Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
Saint-Pierre… En face, une lumière brillait à la maison du chévecier. Entre les gros bourrelets noirs des contreforts, une torche éclaboussait d’or l’entrée du château d’Harcourt. Un guisarmier veillait.
    – Est-ce là ?
    – Pas encore…
    Des maisons vernissées de pluie et de clair de lune. Une porte…
    – Tout droit, nous approchons.
    La pente déclina. Dans l’ombre, la maison de Benoît Sirvin apparut, d’autant plus reconnaissable qu’une petite lueur jaunissait la fenêtre où le mire exposait ses fioles et ses pots de remèdes.
    – C’est ici.
    Le conducteur tira sur les rênes ; le gros cheval s’arrêta, agita sa tête ruisselante et fut entouré des deux cavaliers. Ils étaient jeunes, glabres, et paraissaient dressés à l’obéissance. Et déjà, descendant péniblement de la carriole, Calveley courait frapper à la porte. Elle s’ouvrit presque aussitôt.
    – Messire, dit l’Anglais, Ogier de Fenouillet a besoin de votre aide. Il est là-dedans durement navré… Voulez-vous l’accueillir ?
    Le mire s’avança vers le chariot. Sa voix bienveillante, nuancée d’une certaine tristesse, salua le charretier puis, tourné vers Calveley et Urbain, il leur dit :
    – Descendez ce chevalier ; menez-le jusqu’à l’entrée de mon logis… Vous êtes un ami, sans doute…
    – Oui, dit Calveley.
    Ogier se sentit empoigné. Des « doucement, doucement » accompagnèrent sa descente de la caisse et son transport jusqu’au domicile du mire. Il entendit Benoît Sirvin remercier son sauveur et celui-ci protester qu’il n’avait fait qu’appliquer la charité chrétienne, même à l’égard d’un forain (216) . Puis, se penchant afin d’être bien entendu :
    – Holà ! chevalier… S’il vous advient de passer par Montargis, je serais fort aise de vous revoir… Mon nom se retient aisément ; il vous suffira de le prononcer pour qu’on vous mène à ma demeure.
    Pour toute réponse, Ogier gémit ; le marchand, alors, questionna le mire :
    – Croyez-vous que nous puissions trouver un hôtel pour cette nuit ?
    – Dans le bas… au Beau Soleil…
    Les fers des chevaux crépitèrent et très vite la rue recouvra son silence.
    Ogier ferma les yeux. Quelque chose chatouilla son front ; c’était la barbe de Benoît Sirvin qui l’empoignait aux aisselles et avançait à reculons tandis que Calveley, à l’enfourchure de ses jambes, le soutenait par les cuisses.
    – Doucement, répéta le vieillard.
    Ogier vit qu’on lui faisait traverser une antichambre lambrissée de chêne découpé en longs panneaux sculptés sur lesquels deux ou trois cierges, quelque part, allumaient des luisances fauves. Il franchit une porte et se trouva dans une pièce claire, austère, tout aussi inconnue que la première. Des poutres soutenaient le plafond, et dans leurs entrevous, les uns occupés par des caissons hexagonaux rechampis de couleur jaune, les autres vides, figuraient des étoiles ou, plus précisément, des constellations.
    Deux murs disparaissaient derrière des planches sur lesquelles, en désordre, s’alignaient ou s’entassaient des livres dont certains, à en juger par la vétusté de leur cuir, devaient être centenaires. C’étaient eux, sans doute, qui donnaient à l’air qu’on respirait ici cette odeur de moisi et de rance. Un antiphonaire ouvert sur un lutrin révélait ses parchemins jaunis, rayés de partitions criblées de notes noires et rouges.
    – Posons ce malheureux là-dessus…
    Étendu sur une table basse, Ogier eut son attention attirée par la présence d’une échelle assez large, aux barreaux plats, et qui semblait scellée au mur. Sur le sol au pavement noir et vermeil, il entrevit trois grands coffres.
    – Que lui est-il arrivé ? demanda Benoît Sirvin à Calveley.
    – Guichard d’Oyré a commencé à le rouer…
    – Quand ?
    – Mardi matin.
    – Il n’est peut-être pas trop tard… Tirez-lui tous ses linges et ôtez les attelles… Je vais quérir tout ce dont j’ai besoin.
    Le vieillard disparut. Lorsqu’il revint, Ogier, nu, regardait fixement le plafond pour éviter d’examiner sa jambe, et Calveley, penché sur le lutrin, tournait les pages de l’antiphonaire.
    – Laissez ces parchemins, messire, dit le mire. Ce sont des chants qui n’ont plus cours pour des cérémonies disparues.
    Le ton était suave mais impatient ; Calveley sourcilla et revint vers la table :
    – On louait Dieu dans ces

Weitere Kostenlose Bücher