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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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en demande raison !
    – Messire, dit Thierry, si je suis passé devant vous c’est que…
    – Messire, hurla Preuilly, sur-le-champ ! Ou par Dieu, je vous prendrai pour un dévergondé !
    Un gantelet tomba aux pieds de Champartel. Il le déplaça du bout de son soleret puis s’en saisit :
    – Soit !… Reprends ça et va demander l’assentiment du Roi d’armes.
    Et tourné vers Ogier tandis que le hutin s’éloignait :
    – Avez-vous vu sa goule ? Je jurerais qu’il a seize ans !
    – Dame Berthe le double : elle aime la chair tendre.
    – Je vais lui donner de quoi s’attendrir.
     
    *
     
    Hennissant de joie, Veillantif s’élança. Le cheval blanc de Collart de Preuilly ne manquait ni de force ni d’ardeur ; son cavalier en avait moins : il reçut le rochet de Thierry dans l’épaule, bascula, et son pied restant dans l’étrier, fut traîné dans le pré jusqu’à ce que des palefreniers missent fin à ses souffrances en arrêtant la monture effrayée.
    Denis courut aux nouvelles.
    – Une jambe rompue et les reins endommagés, dit-il à son retour. Je crains qu’il ne puisse plus forniquer. Quant à son destrier, il souffre d’une (70) mais il paraît qu’il s’en remettra plus aisément que son propriétaire.
    Thierry décida de quitter son armure. Un héraut arriva, menant deux chevaux par la bride :
    – Messire Fenouillet, ils sont à vous : ce sont ceux de Ruy Diego de Lerga et de Guy de Passac. Leurs harnois sont dans ces toiles, sur leurs selles.
    Ogier s’approcha du genet de l’Espagnol, souleva son houssement crevé par l’éperon et scruta la plaie profonde.
    – Il saigne toujours, mais les boyaux ne semblent pas atteints.
    Et voyant Marcaillou revenir seul :
    – Alors ? Et ce mire que tu devais amener ?
    – Pas vu. On m’a dit qu’il était revenu chez lui.
    Le jongleur se pencha, toucha le ventre de la bête qui recula, prête à ruer :
    – Oh ! là là… Qu’allez-vous faire, messire Ogier ?
    – J’ai deux raisons d’aller trouver ce maître : ce destrier malheureux et mon épaule. J’en souffre de plus en plus… Accompagne-moi, Marcaillou. Vous autres, veillez à tout… Allez voir Saladin, sous la tente, mais ne le déliez pas.
    Il pouvait quitter les abords du champ clos et n’y réapparaître qu’à la fin de l’après-midi. Quelle qu’en fut la durée, cet éloignement serait profitable à ses nerfs.
    – Revenez vélocement, dit Thierry. Plus ça va, plus je crains je ne sais quoi.
    – Un malheur ?
    – Quelque chose qui lui ressemble.
    – Moi aussi… Je n’en puis définir les contours.
    Le danger ne semblait point imminent. S’il existait, les coups reçus contre l’épaule n’étaient qu’une espèce d’acompte.
    Ogier confia son bassinet à Raymond. Le sergent le reçut avec un respect dont l’embarras tira un sourire à Thierry. Allons ! il guérirait du deuil d’Adelis. Il songerait à la martyre comme à une amie lointaine. Et même comme à une sainte.
    – Guérissez, messire, dit-il. La tâche qui vous attend sera rude. Tous ces prud’hommes falourdeurs (71) ont envie de vous meshaigner sinon de vous occire.
    Thierry ne pouvait demeurer en reste :
    – S’ils pouvaient, dit-il, vous envoyer à Montfaucon pour je ne sais quel forfait, tous se frotteraient les mains.
    – Vous deviendriez, dit Marcaillou, le compère d’Enguerrand de Marigny. On prétend qu’il inaugura ce grand gibet qu’il avait fait bâtir… Il ne doit subsister de lui que les os.
    – Montfaucon exista bien avant lui (72) . Et j’en connais un que j’enverrais volontiers se balancer là-bas !
    – Patience, dit Thierry. Mieux vaut l’outrepercer que de lui offrir la hart (73)  : un de ses suppôts en pourrait trancher la corde et soustraire son corps à la malefaim des oiseaux.
    Blainville encore. Ils s’étaient tous gardés de prononcer son nom pour exorciser ce démon. Cependant, il était parmi eux. Son ombre maléfïcieuse les dominait.

IV
    Au milieu de la rue ombreuse, un chien gris, malingre, aboya puis disparut sous un porche. Plus loin, assise sur une chaise basse, une jouvencelle tressait des joncs. Le sabotement du cheval de Lerga ne parvint pas à la distraire de son ouvrage. Au contraire : elle se pencha davantage. Indifférence ou dérision ? Marcaillou en fut affligé :
    – En voilà une que nos liesses n’émeuvent point ! C’est à peine si elle nous a vus passer…
    – Elle n’a

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