depuis vingt siècles
par les commentateurs officiels de l’Église, ne
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