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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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continuer avec d’autres ; il devrait, dans la soirée, affronter les meilleurs et l’un d’eux pourrait le dominer. Immobile sur son banc, épiée par ses voisines ébahies par son indifférence, elle se composait un visage « royal » : austère et solennel. « Elle aurait bien voulu qu’on crève l’un par l’autre ! » Vainqueur provisoire, il la décevait.
    La brunette en robe rouge dont il ne savait rien sinon qu’elle l’avait encouragé, se leva. Le plaisir et la joie la rendaient admirable. Elle s’écria :
    – Vive le chevalier au Poing Vermeil !
    Aussitôt, d’autres cris s’élevèrent : « Honneur au Poing Vermeil ! – Renommée à la bonne lance ! – Louange et prix, car il ne s’est point désheaumé ! » Ogier se roidit sur sa selle, salua d’un geste ample, puis déplaça son cheval devant Blandine, toujours droite près de sa mère ; et comme Marcaillou accourait, il lui désigna, dans l’herbe, l’objet brillant qu’elle lui avait lancé :
    – Donne.
    – Une boucle de ceinture, messire.
    Ogier la porta aussitôt à ses lèvres.
    Il surprit le regard offensé de dame Berland, mais n’en eut cure. Le sourire de sa fille le combla d’aise. Il ne sentit plus son bras endolori ; et comme une acclamation saluait son aveu d’amour, il s’inclina devant ces dames et damoiselles dont certaines, sans doute, enviaient Blandine. Marchegai encensa, de sorte qu’il parut sensible, lui aussi, à cette ovation. Il n’en fallut pas davantage pour que dame Alix d’Harcourt, non loin d’Isabelle, se mît à rire. On l’imita. Le rire gagna la loge de l’évêque et monseigneur Fort d’Aux en fut atteint. Ogier salua une fois encore, puis traversa le champ. Avant d’atteindre ses compagnons, il vit Olivier de Fontenay marcher vers lui d’un pas décidé, le visage tout aussi rouge que la soie et le velours de ses vêtements.
    – Messire, nul ne voulant courir maintenant contre vous, il ne vous reste plus qu’à voir les autres contrester (69) . Quand les meilleurs resteront, je viendrai vous requérir de refermer votre ventaille et de vous remettre en selle… Nous saurons, à la nuit tombante, quel est le champion de cette journée.
    – Nous le saurons, messire, en même temps. J’ai, tel que vous me voyez, grand besoin d’oublier cette lice et les rudesses qu’on y échange.
    Le Roi d’armes s’éloigna, adressa quelques observations aux maréchaux de lice, puis appela les juges et les consulta. Des trompettes sonnèrent ; des chevaliers, les uns par le montoir, les autres par l’étrier, se mirent en selle.
    – Au lieu de les regarder, dit Thierry, vous feriez mieux d’aller dormir !
    Ogier ne pensait qu’à quitter son armure :
    – Marcaillou… Essaie de m’amener sans tarder ce mire qu’on appelle Benoît Sirvin. J’ai l’épaule en bouillie et le mal s’aggrave.
    Puis à Thierry :
    – As-tu défié qui je t’ai dit ?
    – Oui, messire, et l’homme en a été tout ébaubi… D’ici à ce qu’il ait cru que j’étais, moi aussi, l’amant de sa femme…
    L’écuyer dut s’interrompre : un héraut l’appelait à jouter. Raymond, aussitôt, lui amena Veillantif.
     
    *
     
    Bouchard de Noyant savait tenir une lance : dès la première course et bien qu’il eût atteint, lui aussi, le centre de la targe adverse, Thierry faillit tomber.
    À la seconde, s’étant ressaisi, l’écuyer frappa juste et fort : l’époux de dame Berthe chancela sur sa selle.
    À la troisième, accrochant ou touchant de sa housse les brisures de la barrière, le cheval de Bouchard fit une incartade. Thierry leva sa lance, tourna bride et revint sur son aire, frais et dispos pour un quatrième galop, tandis qu’une ovation saluait sa courtoisie.
    – Moi, je l’aurais bouté ! s’exclama Raymond. Ça te va bien de te montrer magnanime !
    – Bah ! je me suis conduit loyalement, mais je ne sursois pas à sa défaite… Tu vas voir !
    On vit. Noyant leva trop haut sa targe. Le rochet de Thierry glissa dessus et atteignit la hanche couverte d’un épais jupon de mailles. Le chevalier vida les étriers.
    Tandis qu’on emportait le vaincu sur une claie, un jeunet furieux, en haubert trop grand pour lui, galopa jusqu’au vainqueur :
    – Messire, je suis Collart de Preuilly, et c’était mon devoir d’affronter cet homme… Vous l’avez bouté hors de telle sorte que je ne sais plus quand je pourrai lui fournir ma leçon… Je vous

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