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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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comment les assaillir demain de ce côté-ci du fleuve…
    Et soudain, les sourcils froncés :
    – Pourquoi faites-vous cette tête ? Cette mission vous déplaît-elle ?
    – Certes, non, monseigneur. Il me semble que nous avons perdu un jour, simplement.
    D’un geste, le comte balaya cette remarque :
    – Bah !… Acculés à tant d’eau comme sont les Anglais, ce petit ajournement est de peu d’importance… Et n’oubliez pas que Godemar du Fay les attend de l’autre côté de la Somme, au cas, bien douteux, où ils auraient eu connaissance du gué !
    – Et s’ils apprennent où est ce gué, monseigneur ?
    Ensuite des sourcils, le nez du prince se fronça. Il parut mâchonner sa réponse avant que de l’exprimer si pesamment qu’il révélait du même coup son inquiétude :
    – Rien à craindre. Et puis, je vous l’ai dit : ce bon Godemar est là !… Laissez-moi dormir, à présent.
    Ogier s’éloigna dans la nuit piquetée de feux dont le vermillon lui parut de mauvais augure.
    – Godemar du Fay ! soupira-t-il. Une tête à peler un pou afin d’en avoir la peau… Et s’il me vendait un œuf, je craindrais qu’il n’en ait robé le jaune.
    Godemar du Fay ! La mine d’un presbytérien dont le sang, dans des veines sans doute étroites, cheminait plus lentement qu’un limaçon. Mais présomptueux comme un Pape ou un connétable. Et pour l’encenser : Alençon aimable, cette vesprée, comme un fagot d’épines !
    « Où tout cela va-t-il nous entraîner ? Qu’espèrent-ils ? »
    L’espérance !… Elle les tenaillait tous. Du roi aux maréchaux et de ceux-ci au dernier palefrenier de l’armée, les hommes avaient la tête ainsi qu’une marmite en laquelle on eût mis à bouillir une poignée de lentilles.
    « Les Goddons ne fuiront pas. Ils nous attendent ou nous attendront pour essayer de nous déconfire. »
    Et s’ils y parvenaient ?
    Plutôt que de s’apprêter pour la bataille, on mangeait autour des feux en énarrant ses combats, ses amours, ses desseins. On grognait d’avoir parcouru inutilement tant de lieues.
    « Et moi donc qui suis accouru du Poitou pour ne subir dans l’ost que moult déceptions et découragements ! »
    Certes, il regrettait Blandine. Et même Sirvin. Or, il lui semblait qu’en rejoignant l’armée, il avait emprunté un chemin qu’il se devait de prendre. Quelque chose – mais quoi ? – l’attendait au-delà de la proche bataille.
    – Eh bien ? interrogea Thierry en marchant à sa rencontre.
    – Il faut qu’en pleine nuit nous trouvions la Blanche-Tache et que nous revenions dire à Alençon et au roi si les Goddons se meuvent vers ce lieu.
    – C’est loin, dit Gauric tout à coup présent. Du côté de Saint-Valéry. Le temps de la trouver et de revenir céans, les Anglais pourront franchir le gué.
    – S’ils le trouvent.
    – Ils le trouveront, Thierry, dit Ogier.
    – Grâce à Dieu ?
    – Non, Gauric. Ni Dieu ni saint Georges. Grâce à un roi qui sait guerroyer. Il est hardi. La confiance de ses hommes lui est acquise. Nous n’avons cessé d’en avoir la preuve.
    Et agacé soudain de tant confabuler :
    – Apprêtez-vous. Couvrez-vous de fer. N’oubliez pas que leur archerie est meilleure que la nôtre. Meilleure que notre arbalètrerie… Et rappelez-vous que leurs chevaliers n’ont point peur des nôtres.
    – Assez, dit Gauric en joignant ses mains. Si vous continuez, la colique va me prendre et nous n’avons pas de bostrués (343) .
    – Tu pourrais aller chier sur la tête de…
    Assurément, Thierry allait dire Blainville. D’un geste, Ogier lui signifia de se taire. Blainville !… Il l’avait perdu de vue. Où était-il maintenant ? Quelle fallace (344) préparait-il ?

V
    – Il fait de plus en plus froid, enragea Gauric, le front appuyé contre la cuisse de son cheval pour protéger son visage du vent de mer.
    – Remets donc ton bassinet. Et n’aie crainte, ajouta Ogier, le soleil se montrera bientôt et nous suerons sous nos fers.
    – Pendant que nous gelons ainsi, dit Champartel, ils ronflent tous à Airaines !… Ils devraient être avec nous, même si nous ne voyons pas un Goddon !… Êtes-vous sûr, messire, que la Blanche-Tache est au bas de cette butte ?
    Flattant le cou du Blanchet, Ogier fut satisfait de sa tiédeur et de sa fermeté. Un bon cheval. Que vaudrait-il à la bataille ? Saurait-il galoper, ruer, éluder les heurts ou les provoquer ?
    – Si

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