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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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éléments commençaient à s’ordonner, Ogier entrevit au premier rang le loup de Raoul de Cahors, le merlan du père de Blandine, l’aigle de Guesclin et le griffon de Blainville.
    « Ils vont voir ! »
    De loin, la tour blanche sommant le heaume du seigneur appelant semblait une mitre empruntée à l’évêque.
    La foule s’était assagie ; une houle parfois en agitait les têtes. Des enfants se juchaient dans les arbres.
    – Allons, messires, un petit en avant…
    Alençon conduisit son cheval jusqu’à l’échelier interdisant l’accès du champ. Étienne de Vertaing amena le sien à la droite du comte. La bannière que l’écuyer tenait appuyée sur le faucre de l’étrier était si large et si longue qu’un coup de vent l’en drapa. Le porte-pennon se plaça à la gauche du frère du roi, qui parut ainsi une sorte de donjon de fer entre deux tours inégales et différemment pavoisées.
    – Haiez-vous par dix en bon conroi (159) , dit-il sans se retourner.
    Sous le mors, certains chevaux se regimbèrent ; l’un d’eux, en rut, voulut monter celui qui le précédait, provoquant des cris, des jurons, des coups de plat d’épée. Le torse d’Alençon oscilla d’impatience.
    – Êtes-vous de la première haie, Fenouillet ?
    – Oui, monseigneur, juste à côté de vous.
    – Bien… Les varlets à cheval ?
    – Nous formons la quatrième haie, monseigneur.
    – Les piétons ?
    – En haie, monseigneur, et prêts, de leurs bâtons, à assurer de la protection de vos hommes !
    – Les porte-bannières des seigneurs présents ?
    – Derrière encore, monseigneur, et prêts à pousser le haro quand il faudra !
    Ogier aperçut un peu du profil de Guînes, son voisin de gauche. Plus que pâle : plâtreux. Ses lèvres tremblaient car il priait pour sa sauvegarde. Nul doute, c’était un couard. Quant à lui, « Fenouillet », il se sentait seul. Malgré Thierry à sa droite.
    « La belle affaire d’avoir connaissance de la prochaine attaque des Goddons ! Je devrais être à six ou sept lieues de Chauvigny, à présent ! »
    –  La Reine et monseigneur Fort d’Aux  ! hurla un héraut.
    Derrière le gros prélat et quatre coadjuteurs, Isabelle apparut, toujours vêtue de blanc, dans le couloir formé par les barrières. Les dames, nobles et bourgeoises, autour d’Alix d’Harcourt, formaient sa suite. Comme l’échafaud qu’elles occupaient la veille devait revenir aux juges afin qu’ils fussent placés juste au milieu du terrain pour surveiller les tournoyeurs, elles se séparèrent et accédèrent, au moyen des échelles, à l’une ou l’autre des tribunes voisines.
    – Il me semble, messire, dit Thierry, que votre Blandine est absente.
    – C’est vrai… Sa mère aussi.
    – Bah ! vous la reverrez.
    Ogier cessa de regarder la reine, l’évêque mitré de blanc et d’or, les robes chatoyantes pour observer les pies dans le ciel. Elles criaient sans oser se poser sur les arbres ; quand les trompettes sonnèrent, elles s’enfuirent en un vol puissant, comme définitif, vers les collines, loin derrière la cité.
    Des sergents scintillants de mailles poussèrent la heze (160) longue devant l’appelant, et André de Chauvigny, précédé de son pennoncier, suivi de son porte-bannière, entra sur le pré, salué par une ovation couvrant une brève sonnerie de trompes.
    –  Chauvigny Chevaliers pleuvent (161)  ! hurla-t-il.
    Il arrêta son cheval devant la corde tendue à hauteur du poitrail de celui-ci. Cette longue couleuvre de chanvre passait en ses extrémités au-dessus de deux billots de chêne hauts d’une demi-toise fixés contre l’appui de la barrière.
    La petite armée chauvinoise s’aligna sur trois rangs. Ses suivants à cheval ou à pied munis de leurs tronçons de lances, puis ses porte-bannières, se disposèrent dans le même ordre que ceux d’Alençon. Alors, tandis que la seconde heze glissait devant le comte, les juges, les tabellions et leurs recors (162) apparurent : un concile d’hommes vêtus du cou jusqu’aux genoux d’une cotardie de drap rouge. Ils se séparèrent en deux groupes : cinq d’entre eux, parmi lesquels Ogier reconnut Amaury, Augustin et Arnaud prirent place au premier rang de l’ambon central ; les autres se répartirent dans la forclose autour de la lice. Le héraut qu’ils s’étaient choisi, un gros brun moustachu coiffé d’un toquet vermillon, proclama que l’appelant était présent sur le

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