La Femme Celte
du Chaudron de résurrection, le thème de la vengeance, ne sont
pas chez Chrétien et ils ont un tel caractère archaïque qu’on ne peut douter de
souvenirs traditionnels fort anciens.
[310] Chez Chrétien, Perceval ravit de force l’anneau. Le détail rapporté
par l’auteur gallois est intéressant parce qu’il s’agit d’un don fait par une
femme.
[311] Le thème de la Coupe est en rapport avec le Graal, mais ce qui est
plus important c’est que la Coupe était destinée à Guenièvre-Gwenhwyfar. En
effet, si on en croit le passage correspondant de Wolfram, le chevalier
ravisseur (doublet de Méléagant) était le cousin d’Arthur, venu réclamer son
héritage. Or Guenièvre, on le sait, représente la Souveraineté, et la Coupe
étant le symbole de Guenièvre, c’est la Souveraineté qu’emporte le chevalier et
que récupère Peredur. Nous retrouverons plus loin le thème de la Coupe de
Souveraineté.
[312] Peu importe qu’ils soient deux, ou qu’il y ait un dédoublement de
personnage (il y en a bien un dans la Quête entre le Roi-Pêcheur et le Roi Méhaigné) : l’essentiel est que Peredur,
comme Perceval dans toutes les versions, aille chez son oncle maternel . C’est en effet un souvenir très précis de
l’époque où la société celtique était gynécocratique, car c’est un cas de
filiation matriléaire où le rôle de premier plan n’est pas dévolu au mari, mais
au frère de l’épouse. Il y a bien d’autres exemples de cet usage dans les
épopées irlandaises.
[313] C’est la Blanchefleur de Chrétien et la Condwiramur de Wolfram. On
notera qu’elle est brune, alors que la beauté de l’époque était le blond
artificiel. Il semble bien qu’il y ait le souvenir d’une déesse brune,
autrement dit d’une divinité des ténèbres.
[314] Le combat avec la sorcière de Kaerlooyw fait penser à l’animosité de
Kundry la Sorcière contre Parzival. Pourtant, c’est Kundry qui initiera
Parzival en lui montrant le chemin du château du Graal. D’autre part, l’élément
celtique est ici très important, puisqu’il y a initiation magico-guerrière – et
sans aucun doute sexuelle – de Peredur par des êtres féminins mystérieux. Voir
à ce sujet l’ Éducation de Cûchulainn (J. M., L’Épopée Celtique d’Irlande , p. 88-95) où
le héros irlandais est initié à peu près de la même façon par les sorcières Scatach,
Uatach et Aifé, ainsi que les Enfances de Finn ( Ibid. , p. 141-149) où le chef des Fiana reçoit une éducation bizarre chez des « femmes guerrières », puis
chez un forgeron dont il épouse – temporairement – la fille. De toute façon les
Sorcières de Kaerloyw sont la clef de cette quête mystérieuse de Peredur, comme
on peut le voir à la fin de l’histoire.
[315] Image poétique qui se retrouve dans le récit irlandais de l’ Exil des fils d’Usnech . On notera encore
l’importance de la chevelure brune (le corbeau), en rapport avec la déesse Modron-Morgane,
maîtresse de la troupe des Corbeaux, et avec la déesse Bobdh-Morrigane, qui
revêt souvent l’aspect d’une corneille.
[316] L’épisode d’Ygharat prouve que Peredur est à la recherche de la Femme
Idéale, celle qui a de multiples visages tout en étant la même, la déesse
brune.
[317] Souvenir évident de la « Terre des Fées » tant de fois
décrite dans les épopées irlandaises, et où ne se trouvent que des femmes merveilleuses.
[318] La grotte est évidemment l’image symbolique du vagin. Il s’agit pour
Peredur, non pas de tuer le père, qui occupe le vagin, thème cher à Freud,
mais, étant donné que dans le mythe celtique primitif le père n’a pas grande
importance, bien plutôt de vaincre les terreurs dont l’imagination masculine a
peuplé les profondeurs du sexe féminin.
[319] Il ne peut y avoir aucun doute sur le caractère sexuel et même
scabreux de cet épisode. La grotte, c’est-à-dire le vagin, se trouve dans
l’Autre-Monde, car Peredur n’y parvient qu’après avoir franchi un fleuve. Il
retrouve donc la mère , la femme . Mais il ne peut pénétrer la femme qu’après
avoir accompli certains actes externes :
or, l’Impératrice, sur un sommet , représente –
honni soit qui mal y pense ! – le clitoris. Ainsi la pénétration sexuelle
(et par conséquent l’initiation) de Peredur sera complète.
[320] Dans Wolfram, Parzival épouse Condwiramur. L’Impératrice, d’après cet
épisode apparaît très nettement
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