Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
Vertaing !
    – Jaloux de vous conserver en vie, monseigneur, comme un soir, à Chauvigny.
    – Vous m’en parlez trop. Qu’attendez-vous pour ce soir-là ? Un présent de valeur ?
    Ogier ne put maîtriser son indignation :
    – Messire, vous me connaissez mal. Votre sollicitude à mon égard suffit à me rassasier !
    Ils venaient, devançant le roi, d’accomplir un tour de cloître. S’asseyant sur un banc, Philippe VI appela son frère et pria ses grands vassaux réunis en demi-cercle devant lui de s’écarter un peu : ils lui bouchaient la vue du jardinet, entre les colonnes de pierre ; un jardinet où des colombes voletaient sur un pommier lourd de fruits. Il y eut un cliquetis d’éperons et le Moyne de Bâle apparut, donnant le bras à Jean l’Aveugle.
    – Le bonjour, le bonjour ! dit le roi de Bohême en distribuant des saluts dans le vide.
    Le Moyne de Bâle le fit asseoir auprès du roi de France qui, aussitôt, entama :
    – Mon parent, mon frère, messeigneurs… Oyez-moi. Nous savons les Anglais à Crécy. Peu avant la messe, un coureur m’a rapporté qu’ils n’avançaient plus… Si vraiment, ils nous attendent, ils nous verront. Ils n’auront même pas assez d’yeux pour nous voir !
    Et Philippe toucha du coude Jean l’Aveugle qui répéta sentencieusement : « Ils verront » et leva son visage aux yeux morts vers le petit jardin paisible où les colombes roucoulaient.
    – Saint-Venant ! dit Philippe VI.
    Robert de Waurin sortit de l’attroupement des guerriers.
    – Saint-Venant, on vous voit à peine, et vous ne parlez plus !
    – C’est que, sire, mes avis vous importent moins que ceux de messire Richard. Adonques, je m’abstiens de vous les exprimer.
    Le maréchal était carré, lourd, sanguin. Ce prud’homme brun aux yeux noirs, à la moustache tombante avait sans doute incomplètement vidé son sac. Cependant, son intervention suffisait à tous – particulièrement au roi. Il parut satisfait que Blainville n’eût pas bronché.
    – Montmorency !
    Le second maréchal rejoignit Saint-Venant, auquel il ressemblait ; mais il levait haut son menton pointu. Il n’était ni cérémonieux, ni avare, lui, de paroles. Son épée, dans un fourreau de cuir noir, avait perdu un quillon.
    – Sire, je suis votre loyal sujet… Que dois-je faire ?
    – Vous allez, l’ami, avec Saint-Venant et quelques hommes que je vous laisse choisir, courir le pays pour apprendre la vérité sur les Anglais… Je veux tout savoir sur leur convenant (368) .
    Tandis que les deux chevaliers s’inclinaient, Blainville fit un pas :
    – Puis-je me joindre à eux, sire ?
    Jamais, songea Ogier, oiseau de carnage n’empruntait plus maléfiquement le plumage de ces colombes qu’il entendait roucouler. Blainville, sans effort apparent, était même parvenu à éteindre les sombres feux de ses prunelles. Qu’espérait-il en accompagnant les deux autres ? Les planter en un lieu propice et galoper vers Édouard III ?
    – Non, Richard, dit assez sèchement Philippe VI. Nous avons décidé de vous voir et savoir à nos côtés…
    Employait-il à dessein, et pour affirmer sa rigueur, le pluriel de majesté, ou bien liait-il pour un coup son frère Charles d’Alençon à son sort ? Il poursuivit :
    – Vous continuerez de nous fournir vos opinions, mais je les soupèserai mieux, je vous en préviens, que je ne l’ai fait jusqu’à présent !
    Le Normand jeta sur le souverain, souriant, un regard ébahi. Il fut près de parler, mais Philippe VI lui intima de se taire :
    – Hé oui, Richard… Jusqu’ici, vos conseils ne m’ont apporté que des déconvenues…
    Bien que le mot fût faible – sans doute à dessein –, il y eut des rires tandis que le favori protestait qu’il n’avait en vue que la grandeur du royaume et présentement la victoire sur l’Angleterre.
    Ogier reprit confiance : même Philippe VI, d’esprit pourtant étroit, commençait à mettre en doute soit l’honnêteté de son homme lige, soit la sagesse de ses avis.
    – Et moi, sire, dit-il, puis-je accompagner vos maréchaux ?
    – Non !… D’ailleurs, les Anglais ne vous ont que trop vu.
    Cette fois, l’opposition venait d’Alençon. Ogier devina qu’elle serait inflexible.
    – Nous sommes à égalité, Fenouillet !
    – Égalité dans un refus, messire Blainville, nullement dans…
    – Prends garde ! interrompit le Normand. Si tu te livres céans à quelque insolence, tu le

Weitere Kostenlose Bücher