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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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paieras bien cher !
    Cela dit, et se remettant à rire, Blainville s’enfonça derrière les maréchaux, et disparut. Ogier décida d’en faire autant.
    – Puis-je me retirer, monseigneur ?
    – Oui ! accepta Charles d’Alençon. Profitez de ce jour de quiétude… Marchez dans la cité ; les filles y sont belles… Il y a même trois bordeaux, à ce qu’on m’a dit, mais je crains que les hommes n’y fassent la queue !
    Et comme Ogier s’éloignait, le comte le rejoignit et l’attrapa par sa cubitière :
    – Vous voyez que mon frère est fort avisé en ce qui concerne Blainville !
    Le sourire satisfait cessa brusquement :
    – Quant à vous, obéissez !… Dès que nous en aurons fini avec les Anglais, je vous prendrai dans ma mesnie et ferai votre fortune. Nous en reparlerons !
    Le frère du roi s’en retourna d’humeur heureuse, puisqu’il chantonnait.
    Ogier sortit du cloître et retrouva Champartel entre leurs chevaux.
    – Je crois, Thierry, que nous nous battrons demain… Si Édouard est demeuré entre Wadicourt et Crécy, c’est qu’il nous espère avec l’idée de nous mettre en charpie… Je m’attendais à ouïr quelques mandements pour le rassemblement des hommes et les dispositions que nous prendrons avant de donner l’assaut. Il me semble qu’il en est temps… Or, rien !… Jamais je n’ai vu cela !… Où les barons rassembleront-ils leurs compagnies ? Quand ? Qui décidera de ce qu’il faut faire ? Nul n’y songe apparemment !
    – Allons, ne vous tourmentez pas, messire. J’ai encore une poignée d’écus : allons manger dans quelque échoppe, puis retrouvons la paille de notre étable… Dormir conservera nos forces… Nous allons en avoir besoin !
    À vêpres, les deux compagnons revinrent au prieuré Saint-Pierre. Laissant son Blanchet à Thierry, Ogier retrouva le cloître et le roi, assis comme le matin, entre l’Aveugle et Charles d’Alençon. Les deux maréchaux venaient d’arriver : leurs chevaux fumants, écumants, grattaient la terre du jardinet, et l’un d’eux, celui de Montmorency, mangeait des pommes.
    Toujours vêtu de velours sombre, Philippe VI s’adossa au fut d’une colonne :
    – Commencez, Saint-Venant.
    – Sire, ils sont bien, comme nous le pensions, vingt-cinq mille… Dix mille archers gallois, dix mille bidaus, quatre ou cinq mille armures de fer. Des chevaux qui, de loin, nous ont paru las…
    – Si las, dit Montmorency en riant, que les nôtres, galopant à leur rencontre, feront dix enjambées quand ils en feront deux.
    Il y eut des rires : sans bonne cavalerie, Édouard avait déjà perdu la bataille.
    – Dix mille bidaus ! s’exclama Philippe VI. Nous en avons cinq ou six fois plus ! Nous pourrions leur en prêter pour nous opposer à chances égales !
    On s’ébaudit très fort ; le roi en fut ravi et demanda :
    – Leurs armes ?
    – Ils portent la coustille, le vouge, la guisarme et le fauchard, comme nos hommes. Ils ont aussi des haches et des couteaux de brèche… Nous les avons bien vus pendant qu’ils coupaient des arbres dans la forêt.
    – Que veulent-ils faire de tout ce bois ? demanda le roi en jetant un regard circulaire. Cuire la soupe ?
    – Des roullis (369) , sûrement, répondit Jean l’Aveugle.
    – Que de temps perdu, mon parent ! Nulle barrière n’arrêtera nos roncins !
    Cela dit, Philippe VI se leva, majestueux dans ses vêtements noirs où seul un gros collier d’or apportait un peu de joyeuseté. Ogier s’attendit à ce qu’un maréchal – n’importe lequel – prît la parole et mît le roi en garde contre sa confiance excessive. Il n’en fut rien : tous l’approuvaient.
    – Eh bien, messires, allons souper, dit Philippe VI. Nous devons fêter la rencontre de demain comme il convient ! Venez, tous ceux que j’ai conviés… Je vous ai fait apprêter quelques paons et faisans à la sauce poivrade, et quelques gros poissons de cette Somme qui nous a joué un si vilain tour !
    – Sire, observa respectueusement le Moyne de Bâle, ce n’est pas la Somme, mais les Anglais.
    Après avoir approuvé d’un clin d’œil le feudataire du roi de Bohême, Ogier vit passer devant lui Alençon, rêveur ; Blainville, livide et soucieux ; Montmorency et Saint-Venant, fiers et soulagés ; le comte de Blois, Bricquebec et le comte de Flandre en conversation chuchotée ; le duc de Lorraine, sourcilleux ; le comte d’Auxerre se pourléchant à l’avance

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