Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
Vom Netzwerk:
milieu du verger
merveilleux (anéantissement post coïtum ),
ayant rétabli la situation paradisiaque primitive.
    Car ce verger n’est autre que le Jardin du Paradis de toutes
les Genèses, paradis perdu au fond de l’inconscient et que chaque être humain
essaie de réaliser en lui d’une façon ou d’une autre. Les troubadours placent
toujours les rencontres des amants dans un verger clos, pendant la nuit. Et
quand vient l’aube, c’est le déchirement, la catastrophe, une naissance réactualisée
avec tout son cortège de traumatismes :
     
    « En un verger, sous les feuilles de
l’aubépine, la dame serra contre elle son ami, jusqu’à ce que le guetteur criât
quand l’aube vint. Oh ! Dieu ! l’aube, comme elle vient tôt !
Plût à Dieu que jamais la nuit ne finît, ni que mon ami n’eût à me quitter, ni
que le guetteur ne vît jamais jour ni aube ! Oh ! Dieu ! l’aube,
comme elle vient tôt ! » (G. Picot, La
Poésie lyrique au Moyen Âge , I, 69-71). « Guette bien, guetteur du
château, quand j’ai à moi jusqu’à l’aube l’objet qui m’est le meilleur et le
plus beau, le jour vient sans faillir. Jeu nouveau ravit l’aube, oui,
l’aube ! Guette, ami, veille, crie, hurle, je suis riche, j’ai ce que je
désire le plus, mais je suis ennemi de l’aube. La tristesse que nous cause le
jour m’abat plus que l’aube, oui, l’aube » ( Ibid. ,
I, 79-81).
     
    Ce thème du Verger trouve son apothéose dans cet ouvrage
assez exceptionnel qu’est le Roman de la Rose ,
aussi bien celui de Guillaume de Lorris où dominent les préoccupations courtoises
héritées à la fois des coutumes celtiques et de la mentalité des troubadours
occitans, que celui de Jean de Meung hanté par des questions angoissantes
posées à propos de la féminité. L’amant aperçoit une rose merveilleuse, au
milieu d’un verger. Il ne peut plus vivre s’il ne va cueillir cette rose. Mais
que de difficultés à vaincre, que de dangers à éviter, que d’épines à franchir,
avant de pouvoir accomplir l’acte régénérateur ! Le sens du poème de Jean
de Meung est d’ailleurs très clair : à travers les allégories, ce sont les
fantasmes humains qu’il faut écarter de sa route.
    Souvent, ce ne sont pas des monstres qui gardent l’entrée de
la demeure de la Princesse Engloutie. Chez les troubadours, ce sont, la plupart
du temps, les gelos et les losengiers, c’est-à-dire les jaloux et les
médisants. Dans certains contes, c’est le Père lui-même. Dans d’autres récits,
c’est le mari. La plupart du temps celui-ci est vieux et tyrannique, il
séquestre sa femme et tue les amants potentiels. De même qu’Yspaddaden Penkawr
impose au prétendant de sa fille des épreuves insurmontables et tente même de
le tuer (récit gallois de Kulhwch et Olwen ),
de même le mari se découvre des trésors de ruse et de perversité pour garder sa
femme à l’abri.
     
    « Le seigneur qui gouvernait la cité était
un très vieil homme ; il avait pour femme une dame de haut parage,
franche, courtoise et belle. Il était jaloux démesurément… Il la surveillait,
et ce n’était pas pour rire. Sous le donjon, un verger clos de toute part
descendait jusqu’à l’eau. L’enceinte était en marbre vert, haute et très
épaisse, avec une seule entrée où nuit et jour des gardes veillaient. À l’autre
bout s’étendait la mer, et personne ne pouvait arriver de ce côté, si ce n’est
en bateau. C’est là que le seigneur, pour mettre sa femme en lieu sûr, avait
bâti une chambre. Sous le ciel il n’en était pas de plus belle. À l’entrée une
chapelle ; tout autour de la chambre, des peintures où Vénus, la déesse
d’amour était très bien figurée… C’est là que la dame fut mise et, enclose. Son
seigneur lui donna une pucelle pour son service… Un vieux prêtre blanc et
fleuri gardait les clefs de la porte » (Marie de France, Lai de Guigemar , P. Truffau, Les Lais de Marie de France , p. 12-13).
     
    Il y a évidemment un aspect revendicatif dans les Lais de Marie
de France : c’est une protestation contre les mariages imposés à la femme
sans tenir compte de son inclination. Il y a même plus : une attaque en
règle du mariage monogamique qui suppose ipso facto l’adultère, ce que corrobore l’étude de tous les romans courtois du XII e et du XIII e  siècle.
L’Amour Courtois, qui est nécessairement hors mariage, qu’il soit platonique ou
qu’il soit sensuel,

Weitere Kostenlose Bücher